Le marché de l’automobile en Algérie: Révolte des concessionnaires et inquiétudes des citoyens

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Le gouvernement algérien vient de procéder à l’ouverture des contingents qualitatifs pour l’importation des produits et des marchandises au titre des licences d’importation pour l’année 2017 uniquement pour les équipements électroménagers, les téléphones mobiles et les cosmétiques, mais à la grande surprise pas pour les véhicules, alors que nombre de concessionnaires d’automobile après une longue attente envisagent de libérer la majorité de leur personnel faute de visibilité.

Certes, l’importation des véhicules a fait l’objet de plusieurs rencontres au niveau du ministère du Commerce et du ministère de l’Industrie en vue d’évaluer les besoins du parc national d’automobile et d’adapter les quantités à importer en tenant compte de la disponibilité de la devise très affectée par la chute des revenues pétroliers. En théorie, l’idée d’imposer aux concessionnaires de procéder dans un délai de 3 ans au plus tard à la création d’une activité industrielle en Algérie pour pouvoir bénéficier d’un quota annuel d’importation est fort intéressante; alors, qu’en réalité, elle rencontre des problèmes multiples liés au foncier industriel et l’absence d’une main-d’œuvre qualifiée. Les nouvelles usines de montage des véhicules notamment touristiques dans les régions de l’Ouest du pays ont en principe atteint l’âgé de la maturité à Tiaret, Relizane et Tellilat. Malheureusement, rien n’est disponible sur le marché sans souligner la non-maîtrise des coûts alors que ces usines jouissent de beaucoup d’avantages pour l’accès au foncier, les avantages fiscaux pour les produits importés dans le but d’encourager les citoyens «A CONSOMMER LE PRODUIT ALGERIEN»

Selon les prévisions de cette année, le marché automobile algérien, le deuxième d’Afrique, est régulé par l’Etat et seulement 83 000 véhicules pourront être importés

Aujourd’hui, les concessionnaires automobiles savent enfin à quelle sauce ils vont manger. Avec quelques mois de retard, le ministère du Commerce a annoncé, dimanche 8 mai, que 40 concessionnaires sur 80 ayant fait la demande pour bénéficier d’un quota d’importations. Depuis le début de l’année, les distributeurs automobiles sont soumis comme ceux de ciment et de rond à béton, à des licences d’importations assorties de quotas.

Mais faute de notification officielle, les commandes étaient depuis lors restées à l’arrêt. Effectivement, le gouvernement a décidé de durcir le régime des importations pour réduire le déséquilibre des comptes extérieurs et limiter la sortie des devises. La chute des cours des hydrocarbures, dont le pays reste très dépendant, a entraîné un déficit commercial de 13,7 milliards de dollars en 2015 après un excédent de 4,3 milliards en 2014.

Le Salon de l’automobile de septembre est déjà raté

L’annonce faite récemment par Sofiane Hasnaoui, vice-président du groupe Hasnaoui, distributeur de la marque de Nissan et président de l’Association des concessionnaires automobiles algériens (AC2A) nous permet déjà d’avoir de la visibilité sur nos activités, explique. Mais compte tenu des délais de programmation industrielle incompressibles, nous ne pourrons pas reprendre nos importations avant septembre ou octobre. L’épuisement des stocks, les délais d’attente vont continuer de fragiliser nos entreprises avec à la clé, des compressions de personnels, voire des fermetures partielles ou défi- nitives». Le patron s’exprimait avant d’apprendre qu’un quota de seulement 830 véhicules, soit vingt fois moins que son volume de ventes habituelles, lui aurait été accordé, comme il l’a indiqué. Le représentant de Hyundai Motor Algérie, filiale du groupe Cevital, se serait vu attribuer un quota qualifié «ridicule» de 3140 unités, Sovac (groupe Volkswagen) de 11 000, Toyota de 8 500 et Renault, leader du marché, de 15 000, selon certaines sources. Le ministère du Commerce a d’abord annoncé que 152 000 voitures (tourisme et utilitaire), pour un montant maximal d’un milliard de dollars, pourraient être importées cette année. Le lendemain, il a fait passer ce chiffre à 83 000 unités, afin de «rationaliser» le marché et de ne plus importer «de véhicules pour les stocker».

«Préparer avec justesse l’année 2017»

Le coût des importations avait atteint 3,1 milliards de dollars en 2015, pour 265 523 véhicules et 5,7 milliards de dollars en 2014, pour 417 913 véhicules, loin du record de 560 000 unités de 2012. La facture a déjà reculé de 58 % durant les deux premiers mois de l’année et de 63 % en volume. «Le montant annoncé d’un milliard de dollars est, selon Sofiane Hasnaoui «très faible et ne pourra répondre à la demande réelle du marché. Même si une bulle d’oxygène a été donnée, le problème de fond reste entier». S’il dit comprendre les priorités du gouvernement pour rétablir les équilibres financiers, il espère que les concessionnaires pourront échanger avec le ministère du Commerce pour «préparer avec justesse l’année 2017». Si le gouvernement prend de telles mesures, après avoir publié en mars 2015 un nouveau cahier des charges sur l’activité de concessionnaires, c’est aussi afin de stimuler la production de véhicules en Algérie. Seule la marque Renault, dont l’usine d’assemblage a été inaugurée en novembre 2014 dans la région d’Oran, peut en profiter. Durant le premier trimestre, elle a atteint une part de marché de 31,9 % (+16,1 points) grâce au succès de son modèle local, la Symbol. Ce véhicule est aussi le seul à béné- ficier du retour depuis le début de l’année du crédit à la consommation, suspendu en 2009, et qui ne concerne plus que les produits réalisés en Algérie. Avec 18 600 unités en 2015, les ventes de la Symbol permettront à Renault de sauver les meubles et de rester leader, mais pas de combler les pertes liées aux quotas. Alors que 5,5 millions de voitures environ circuleraient dans le pays, plusieurs concessionnaires ont annoncé vouloir continuer à équiper les ménages algériens en investissant dans des usines. C’est le cas de la filiale du groupe Cevital dédiée à l’automobile, qui table sur une unité de 100 000 véhicules (Hyundai, Fiat), du groupe Hasnaoui avec Nissan (25 000 véhicules) ou encore de Sovac avec Volkswagen (10 000 unités). Quant à la signature de l’accord d’implantation de l’usine PSA Peugeot Citroën, qui devait avoir lieu en avril, à l’occasion de la visite du premier ministre français à Alger, elle a été reportée à une date ultérieure.