Face aux nouvelles mutations géostratégiques et économiques: Le poids des BRICS et quelle place pour l’Algérie dans la nouvelle reconfiguration mondiale

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L’envoyée spéciale chargée des grands partenariats internationaux au ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, a déclaré le 7 novembre 2022 au Forum de la Radio nationale, que « l’Algérie a déposé une candidature officielle pour rejoindre le groupe BRICS » ayant un accord de de principe de la Chine et de la Russie. Le poids croissant des BRICS et les tensions actuelles entre la Russie/Ukraine/Occident et les USA/ Chine concernant Taiwan en Asie, risquent de bouleverser toute la carte géopolitique du monde nous orientant vers un monde multipolaire où le poids économique des pays émergents face aux USA et l’Europe actuellement dominant, déterminera également le poids politique et militaire mondial horizon 2030. Cette présente contribution est un résumé de deux interviews l’une donnée en arabe à Radio Algérie Internationale ( RAI) et à Radio France Internationale ( RFI Paris) le 8 novembre 2022.

1.- Le poids de l’Asie avec la dominance de la Chine ne cesse de croître au niveau de l’économie mondiale concentrant la majorité de la population mondiale estimée en 2021 à 7,83 milliard d’habitants (plus de 8 milliards depuis janvier 2022) avec 4,717 milliards d’habitants. La Chine, civilisation millénaire est un pays paisible sans oublier l’Inde, n’ayant jamais été une puissance coloniale, considérant selon plusieurs études stratégiques de haut niveau les USA et l’Europe comme des partenaires économiques, ayant opté pour une position de neutralité concernant le conflit Russie/Ukraine. Le rêve chinois étant le volet surtout économique devenir la première puissance économique mondiale, où, en 2021, 70% de ses exportations l’étant avec les USA et l’Europe.

Le militaire a suivi, afin de défendre sa souveraineté nationale, comme l’atteste sa stratégie de la Route de la soie et son action en faveur du renforcement du BRICS où il entend jouer le rôle de leader. La nouvelle route de la soie est un projet stratégique chinois afin de ressusciter la mythique route caravanière qui reliait, il y a près de 2 000 ans, Xi’an en Chine à Antioche en Syrie médiévale (aujourd’hui en Turquie).Visant à relier économiquement la Chine à l’Europe et l’Afrique en intégrant les espaces d’Asie Centrale par un vaste réseau de corridors routiers et ferroviaires, concernant plus de 68 pays regroupant 4,4 milliards d’habitants et représentant près de 40 % du produit intérieur brut (PIB). Par ce projet, la stratégie vise à ancrer l’Europe orientale et l’Asie occidentale par un vaste réseau

d’ infrastructures, routes, chemin de fer, pipelines, câbles de fibres optiques et terminaux portuaires qui relieront les trois continents par terre et par mer, où toutes les routes conduiront à Pékin. Ce qui explique la récente contre-offensive américaine et accessoirement de l’Europe en direction de l’Afrique, enjeu économique du XXIe, importantes richesses et un quart de la population mondiale entre 2035/2040. siècle. La crise ukrainienne et récemment en Asie avec les tensions Chine/USA concernant l’avenir de Taiwan, la crise énergétique et alimentaire, l’impact de l’épidémie du coronavirus et du réchauffement climatique, posent la problématique d’une nouvelle architecture des relations internationales et sur le plan politique et sur le plan économique de la nécessaire transition numérique et énergétique qui devrait modifier considérablement tant les politiques sécuritaires, économiques, et sociales des Nations. Nous assistons à un profond bouleversement de l’ordre économique et géopolitique mondial où le commerce de l’énergie se modifie, l’inflation est de retour, la crise alimentaire guette bon nombre de pays, les chaînes d’approvisionnement se reconfigurent et les réseaux de paiement se fragmentent .

2.- C’est ainsi que le monde devrait connaître un grand bouleversement à travers le poids croissant des BRICS, composés de cinq pays. Nous avons le Brésil, (1608 milliards de dollars de PIB), la Russie (1750 milliards de dollars de PIB), l’Inde (3250 milliards de dollars de PIB), la Chine (,18460 milliards de dollars de PIB et des réserves change de plus de 3000 milliards de dollars ) et l’ Afrique du Sud, (420 milliards de dollars de PIB) L’acronyme BRIC/SAM (en anglais) , a été également utilisé pour y adjoindre le Mexique, sans qu’il soit membre de ce groupe, rejoints en tant qu’ observateurs par la Thaïlande, l’Egypte, la Guinée et, le Tadjikistan. Ensemble. Les BRICS pèsent 45 % de la population de la planète, près du quart (25%) de sa richesse et selon certaines études internationales, les BRICS seraient à l’origine de plus de 50 % de la croissance économique mondiale au cours des dix dernières années. N’oublions pas d’autres pays asiatiques, le Japon 5383 de PIB pour une population de 126 millions , la Corée du Sud 1907 de PIB pour une population de 52 millions, l’Indonésie 1180 milliards de dollars de PIB pour une population de 274 millions, le Pakistan 264 milliards de dollars de PIB pour une population 221 millions, la Thaïlande un PIB de 540 milliards de dollars pour 70 millions d’habitants et le Vietnam du Nord 310 milliards de dollars de PIB pour une population de 122 millions d’habitants. Selon le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères que si la population totale des pays composant le G7 est d’un peu plus que 770 millions de personnes, que l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) et les BRICS – représentant à eux seuls de-facto la moitié de la population terrestre dont quatre puissances nucléaires (Russie, Chine, Inde, Pakistan). Toutefois les tensions géostratégiques actuelles auront un impact négatif sur l’économie mondiale où le Fonds monétaire international (FMI) a réduit le 12 juillet 2022, ses prévisions de croissance économique pour les Etats-Unis en 2022 et en 2023, pour la deuxième fois en moins d’un mois, avertissant qu’une poussée généralisée de l’inflation présente des « risques systémiques » pour ce pays et l’économie mondiale. En Europe, les fortes révisions à la baisse s’expliquent par les retombées de la guerre en Ukraine et le resserrement de la politique monétaire, où

