Clôture du festival du film arabe à Oran : Projection du film libanais «Mahbas», réalisé par Sophie Boutros

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Le film libanais «Mahbas», réalisé par Sophie Boutros, reflète une image de la réalité des relations et des liens entre les peuples libanais et syrien, a indiqué, ce dimanche soir, à Oran, la productrice de cette œuvre cinématographique, Nadia Eliewat. La productrice a affirmé, lors d’une conférence-débat animée au terme de la projection de son film «Mahbas», au dernier jour de la 10e édition du Festival international d’Oran du film arabe (FIOFA) qui s’est clôturée lundi soir 31 juillet, que ce film reflétait une image de la fraternité, d’une part, et les séquelles du différend et de l’ancien conflit pendant la guerre civile au Liban dans les années 1980.

La productrice a plaidé en faveur de l’importance de réaliser des films qui traitent des questions d’actualité et du passé, soulignant que «le cinéma pourrait panser les anciennes plaies et faire renaître l’amour et la fraternité entre les différentes parties du monde arabe». D’une durée de 92 minutes, ce film relate l’histoire de «Thérèse», l’épouse du maire d’une commune libanaise située en pleine montagne et qui s’apprêtait à accueillir la famille du fiancé de sa fille avant qu’elle ne découvre que cette même famille est originaire de Syrie. Thérèse commence alors à recourir à tous moyens susceptibles d’empêcher ces fiançailles, qui se sont finalement concrétisées en mariage, et ce, en dépit des complots ourdis par la mère qui éprouvait une haine viscérale pour la Syrie.

«Thérèse» vit avec les souvenirs de son frère mort suite aux tirs de l’artillerie syrienne. Dans ce même sillage, le film aborde la question du flux migratoire syrien vers le Liban, les litiges relatifs à la terre et bien d’autres sujets. Réalisée en 2016, cette œuvre a connu la participation d’acteurs et actrices, à l’instar de Julia Kassar, Ali El Khalil, Bassam Koussa, Nadine Khoury et Serena Chami.

Par ailleurs, un autre film long métrage est programmé pour dimanche soir, à la salle «Maghreb» qui a abrité, une semaine durant, cette catégorie de films inscrits au titre du FIOFA. Cette projection syrienne intitulée El Ab (le père) du réalisateur Bassil Al Khatib relate la tragédie vécue par la Syrie depuis des années et le personnage de Ibrahim Abdellah qui tente de sécuriser la sortie des gens de son village et de sa famille vers un lieu sûr, après avoir été pris au piège de l’organisation terroriste connue sous le nom «Daech». Réalisé en 2017, ce long métrage a connu la participation d’Aymen Zidane, Robine Aïssa, Yahia Biazi, Alaâ Kasseem, Rana Karam ainsi que d’autres acteurs.

 »En attendant les hirondelles », de Karim Moussaoui, plébiscité

Le film algérien En attendant les hirondelles, de Karim Moussaoui, a raflé la mise, à la cérémonie de remise des prix du Fiofa 2017, organisée au théâtre de verdure d’Oran. Hormis le «Wihr d’or», le grand prix attribué à cette œuvre remarquable, le trophée du meilleur réalisateur est également revenu à son réalisateur, alors que deux mentions spéciales du jury ont récompensé Hania Amar et Mehdi Ramdane comme meilleurs espoirs, respectivement féminin et masculin. Une belle consécration, sachant que Karim Moussaoui signe là son tout premier long métrage. C’est Hasan Kechiche, par ailleurs, distribué dans le même film, qui a reçu le trophée à la place du concerné, absent à la soirée. «Je suis sûr qu’il va être très content, car c’est un jeune cinéaste que cette distinction va certainement booster afin d’aller de l’avant avec ce nouveau cinéma et cette nouvelle vision», a-t-il indiqué.

Plusieurs autres films se sont partagé le reste des prix prévus par ce festival. Le Prix du meilleur rôle masculin a récompensé le Syrien Aymen Zidan, pour avoir brillé dans Le Père, film syrien de Bassil El Khatib, tandis que celui du meilleur second rôle féminin est revenu à la Libanaise Darine Hamzé, pour sa performance dans Nuts, du réalisateur français Henri Bargès. «Nous sommes réunis aujourd’hui pour célébrer l’art et la beauté et non la guerre», s’est exclamée l’actrice, faisant référence aux événements qui continuent d’endeuiller des familles de la sphère arabe.

