Tristesse capitale

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Alger est-elle vraiment une ville difficile à vivre au point d’être classée parmi les toutes dernières cités ? D’abord, il faut éviter de tomber dans ce nationalisme désuet qui consiste à croire que tout le monde nous veut du mal et regarder notre propre réalité en face. Alger -et les autres grandes villes sont saturées et ont largement dépassé leurs capacités d’accueil de la population malgré les très nombreux logements construits. Ce qui provoque donc des problèmes de circulation et aussi de bon voisinage, la promiscuité, c’est connu, génère d’interminables conflits. Des conflits qui dégénèrent vite en bagarres entre gens d’apparence respectable, ont lieu quotidiennement à propos d’une place de stationnement. Lequel stationnement très problématique est dévolu à des bandes de «parkingueurs» qui se sont approprié l’espace public. Même à pied il est difficile de circuler dans certaines avenues où les trottoirs sont squattés par les revendeurs informels ainsi que les commerçants qui y étalent leurs marchandises. Question transport, le métro et le tramway ont énormément contribué à faciliter le déplacement de la population, mais les taxis continuent d’imposer leur diktat et refusent souvent des destinations qui ne les arrangent pas. Pour ce qui est des commodités, il est extrêmement difficile de se soulager en plein centre-ville, notamment pour les femmes parce que les hommes peuvent toujours demander la clé des toilettes au patron d’un café qui la tient dans son tiroir. Du point de vue culturel, c’est carrément le désert et, hormis quelques manifestations épisodiques telles les expositions, le reste est hermétique et les hauts-lieux de la culture que furent jadis la cinémathèque et le théâtre sont fermés surtout en haute saison. Jadis, les cafés avaient chacun son identité et les étudiants, les artistes, les comédiens, les chanteurs…avaient leur lieu de rencontres, aujourd’hui transformés en grands magasins ou en estaminets où l’on boit du café «jetable». La ville, capitale africaine d’envergure, baisse rideau dès le crépuscule et le centre-ville est d’une infinie tristesse.