Développement des PMI/PME et sous-traitance: Les fondements d’une économie diversifiée hors hydrocarbures

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Cette présente contribution est le prolongement d’une interview donnée au quotidien national arabophone Ech Chaab le 06 septembre (1) sur l’importance de la sous-traitante insérée dans le cadre de la dynamisation des PMI/PME reprenant ma conférence à Alger Club des Pins donnée devant les membres gouvernement en octobre 2019 qui a pris en compte mes recommandations.

1 – Les conditions de réussite de la sous-traitance ?

Nous distinguons trois types de sous-traitance à savoir: – La sous-traitance de spécialité, – La sous-traitance de capacité, – La sous-traitance de marché. La sous-traitance est une opération par laquelle une entreprise (appelée donneur d’ordre) confie à une autre entreprise (appelée sous-traitant) la mission de réaliser pour elle une partie des actes de production et/ou de services dont elle demeure responsable. Dans la pratique l’on distingue trois types de sous-traitance à savoir: – La sous-traitance de spécialité, la sous-traitance de capacité. – La sous-traitance de marché.

La sous-traitance offre de nombreux avantages, mais présente aussi des risques. La sous-traitance en entreprise se doit d’être gérée de façon responsable et efficace autour de quatre axes directeurs : premièrement définir une planification qui couvre l’ensemble du projet avec des mesures adéquates de contrôle et d’accompagnement et donc un cahier des charges précis et structuré. Deuxièmement, le choix d’un sous-traitant doit se baser sur un ensemble de critères dont les capacités technologiques, et non seulement sur le meilleur prix offert. Troisièmement, mettre en place des modes d’évaluation. Certains logiciels de gestion de la sous-traitance sont dotés de modules permettant de faire l’analyse des risques afin de respecter les mesures de sécurité du donneur d’ordres. Quatrièmement, mettre en place une procédure de suivi et de prévention qui permet de contrôler le travail effectué, tout en s’assurant de la conformité du sous-traitant quant aux termes du contrat et des réunions régulières par communication ouverte pouvant contribuer à la réussite du travail. L’évaluation périodique du travail de sous-traitance en entreprise est indispensable durant le projet. Enfin cinquièmement, la réussite d’un projet de sous-traitance doit reposer sur un système de gestion de conformité des sous-traitants performant et éprouvé, répondant aux besoins, du donneur d’ordre qui doit être doté d’une planification stratégique. Qu’en est-il de la sous-traitance au niveau mondial ? Cela est lié à la stratégie des délocalisations, les grandes firmes se concentrant surtout sur la recherche développement noyau de la très forte valeur ajoutée. Si l’on prend quelques exemples, selon le rapport annuel de New Venture Research (NVR9) l’assemblage en électronique, qu’il soit réalisé en interne (OEM) ou confié à des sous-traitants (EMS ou ODM), a représenté 1400 milliards de dollars en 2020 et atteindra environ 1600 milliards de dollars en 2025, soit un taux de croissance annuel moyen de 3,4%, principalement alimentée par la demande de services de sous-traitance. Le marché mondial de la sous-traitance en électronique en électronique et passé de 595 milliards de dollars en 2020, à 700 milliards de dollars en 2022 et il est prévu 838 milliards de dollars en 2025. En 2022, les ventes cumulées des 50 premiers sous-traitants en électronique mondiaux ont augmenté de 40 milliards de dollars pour atteindre 457 milliards, soit une augmentation de 9,5% par rapport à 2021. Pour les industries mécaniques, selon la Fédération des industries mécaniques (FIM), le chiffre d’affaires est en hausse de 9,8 %, par rapport à 2021, à 146,9 milliards d’euros. Toutefois, en volume, la progression s’est limitée à +0,5 %. Malgré un marché des véhicules légers relativement stable en nombre d’unités, le marché mondial des semi-conducteurs pour l’automobile devrait passer de 44 milliards de dollars en 2021 à 80,7 milliards de dollars en 2027, soit un taux de croissance annuel moyen de 11,1%, selon une étude de Yole Intelligence. L’électrification et l’ADAS sont les principaux moteurs de cette croissance. Ainsi, le contenu semi- conducteur par véhicule devrait passer de 550 dollars à 912 dollars en 2027 et en nombre de composants, chaque nouvelle voiture devrait intégrer quelque 1100 puces en 2027, contre environ 820 puces en 2022

2 – Des PMI/PME innovantes, noyau du développement ?