Une autre Libanaise, Nadia Aliouat, a été récompensée pour le scénario du film Mahbas, coécrit avec sa compatriote et réalisatrice Sophie Boutros. «Je remercie le festival qui a institué cette distinction, car l’écriture en amont est une étape fondamentale dans la fabrication d’un film», s’est-elle réjouie.

Seul film traitant de l’histoire antique du Maghreb, Augustinos, le fils de ses larmes, a eu le Prix du public. A l’issue de sa projection quelques jours auparavant, il a suscité un large débat animé par l’équipe de cette coproduction algéro-tunisienne, mais aussi égyptienne, si, en dehors des producteurs, on tient compte de la nationalité du réalisateur, Samir Seif. «Quelle belle surprise !» Ce sont les premiers mots de l’un des représentants de la production, qui, dans son intervention, a mis en avant les qualités humaines du grand penseur de l’antique Thagaste (Actuellement Souk Ahras) pour qui les limites de l’amour c’est d’aimer sans limites. «C’est un film historique sur un grand penseur humaniste, un Amazighe, un Numide dont il faut être fier», a ajouté le même intervenant.

Dans la catégorie des documentaires, le choix du jury s’est porté sur La chasse aux fantômes, du Palestinien Raed Adhouni, qui a réalisé un travail remarquable sur les anciens détenus palestiniens dans les prisons israéliennes. Certains ont joué en quelque sorte leur propre rôle et le film, a-t-il expliqué, aurait très bien pu, s’il l’avait voulu et telle qu’on le lui a proposé, participer dans la catégorie fiction longs métrages. «Ils ont laissé leur âme dans ces rôles», a-t-il précisé avec émotion, mais sa pensée va vers les 7000 prisonniers qui croupissent encore actuellement en prison. Déjà lauréat de l’«Ahagar d’or» (ancienne dénomination du prix) en 2007, l’Algérien Mohamed Yargui a décroché cette année le «Wihr d’or» pour son court métrage «Je te promets», ex æquo avec le Palestinien Saïd Zagha pour Cinq enfants et une roue. Pour ce dernier cas, c’est Moshira Farouk, directrice pour une société de production égyptienne, qui a financé quatre travaux participant au festival, qui a reçu le prix à la place du réalisateur, obligé de quitter Oran dans la matinée.

La cérémonie de clôture a été également marquée par une série d’hommages à quelques figures du monde du cinéma arabe. C’est le cas de l’Egyptien Izzet El Alayli, qui a fait une belle impression. «C’est un moment très délicieux et j’en suis ému, mais je sens aujourd’hui que vous m’avez confié une grande responsabilité parce que ce pays je le chéris», at-il déclaré, pour ensuite rappeler sa participation dans le passé à un grand projet cinématographique avec Ahmed Rachedi. «J’ai vécu 8 mois à Tébessa, où j’ai côtoyé l’homme de la rue de cette Algérie résistante, qui a une histoire honorable, qui recèle de véritables capacités artistiques et à laquelle je souhaite de tout mon cœur un progrès durable», a-t-il ajouté.

Hormis le clin d’œil à la chanteuse Houyam Younes, révélée par le cinéma alors qu’elle n’avait que 5 ans, les organisateurs ont pris l’initiative d’honorer des films marquants projetés hors compétition, c’est le cas pour «Ben Badis», de Bassim El Khatib, mais aussi de Mawlana, de Magdi Ahmed Ali. Les références d’époque ne sont pas les mêmes, mais les deux traitent de la pensée islamique authentique, qui prône la tolérance tout en restant attachée aux grands principes de justice. Le réalisateur égyptien a remercié le gouvernement algérien pour avoir autorisé la projection de son film alors qu’il a été interdit dans certains pays musulmans. Sa satisfaction est d’autant plus grande que sa vision du 7e art est qu’il faut faire des films pour le public.

A la fin de la soirée, ouverte par Brahim Seddiki, commissaire du festival, et à laquelle a assisté El Hadi Ould Ali, ministre de la Jeunesse et des Sports, invité pour le remplacer par son homologue de la Culture, Azzedine Mihoubi, un hommage particulier a été rendu au président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Ce dernier a été distingué pour l’intérêt qu’il accorde à la promotion de la culture en général et au soutien qu’il a toujours apporté à ce festival. Un événement qui doit désormais regarder vers l’avenir, comme l’a suggéré son commissaire.