La Journée de l’énergie, organisée annuellement par l’Ecole nationale polytechnique d’Alger (ENP), consacrera sa 23ème édition à «la résilience de Sonatrach et les défis du futur» dans les domaines de l’énergie, de l’environnement et des économies d’énergie.
Organisée habituellement le 16 avril de chaque année à l’occasion de Youm el ilm pour donner un contenu réel à la dimension du savoir, la Journée de l’énergie de l’année 2019 a été exceptionnellement avancée au 18 décembre en cours afin qu’elle coïncide avec le 55ème anniversaire de la création de Sonatrach, explique à l’APS le professeur émérite Chems Eddine Chitour. Au cours de cette Journée de l’énergie, qui se tiendra, demain, au siège de Sonatrach, les élèves ingénieurs de l’ENP, encadrés par le professeur Chitour, exposeront leur vision du futur concernant l’avenir du pays dans le domaine de l’énergie, de l’environnement, de l’eau et des économies d’énergie. «Les élèves ingénieurs veulent témoigner d’abord de la résilience de Sonatrach dans des conditions parfois difficiles, et ce, par un travail gigantesque qui fait que notre compagnie nationale est toujours là et occupe une place centrale dans le développement du pays», explique cet expert en énergie. Dans ce sens, il rappelle «l’aventure pétrolière de l’Algérie qui avait démarré avec la création de Sonatrach au 31 décembre 1963». Pour lui, «en 55 ans, les acquis de Sonatrach sont indéniables». Ainsi, lors de cette rencontre, plusieurs communications seront données sur ce qui avait été réalisé dans l’amont en termes d’exploration du domaine minier, de production multiforme (gaz naturel, condensat, GPL), et dans l’aval (raffinage, pétrochimie, GNL), détaille-t-il, ajoutant que cela a été fait tout en irrigant l’Algérie d’un réseau de transport «important». Selon lui, ce sera également l’occasion de mettre l’accent sur les ambitions du groupe Sonatrach en rappelant que celui-ci a élaboré une stratégie multiforme pour atteindre plusieurs objectifs. Il s’agit d’abord d’explorer d’une façon intensive, en augmentant la densité du forage mais aussi l’important domaine minier où des opportunités réelles existent. Il est également question d’aller, ensuite, vers l’aval, en développant la pétrochimie qui sera, selon lui, «de plus en plus importante dans les prochaines années.» «Sonatrach est à la fois l’Alma mater (mer nourricière) en termes de ressources et l’un des outils de l’Algérie pour réussir sa transition énergé- tique vers le développement humain durable», souligne-t-il. Dans ce cadre, il indique que les élèves ingénieurs de l’ENP présenteront leur vision de l’Algérie de 2030, à travers leurs travaux sur les modèles énergétiques «en ne s’interdisant pas de proposer des actions complémentaires pour que Sonatrach soit aux rendez-vous des défis de 2030». Pour le Pr Chitour, Sonatrach, «de par ses compétences, son aura et ses réelles possibilités, peut aider à la matérialisation du Plan Energies Renouvelables». Ceci se fera, selon lui, par la mise en place d’une stratégie consistant, chaque fois que cela est possible, à vendre une calorie thermique (pétrole, gaz naturel) contre l’installation d’un kWh électrique d’origine renouvelable. «Nous aurons gagné triplement. On laissera un viatique aux générations futures en ne consommant pas d’électricité provenant du gaz mais du soleil. Le Sahara pourrait devenir une véritable pile électrique», selon lui. Ensuite, «nous allons respecter l’environnement et nos engagements internationaux et, enfin, nous financerons une partie du Plan énergie renouvelable avec le gaz naturel non consommé». Concernant l’ambition de Sonatrach d’optimiser les capacités gazières en parallèle du développement des énergies renouvelables et de la pétrochimie, notamment, cet expert en énergie précise que dans sa stratégie de 2030, ce groupe compte doubler la densité du forage, optimiser les gisements existants et lancer l’off shore. «En clair, augmenter la production des énergies fossiles». A ce titre, il pense que Sonatrach aura des besoins de financements importants qui seront en fonction du prix du baril. Selon ses estimations, avec un baril à 80 dollars, Sonatrach pourra investir l’équivalent de 75 milliards de dollars d’ici à 2030. En outre, la raffinerie d’Augusta permettra en 2019 de fournir de l’essence et du gasoil. Ce qui va mettre fin, selon lui, aux achats actuels du pays en ces produits, estimés à près de 2 milliards de dollars/an. «Si un baril de pétrole coûte 70 dollars, il faut savoir qu’en le distillant, il peut atteindre les 200 dollars. De plus, il ne sera pas esclave des convulsions erratiques du marché», soutient-il. Evoquant le domaine gazier, il considère que le marché international est «rude», ajoutant que «défendre les parts de marché, notamment en Europe nécessite un management de top niveau et une flexibilité. Les contrats de long terme ayant vocation à être remplacés par le marché». Aussi, de son point de vue, «la manne en gaz de schiste devrait être exploitée en faisant énormément attention aux dégâts potentiels avec la technologie de fracturation actuelle». Selon lui, seule la formation de cadres compétents, une veille technologique et une veille environnementale permettront ainsi d’exploiter ces réserves dans des conditions de sécurité: «Ce sera le challenge de 2030».
Le renouvelable devrait faire partie des contrats avec les partenaires étrangers
Par ailleurs, il observe que partout dans le monde, une mutation s’est faite du fossile vers le renouvelable: «c’est d’ailleurs la conversion à laquelle sont arrivés tous les grands groupes pétroliers internationaux qui, à côté du pétrole, développent de plus en plus les énergies renouvelables». «Le renouvelable devrait faire partie des contrats avec les partenaires étrangers sur le principe: une calorie thermique exportée devrait être adossée à une calorie électrique renouvelable mise en place à la fois en terme physique et en terme de savoirfaire, à la fois dans l’amont pétrolier et l’aval», et ce, pour la réalisation du plan ambition de 22.000 MW qui ne peut être finalisé qu’avec «l’apport déterminant» de Sonatrach. Interrogé sur la formation des ressources humaines qui constituent également un axe primordial dans la SH 2030, le Pr Chitour pense que Sonatrach devra miser sur le recyclage permanent de son capital humain. Elle devra, selon lui, mettre en place de nouveaux programmes de spécialisations, à la fois au sein des écoles supérieures et universités, et revitaliser l’Institut algérien du pétrole, en développant également les «métiers verts» que le groupe aura à intégrer dans sa stratégie de diversification vers la révolution de l’électricité renouvelable. Pour lui, «la mise en œuvre du chantier du développement des énergies renouvelables nécessite la formation de dizaines de milliers d’ingénieurs et de techniciens. Il y a là un challenge que nous pouvons relever tous ensemble. Ne perdons pas de temps!».