Face à la crise ukrainienne: Quelles perspectives pour le cours du pétrole/gaz, la sécurité alimentaire et la coopération Algérie-Europe dans le domaine énergétique ?

0
348
EU leaders attend a summit to discuss the fallout of Russia's invasion in Ukraine, at the Palace of Versailles, near Paris, on March 10, 2022. - EU leaders are scrambling to find ways to urgently address the fallout of Russia's invasion of Ukraine that has imperilled the bloc's economy and exposed a dire need for a stronger defence. (Photo by Ludovic MARIN / POOL / AFP)

Avec l’impact de la crise du coronavirus et récemment avec la crise ukrainienne, plus jamais le monde ne sera comme avant préfigurant d’importantes mutations dans les relations internationales, sécuritaires, politiques et économiques.

L’embargo décidé par le président américain, dont les USA qui ne dépendent pas de l’énergie russe étant devenu autonome grâce au pétrole/gaz de schiste, étant devenu exportateur et surtout la position mesurée des pays de l’Union européenne des 27 lors de la dernière rencontre à Versailles à Paris, le 10 mars 2022 fortement dépendants du gaz russe, surtout l’Allemagne et l’assurance de la Russie de continuer à approvisionner l’Europe a fait que le cours du gaz a perdu 50 % depuis son sommet atteint le 7 mars 2022 à 345 mégawattheure, ayant reculé depuis le 11 mars 2022, de 18,09 % à 175,75 euros le mégawattheure mais reste en hausse de 147 % depuis début janvier 2022. Idem avec une accalmie du cours du pétrole qui a été coté le 13 mars 2022 12hGMT, à 112,42 dollars pour le Brent et pour le Wit 109,20 dollars, alors que certains prévoyaient rapidement un cours à 200 dollars. Et actuellement aucun expert ne peut prédire l’évolution des cours, étant fonction des facteurs déterminants de la géopolitique. Mais à terme se dessine une autre stratégie, à moyen terme l’accélération de la transition énergétique et à court terme, le paradoxe, de se tourner vers d’autres pays pour leurs approvisionnements, les ennemis d’hier, sous la pression de la conjoncture, les émissaires américains envoyés au Venezuela, premier réservoir de pétrole brut au monde, 266 milliards de barils (certes un pétrole lourd) et l’accélération des négociations avec l’Iran deuxième réservoir mondial de gaz 35 000 milliards de mètres cubes gazeux après la Russie 45 000, qui est disposé selon son ministre de l’Energie à augmenter sa production également de pétrole avec environ 55 milliards de barils de réserve de pétrole, tout en faisant pression sur les pays l’OPEP dont l’Arabie saoudite 267 milliards de barils de pétrole de réserve, les Emiratis 98 milliard de barils de pétrole de réserve, ce dernier ayant annoncé son intention d’accroître sa production. N’oublions pas les négociations en cours avec le Qatar 15 000 milliards de mètres cubes gazeux de réserve, le Nigeria 5500 milliards de réserves de gaz, la Libye 42 milliards de barils de pétrole et 1500 milliards de mètres cubes de gaz, l’Algérie plus de 10 milliards de barils de pétrole et 2500 milliards de mètres cubes, pour le gaz. Cette présente contribution est une synthèse de l’ analyse développée dans un long débat interview par le PDG de Beur/FM Paris, que vous pouvez écouter le 13/09/2022 de 17 à 18h, posant cette question: quels impacts la crise ukrainienne sur le cours du pétrole/gaz, sur la sécurité alimentaire et des relations entre l’Algérie et l’Europe tant dans le domaine géostratégique qu’ énergétique ?