Pour le ministre du Commerce et de la Promotion des exportations, «l’Algérie compte moins de 1000 entreprises de sous-traitance représentant à peine 10% du tissu industriel et le nombre de PMI/PME tourne en 2022 autour de 1 287 600 privées et publiques avec la prédominance de TPE et de petites Sarl souvent à gestion familiale ne maîtrisant pas les nouvelles technologies dont 1000 entreprises de sous-traitance ce qui représente à peine 10% du tissu industriel alors que s’impose au minimum 5 millions de PMI/PME, les star-tup étant inclus et ce, afin de créer des tissus industriels qui gravitent autour des grandes entreprises notamment Sonatrach et Sonelgaz et des grands groupes du BTPH comme Cosider pour participer à augmenter leurs taux d’intégration, devant être réaliste n’existant pas de taux d’intégration à 100%. Il s’agit, au sein d’un planification stratégique, d’avoir au minimum 5 millions de PMI/PME innovantes dans les domaines de la mécanique, la construction métallique, l’électricité, l’électronique, l’électroménager, des hydrocarbures, de l’énergie électrique, des mines, des industries pétrochimiques, de la sidérurgie, de la métallurgie, des cimenteries, des briqueteries, des travaux publics, des transports, de la réparation navale et des industries manufacturières. Qu’en est-il du bilan des différents protocoles d’accords signés entre 2021/2022 entre les groupes industriels et le réseau algérien des bourses de sous-traitance entre les grands donneurs d’ordre du secteur industriel et les PME et la création de réseaux de soutien technologique et d’innovation pour permettre aux porteurs de projets de bénéficier d’une expertise de qualité et du réseau d’incubateurs d’entreprises, dans le but d’encadrer et d’accompagner les porteurs de projets innovants ? Or, en décembre 2022, selon les données du gouvernement, nous avons 1 287 600 PME, privées et publiques, offrant 3 134 968 postes d’emplois. Or, des PMI/PME fiables doivent miser sur l’innovation permanente, utiliser les nouvelles technologies. C’est ainsi que la sous-traitance pourra apporter les solutions idoines aux préoccupations économiques nationales, avec la substitution à l’importation. Or, la cartographie industrielle est marquée par la prédominance des entreprises de très petites tailles (TPE) peu innovatrices selon les données de 2021 du ministère de l’Industrie et de l’ONS, 97% se situant sur la tranche d’effectifs 0-9 salarié. Quant aux entités économiques qui emploient 250 personnes et plus, elles ne représentent que 0,1 % de la population des entreprises. Cette stratégie du développement de la sous-traitance est intiment liée au développement des PMI/PME. J’émets neuf propositions opérationnelles pour dynamiser les PMI/PME via la sous traitance. Premièrement, créer une agence de service aux petites entreprises de moins de 20 salariés. L’environnement juridique, administratif, fiscal et social est particulièrement complexe et instable pour une très petite entreprise. En qualité d’employeur, une TPE est aujourd’hui en relation avec plusieurs dizaines d’organismes. Pourquoi ne pas s’inspirer du Small Business Service, interlocuteur administratif unique pour les très petites entreprises créé par le gouvernement britannique. Deuxièmement, pour le délai de paiement, je propose d’imposer une loi si nécessaire ou un décret exécutif pour le paiement aux PME à moins de 30 jours à compter de la date de livraison. Une telle décision permettra aux PME de recouvrer les milliards de dinars de trésorerie pour toutes les livraisons aux grandes entreprises et pour tous les marchés passés avec les collectivités publiques, les longs retards accumulés dans le paiement devenant étouffant supposant de revoir les procédures des finances publiques. Troisièmement, il faudrait élargir les possibilités de financement des PME en introduisant le Leasing, le capital-développement afin de financer le développement de l’entreprise car la majorité des entreprises familiales rechignent à chercher du capital à l’extérieur, et plus encore à entrer en Bourse. Quatrièmement, dans le cadre de règles contractuelles claires, les grandes entreprises publiques dont Sonatrach et Sonelgaz doivent réaliser de la sous-traitance par un co-partenariat.

