La peau des fruits et légumes est bien souvent consciencieusement épluchée par nombre de cuisiniers, une façon de limiter l’exposition à des résidus de pesticides. La peau des fruits et légumes regorge de micronutriments (vitamines, minéraux, antioxydants…), mais pour éviter le piège des pesticides, certains préfèrent éplucher tout ceux qui s’apprêtent à être consommés. Une question se pose-t-on : cette habitude permet-elle de profiter pleinement de leur potentiel nutritionnel tout en se débarrassant de toute contamination possible ? Il s’avère que ce geste n’est pas toujours indispensable comme le révèle Kirsty Hunter, Maître de conférences en nutrition au sein de la Nottingham Trent University dans un article publié dans la revue The Conversation. Celle-ci recommande de ne pas se priver de nutriments essentiels pour la santé en épluchant à tout va : gare au gâchis ! A titre d’exemple, des quantités nutritionnellement importantes de vitamines, telles que la vitamine C et la riboflavine, et de minéraux tels que le fer et le zinc, se trouvent dans la peau de sept légumes ou plantes : betterave, moutarde des champs, carotte sauvage, patate douce, radis, gingembre et les pommes de terre. « En outre, de nombreuses épluchures sont riches en composés phytochimiques biologiquement actifs, tels que les flavonoïdes et les polyphénols, qui ont des propriétés antioxydantes et antimicrobiennes.», indique-t-elle. Ce constat est logique car ces substances sont formées par la plante afin de se protéger des agressions extérieures : elles doivent donc se situer dans l’enveloppe ou la peau des fruits. S’ajoute à cela le fait que la peau des fruits et légume contient également des fibres insolubles qui facilitent la digestion, bien qu’irritantes si consommées en excès. Or, la revue scientifique Vidal estime non seulement que l’épluchage élimine une grande partie des nutriments, surtout lorsque les épluchures sont épaisses (faites au couteau), mais surtout que les pertes peuvent atteindre 25%. Certes, certains fruits et légumes doivent être épluchés car les parties extérieures ne sont pas comestibles, n’ont pas bon goût ou sont difficiles à nettoyer comme la banane, l’orange, le melon, l’ananas, la mangue, l’avocat, l’oignon et l’ail. De plus, ce geste peut être une partie intégrante d’une recette, par exemple lors de la préparation d’une purée de pommes de terre. Mais de nombreuses épluchures, comme celles de la pomme de terre, de la betterave, de la carotte, du kiwi et du concombre sont comestibles contrairement à une idée reçue bien répandue. Le but premier de l’épluchage est d’éviter l’ingestion de résidus de pesticides présents à la surface des végétaux. Mais comme l’explique Kirsty Hunter «les résidus de pesticides sont certainement retenus à la surface ou juste sous la surface, bien que cela varie, selon les espèces végétales. Mais la plupart de ces résidus peuvent être éliminés par lavage. En effet, la Food and Drug Administration des États-Unis (FDA) recommande aux gens de laver les produits à l’eau et de les frotter avec une brosse dure pour éliminer les pesticides, la saleté et les produits chimiques.» Même constat de la part de la revue Vidal qui préconise de nettoyer soigneusement tous les fruits et légumes à l’eau potable courante (sans savon ni eau de javel), et ce, même en l’absence de traces de terre. Les experts le recommandent quant à eux même pour les fruits et légumes dont on ne mange pas la peau ou l’écorce, car la chair peut être contaminée lors de la découpe. Prudence cependant à ne pas les laisser tremper trop longtemps, au risque de perdre une partie de leurs sels minéraux et de leurs vitamines qui se dissoudrait dans l’eau de trempage. Toujours est-il que si le lien entre l’ingestion de résidus de pesticides et d’éventuelles maladies n’est pas établi de façon unanime, les consommateurs s’interrogent à juste titre. Des listes de teneur en pesticides pour les fruits et légumes sont disponibles dans certains pays, par exemple, le Pesticide Action Network en produit une pour le Royaume-Uni. Une aide bienvenue pour décider quels fruits et légumes peler et quelles peaux peuvent être mangées.
Mieux vaut pratiquer un épluchage fin et parcimonieux
Mais tous les résidus de pesticides ne sont pas toujours totalement éliminés par le lavage, c’est pourquoi personnes qui s’inquiètent de leur exposition aux pesticides peuvent tout de même procéder à un épluchage. Il existe heureusement quelques conseils pour préserver la richesse nutritionnelle des fruits et des légumes frais, à commencer par le fait de les consommer les plus frais possible et d’utiliser un économe qui permet d’obtenir des épluchures fines. La revue Vidal souligne également l’importance de ne pas éplucher les légumes primeurs (carottes, navets, pommes de terre), mais simplement de les brosser à l’aide d’une brosse. Il est par ailleurs, possible d’éplucher les courgettes, les aubergines et les concombres en laissant une partie de leur peau (on obtient ainsi des rayures décoratives). A noter qu’un guide publié par la CLCV donne une liste non-exhaustive de fruits et légumes qui n’ont pas besoin d’être épluchés avant consommation et qu’au regard de celle-ci, il convient de consommer la peau, après un lavage soigneux chaque fois que possible, des pommes, poires, raisins, radis ou tomates, parmi d’autres. Un dernier élément à prendre en compte dans le choix final tient au fait que selon les estimations de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), les aliments non consommés, y compris les épluchures, génèrent 8 à 10% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. En effet, les aliments qui pourrissent dans les décharges libèrent du méthane, l’un des gaz à effet de serre les plus puissants.