1.- Nous sommes à l’ère de la mondialisation et durant cette conjoncture particulière de la crise avec l’Ukraine, l’Europe est dépendante de plus de 26% pour le pétrole et plus de 40% de la consommation de gaz. Les exportations énergétiques représentent la moitié des exportations de matières premières et pour 2021, la moitié des exportations énergétiques russes sont dirigées vers l’Union européenne, soit environ 125 milliards de dollars et 8,5 % du PIB russe et les exportations de pétrole vers l’Union européenne représentent plus de 100 milliards de dollars pour la Russie, soit environ 7 % du PIB. La Russie avec une population de 144 millions d’habitants et un PIB de 1 473 Md USD en 2020, la 11e économie mondiale, contribue à plus de 12 % de la production mondiale étant le troisième producteur mondial d’aluminium, un des plus gros producteurs de nickel au monde, le troisième derrière l’Indonésie et les Philippines et du côté aluminium, selon le World Bureau of Metal Statistics. Plus précisément le flux des échanges commerciaux entre la Russie et le reste du monde pour les importations, les principaux partenaires pour les importations sont l’Union européenne 34%, la Chine 23%, Biélorussie 5%, USA 6%, Turquie 2%, la Corée du Sud 3% et autres pays 27%. Plus précisément, pour les partenaires en matière d’exportation, nous avons l’Union européenne 38%, dont plus de 40% pour l’énergie, la Chine 14%, Biélorussie 5%, USA 3%, Turquie 5%, la Corée du Sud 4% et autres 31%. Bien que le rouble a été dévalué de plus de 40% en un mois, ce qui a des incidences sur le taux l’inflation, la Russie a des réserves de change au 1er janvier 2022 de 630 milliards de dollars dont 2200 tonnes d’or. Les incidences des sanctions économiques contre la Russie, par l’éviction du système SWIFT et le blocage du système de messagerie interbancaire, imposée par les pays occidentaux, bien que certaines banques continuent dans les transactions pour le gaz sous pression de l’Allemagne fortement dépendante du gaz russe, bouleverse l’architecture des relations financières internationales, ayant un impact négatif sur l’économie russe, mais parallèlement, sur l’économie mondiale, ce qui a conduit la Russie à étudier des alternatives vers le système de paiement interbancaire transfrontalier (CIPS); qui a été développé par la Chine en 2015, où les relations commerciales de Pékin et de Moscou étant régies à 17,5% par le yuan, le système de paiement CIPS étant principalement utilisé pour régler les crédits internationaux en yuan et les échanges liés à l’initiative «Belt and Road», agissant comme un système alternatif au traditionnel Swift créé en 1973, bien qu’il n’en soit pas encore totalement indépendant. Quant à l’impact de tensions en Ukraine sur la crise alimentaire, pour les produits alimentaires 30% des exportations mondiales proviennent de l’Ukraine et la Russie, le prix du blé ayant doublé par deux et risque d’être multiplié par trois. La tonne de maïs, sur l’échéance rapprochée d’une livraison en mars, se cotait le 3 mars 2022 à 280 euros pour remonter le 4 mars à 290 euros. Concernant le blé, celui-ci a atteint jeudi 316 euros le 3 mars, si la crise devait durer selon certains experts il pourrait atteindre entre 450/500 euros, il en est de même pour les prix du tournesol, les deux pays représentant près de 80% des exportations mondiales d’huile de tournesol. Ainsi, les cours du colza progressent très nettement dans le sillage des autres huiles selon le cabinet Agritel, l’huile de palme était de de 500 ringgit, à 6.458 ringgit la tonne, sur l’échéance de mai 2022. L’impact la crise alimentaire mondiale serait plus dramatique sur les pays importateurs de produits alimentaires pas seulement l’Algérie et l’Egypte, et les plus vulnérables n’ayant pas les moyens de financement comme la Tunisie, le Liban et les pays d’Afrique subsaharienne qui sont les plus vulnérables. Par ailleurs, des pays peu diversifiés dépendants des hydrocarbures pour leur exportations, important massivement les denrées alimentaires des biens d’équipements et matières premières, ce qu’ils gagnent d’un côté, ils le perdent de l’autre avec la hausse de ces prix, les impacts seront négatifs. Sans une solution rapide, l’économie mondiale risque de connaître une récession pire que celle de l’impact du coronavirus et la crise de 2008, avec une poussée inflationniste et du chômage au niveau mondial ce qu’on qualifie de stagflation. (Voir nos contributions nationales et internationales sur la flambée du prix du pétrole et des denrées alimentaires (www.google.com mars 2022). Le risque est l’accroissement d’accroître certes une récession de l’économie russe mais de vives tensions en Europe avec l’envolée du processus inflationniste, plus de 5% avec l’augmentation de la dette publique qui est passée antérieurement du fait de l’épidémie du coronavirus, d’environ 70% du PIB en 2007 à 124% du PIB en 2020 et au niveau mondial selon le FMI pour 2020 la dette globale ayant atteint un montant de 226.000 milliards de dollars pour atteindre 256% du PIB mondial. Les expériences historiques récentes montrent qu’un prix du pétrole au dessus de 100 dollars entraîne à terme, avec une économie mondiale toujours fragile, des répercussions négatives sur la Chine locomotive de l’économie mondiale dont la majorité de ses exportations sont dirigées vers les USA et l’Europe, les relations Chine /Russie pour l’instant étant encore marginales, avec ce risque d’avoir à nouveau un prix en dessous de 50 dollars, en 2023/2024 en cas de récession de l’économie mondiale, le prix d’équilibre se situant entre 70/80 dollars. (notre interview Radio Algérie Internationale le 8 mars 2022).