À l’instar de ce qui se fait dans d’autres pays, les grandes entreprises algériennes fonctionnant d’ailleurs avec des fonds publics, pourraient s’appuyer sur des réseaux puissants de PME qui peuvent leur apporter des sous-traitants fiables, des innovations et des centres de recherches compatibles avec leurs propres activités. L’expérience allemande qui considère les PME comme des partenaires égaux. Cinquièmement, les règles comptables régissant les PMI-PME sont très lourdes et ne sont pas utiles à toutes les entreprises. On pourra donc s’orienter vers une comptabilité de trésorerie pour les entreprises de moins de 10/20 salariés.

Cette mesure permettrait de réduire leur charge administrative. Cependant cela ne concerne pas les PMI/PME empruntant ou augmentant leur capital qui devront répondre comme à l’heure actuelle aux demandes d’information des investisseurs et des banquiers. Sixièmement, il serait souhaitable de soumettre les petites PMI/PME à un régime fiscal et social spécifique notamment pour ceux dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas 10.000.000 DA avec un prélèvement libératoire de 10 à 15 % assimilable à l’impôt sur le revenu, se substituant à tous les impôts directs. Septièmement, alléger la procédure des 51/49 pour le partenariat avec l’étranger pour les activités non stratégiques à lister dont les petites et moyennes entreprises, en introduisant la minorité de blocage d’environ 30% et l’obligation d’un transfert technologique, managérial et d’une balance devise positive pour l’Algérie. Huitièmement, améliorer le climat des affaires en synchronisant la gouvernance centrale, locale et la gouvernance d’entreprise en s’attaquant à la bureaucratie bureaucratique qui paralyse les initiatives créatrices, la réforme profonde du système financier, le système socio-éducatif qui doit reposer sur la qualité et non la quantité, la formation professionnelle continue étant le nerf de la réussite de la sous traitance, et le marché du foncier afin de pouvoir faire face à la concurrence internationale (couts/qualité) et donc à l’inexorable défi de la mondialisation

En conclusion, l’on doit éviter la mentalité bureaucratique où à tout problème on pond une loi, car que l’on ne crée pas des entreprises par décrets mais le guide directeur étant le marché national et international pour déterminer la rentabilité économique en termes de coût/qualité, et devant améliorer le climat des affaires pour attirer tout investisseur qu’il soit national ou étranger.

Le temps ne se rattrape jamais en économie, sachant que si le projets sont mis en exploitation en janvier 2024, le seuil de rentabilité se fera dans deux à trois années, donc entre 2026/2027. Relevant de la sécurité nationale, existant un lien dialectique entre sécurité et développement, le défi de l’Algérie est de réaliser la transition d’une économie de rente à une économie hors hydrocarbures dans le cadre des valeurs internationales étant à l’aube de la quatrième révolution industrielle fondée sur les nouvelles technologies dont le numérique, et un nouveau modèle de consommation énergétique 2023/2030 D’où l’importance d’une stratégie d’adaptation au sein de filières internationalisées, et en approfondissant les réformes structurelles C’est un défi à la portée de l’Algérie.

(1)-Interview du professeur Abderrahmane Mebtoul – au quotidien Ech Chaab sur la stratégie industrielle du 06 septembre 2023.

A. M.

(ademmebtoul@gmail.com)