Théâtre  de Bejaia : Le cri des « trois veuves » de la tunisienne WafaTaboubi retentit

0
1392

« Les trois veuves » de la metteure en scène  tunisienne, Wafa Taboubi, donné en représentation lundi soir au festival  international du théâtre de Bejaia, a retenti à la fois comme un cri de  détresse humain face aux dérives générées par les mutations du printemps  Tunisien mais aussi un message subliminale et d’espoir pour une  transcendance nationale.

Focalisant particulièrement sur les malheurs et la détresse des femmes,  Taboubi, y livre sans parabole, les inquiétudes sur l’état de son pays, ne  manquant pas d’appeler , toutefois, à un sursaut patriotique salvateur,  notamment de la part de ses pairs féminines pour un rôle plus prégnant dans  la société, sa devise étant « Des femmes heureuses ne peuvent générer qu’un  pays heureux ». Et pour en convaincre, elle fait de ses « trois veuves » un exemple à  méditer. Malgré leur malheur et leur détresse, nourris par la perte d’un  être cher, elles ont su et pu trouver la force de se surpasser, de sourire  aussi et de se mobiliser pour des actions d’enjeu sociétal. Inspirée de la pièce « la jeune fille et la mort » d’Ariel Dorfmans, et  traitant des contextes de la chute des dictatures en Amérique latine,  notamment en Argentine, l’histoire met en lumière, la rencontre de trois  femmes, réunies par le destin après la disparition de leur être cher.  L’une est affligée par la disparition de son mari, l’autre par celui de  son père, et la troisième, en quête de son frère, a priori victimes tous  trois d’un naufrage en mer. Elles n’en ont pas la certitude, le pays étant  sujet à une perte de repères furieuse. Aussi pour percer le mystère de leurs disparitions, elles se retrouvent  chaque jour sur un bout de place face à la mer, attendant que la marée dans  sa furie y dépose leur corps.  Ce n’est pas la mort qui les affecte mais l’attente et l’angoisse de ne  pas pouvoir faire leur deuil en l’absence de preuve. Aussi pour résister au  renoncement, elles passent des heures à discuter, à égrener leurs doux  souvenirs et a se recharger en courage voire à rêver d’une vie meilleure. Chacune en profite pour croquer l’état advenu du pays et les fléaux qui  l’accable, notamment la misère, l’immigration, l’oppression qui, en premier  chef, est tenue pour responsable de ce qui leur arrive. Des vies brisées et  des destins tragiques. La trame est lourde, encline le plus clair du temps à tomber dans l’excès  dramatique. Même, les notes d’humours qui l’entrecoupent à l’occasion n’en  allègent pas la charge.  Elle reste prenante pour autant du fait de la prestation magistrale de ses  acteurs, qui ont réalisé, grâce à un jeu subtile, raffiné et puissant, une  véritable performance. La pièce, rappelle-t-on a été auréolée du 1er prix  de la mise en scène aux journées cinématographique de Carthage en  2017.

Benadel M