l’inflation mondiale a été revue à la hausse du fait de l’augmentation des prix des denrées alimentaires et de l’énergie.

Elle devrait atteindre 6,6 % dans les pays avancés et 9,5 % dans les pays émergents et les pays en développement en 2022, soit une révision à la hausse de 0,9 et 0,8 point de pourcentage. Les dernières données de l’agence Fitch prévoient une révision à la baisse des prévisions de croissance du PIB de la Chine pour 2022, à 4,3 % contre 4,8 %. Sauf changement de tendance, nous devrions assister au poids croissant entre 2022/2030 des BRICS qui aura pour conséquence un profond changement du système économique et politique mondial. Pour l’instant, selon les données internationales, en 2021, Europe/USA pour une population de moins d’un milliard d’habitants accapare 40% du PIB mondial. L’Europe bien que déclinante, excepté l’Allemagne, reste une grande puissance économique avec une population de 440 millions d’habitants non inclus la Grand Bretagne avec un PIB de 14 476 milliards Europe de 2021. En incluant la Grande- Bretagne qui a un PIB de 2695 pour une population de 69 millions d’habitants, nous aurons un total de 17 171 milliards de dollars et un PIB, les Etats Unis d’Amérique ayant un PIB selon les prévisions pour 2022 de 24 793 milliards de dollars pour 332 millions d’habitants, (voir Pr A. Mebtoul –  American Herald Tribune USA en anglais novembre 2018, face aux enjeux géostratégiques mondiaux, l’Algérie acteur majeur de la stabilité de la région méditerranéenne et africaine, et magazine Futuribles paris France juillet 2022, Guerre en Ukraine : quels scénarios à l’horizon 2025, collectif sous la direction de Marie Ségur).

En conclusion, l’Algérie pays pivot au niveau de l’Afrique a demandé son adhésion pour intégrer les BRICS à la fois pour favoriser son développement sans effets de domination, pouvant quadrupler son PIB fin 2030 estimé seulement à 180 milliards de dollars fin 2022 contre 160 en 2021, ayant eu un taux de croissance appréciable de 4,7% en 2021 encore que ses échanges commerciaux sont à plus de 50% de l’Europe et à 80% si l’on inclut les autres membres de l’OCDE et la Turquie et peser plus dans les relations internationales, notamment dans ses relations avec l’Europe (voir notre interview à RFI Paris 08/11/2022) étant considéré comme un pays clef pour la pénétration de l’Afrique. Ses exportations sont dominées avec les dérivées inclus dans la rubrique hors hydrocarbures d’ environ 98% provenant des hydrocarbures brut et semi brut.

Cette adhésion pourrait permettre l’équilibrage de sa balance commerciale avec bon nombre de pays du BRICS pouvant bénéficier de financement et de technologies notamment avec la Chine où selon les statistiques douanières algériennes de 2010 à fin 2020, les exportations de la Chine à destination de l’Algérie ont totalisé environ 76 milliards de dollars étant le principal fournisseur de l’Algérie avec une moyenne annuelle depuis 2013 de 8 milliards de dollars d’exportations vers l’Algérie alors que les exportations de l’Algérie vers la Chine, formées essentiellement d’hydrocarbures s’établissent à environ 15 milliards de dollars, soit un déficit entre 2010/2020 en défaveur de l’Algérie de 61 milliards de dollars, et ce déficit concerne également l’Europe, et la Russie, avec une tendance qui n’ a pas sensiblement changé entre 2021/2022. Cependant, pour pouvoir être un acteur majeur au sein du BRICS ,ayant toutes les potentialités, elle doit avoir une économie diversifiée, impliquant de profondes réformes en s’adaptant aux évolutions géostratégiques, par une nouvelle gouvernance et la maîtrise des nouvelles technologies renvoyant à la gouvernance et la valorisation du savoir sans lesquels aucun pays n’a d’avenir, où en ce monde impitoyable en plein bouleversement, devant reconnaître que dans les relations internationales n’existent pas de sentiments et de fraternité mais que des intérêts.

A. M.