La révolution algérienne, a représenté une inspiration particulière pour Nelson Mandela, car, a-t-il expliqué dans ses mémoires intitulés sobrement « Le long chemin vers la liberté », elle était le « modèle le plus proche du nôtre, parce que (les moudjahidine algériens) affrontaient une importante communauté de colons blancs qui régnait sur la majorité indigène ».
Lors de sa visite au Maroc en 1961, Nelson Mandela passa « plusieurs jours » avec le représentant du Gouvernement provisoire de la Révolution Algérienne, GPRA, le docteur Chawki Mostefai, qui l’a initié aux différentes étapes de la Révolution algérienne. C’est, près de la frontière algérienne ouest , que l’émissaire de l’ANC prend contact avec les éléments de l’Armée de Libération Nationale (ALN)en guerre pour l’indépendance nationale que Nelson Mandela rencontre un membre du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), le docteur Chawki Mostefaï. Cet intellectuel lui fait comprendre les similitudes entre la révolution algérienne et la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud. Stratégie de guérilla et Révolution populaire étaient deux facteurs déterminants qui ont fait basculer la balance en faveur de la Révolution algérienne, qui luttait entre autre, contre un colonialisme de peuplement. Pour Mandela, le parallèle était plus qu’évident ! «Mandela était convaincu que seule l’Algérie avait démontré sa capacité à mener avec succès une guerre de libération en Afrique contre une armée coloniale puissante, membre de l’OTAN et alliée objectif du régime d’apartheid. A bien des égards, disait-il, les conditions de domination coloniale et de l’apartheid étaient identiques», précise l’ambassadeur Djoudi. Mandela a été ensuite convié à Oujda ou il a rendu visite à une unité combattante de l’Armée de libération nationale (ALN) sur le front. « A un moment, se souvenait-il, j’ai pris une paire de jumelles et j’ai vu des soldats français de l’autre coté de la frontière. J’avoue que j’ai pensé voir des uniformes des forces de défense sud-africaines ». Deux jours plus tard, Mandela a été invité à assister à un défilé militaire en l’honneur des chefs historique , à leur libération de prison. En tête du cortège défilaient « des vétérans fiers et aguerris » portant « des armes qu’ils avaient utilisées au début de l’insurrection : des sabres, de vieux fusils à pierre, des haches et des lances ». Ils étaient suivis de « combattants plus jeunes et tout aussi fiers » dotés d’armes modernes. « C’était une armée de guérilla composée de moudjahidine qui ont gagné leur galons dans le feu des batailles et qui s’intéressaient plus à la guerre et à la tactique qu’aux uniformes et aux défilés », notait-il. « Je savais que nos propres forces ressembleraient plus aux soldats de Oujda et j’espérais seulement qu’ils combattraient aussi vaillamment. A l’arrière, il y avait une fanfare militaire, dirigée par un Homme). Il était grand, bien bâti et sûr de lui, il était aussi noir que la nuit. Il lançait une canne de tambour-major et quand nous l’avons vu (la délégation sud-africaine,) tout notre groupe s’est levé et a applaudi », se remémorait-il. « J’ai vu que les autres autour de moi nous regardaient et je me suis rendu compte que nous ne l’applaudissions que parce qu’il était noir…. A nouveau, le pouvoir du nationalisme et de l’ethnicité m’a frappé. Nous avions réagi immédiatement, car nous avions l’impression de voir un frère africain. Après l’indépendance , la relation qui lie «Madiba» au pays du Million et demi de Martyrs est intime, presque fusionnelle. Et pour cause ! Jamais, le père de la lutte anti-apartheid en Afrique du sud ne reniera ses amitiés algériennes, encore moins sa reconnaissance à ce pays frappé de plein fouet par l’hydre terroriste au moment, où lui, Mandela dirigeait la transition de sa patrie de l’apartheid vers la «nation arc-en-ciel». Ce n’est pas un hasard, si Nelson Mandela, libéré de prison en février 1990, après avoir passé 27 ans dans les geôles de l’apartheid, ai consacré sa première visite à l’étranger pour l’Algérie. Ainsi, c’est en mai 1990, que Mandela foule pour la seconde fois le sol algérien, L’ancien ambassadeur d’Algérie en Afrique du Sud, Nourredine Djoudi, qui fut l’interprète de Mandela en 1962, se souvient de cette visite historique. «Lors de sa première visite, après sa libération et avant son élection, sa première demande en arrivant à l’aéroport Houari Boumediene a été formulée ainsi: ‘Où sont les officiers qui m’ont formé ? Accueilli triomphalement à la Coupole du complexe du 5 juillet par le secrétaire général du FLN feu Abdelhamid Mehri, le futur président de l’Afrique du Sud post-apartheid, a eu des mots qui témoignent d’une gratitude éternelle en direction de l’Algérie. «Je suis le premier sud-africain à avoir été entraîné aux armes en Algérie. Quand je suis rentré dans mon pays pour affronter l’apartheid, je me suis senti plus fort»,». Une sensation immortalisée par Madiba au Sanctuaire des Martyrs à Alger, qui a posé le poing levé vers le ciel en signe de victoire dans la lutte commune des deux peuples pour leur liberté, contre le colonialisme et contre l’apartheid. Dans ses mémoires, Mandela se rappelle des conseils du docteur Mostefaï. «Il nous a conseillé de ne pas négliger le côté politique de la guerre tout en organisant les forces militaires. L’opinion internationale valant parfois plus qu’une escadrille d’avions de combat à réaction». Une stratégie qui a réussie en Algérie.Les liens entre Alger et Pretoria ont acquis cette dimension stratégique sous l’impulsion d’Abdelaziz Bouteflika et du successeur de Mandela, Thabo Mbeki. Les deux présidents vont être au cœur de la nouvelle dynamique panafricaine, le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad). L’axe Alger-Pretoria sera un axe majeur qui permettra au continent noir de porter sa voix en direction des grands de ce monde. Un axe qui doit beaucoup au legs du père spirituel de la renaissance africaine, le sud-africain, Madiba Nelson Mandela.
Ahsene Saaid