Algérie 2024/2030: Les huit axes directeurs des réformes politiques et économiques

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Selon le dernier rapport du FMI, un cadre financier relativement stabilisé, les réserves de change ayant été clôturées fin décembre 2023 à 73 milliards de dollars, et 83 avec les sticks d’or, un taux de croissance de plus de 4% en 2023, et 3,8% en 2024, il devient urgent de relancer la machine économique autour de huit axes directeurs. Cela suppose une vision stratégique au sein des filières mondiales, internationalisées et de définir avec précision la mise en œuvre de projets : délais, coûts, les moyens humains et les modes de financement en devises et en dinars en incluant la protection de l’environnement car le réchauffement climatique impactera l’Algérie.

Le premier axe est de mettre en œuvre une politique s’orientant vers un véritable processus démocratique, se fondant sur une société plurielle plus participative. Pour cela, il s’agit de promouvoir la femme au sein de la société signe de sa vitalité et de réorganiser le système partisan, syndical et associatif qui ont de moins en moins d’impacts pour la mobilisation de la population, de réorganiser le champ de l’information et de la communication pour plus de concurrence car l’information en ce XXIe siècle n’est plus le quatrième pouvoir mais le cœur du pouvoir et donc une communication institutionnelle efficiente, pour éviter les rumeurs dévastatrices. Force est de reconnaître qu’en ce mois d’avril 2024 deux institutions assurent la stabilité du pays. Sur le plan économique Sonatrach c’est l’Algérie et l’Algérie c’est Sonatrach, et sur le plan sécuritaire l’ANP/forces de sécurité. Il appartient à la société de s’organiser en fonction d’affinités politiques et économiques, avec des propositions opérationnelles réalistes, pour être des interlocuteurs crédibles auprès de la population. Le second axe est la sécurité, la politique étrangère et de la politique défense/ sécurité intérieure /extérieure rentre dans ce cadre et la paix sociale ce qui implique une nouvelle approche des relations internationales, où les ambassades, doivent servir d’appui aux actions internes et au niveau interne la mise en place d’un minimum de Smig social où les différentes sensibilités puissent dialoguer dans un cadre organisé se fondant sur la tolérance et le droit à la différence. Le troisième axe est la refonte des institutions centrales et locales, décentralisation réelle et non déconcentration, liée à la bonne gouvernance, dont le pilier devra reposer sur la lutte contre la bureaucratisation de la société qui enfante la sphère informelle représentant plus de 50% de la superficie économique hors hydrocarbures et donc la corruption dont l’éradication suppose des mécanismes de régulation transparents pour redonner confiance. La réforme de la justice par son indépendance, par l’application et l’adaptation du droit tant par rapport aux mutations internes que du droit international crédibilise l’action de l’Etat. Le quatrième axe est d’améliorer le fonctionnement des marchés et des initiatives par l’amélioration du climat des affaires, une politique incitative d’encadrement macroéconomique. Le taux de croissance ayant une signification limitée, devant être complété par l’indice du développement humain comme le recommande le PNUD dans la prise en compte de la santé et de l’éducation. C’est que le marché est dominé par la sphère informelle qui contrôle les circuits de distributions que l’on ne combat pas par des mesures administratives autoritaires mais au moyen de mécanismes de régulation transparents.  La Banque d’Algérie dans sa note de conjoncture de février 2024 indique que la circulation fiduciaire hors banques représente 33,35% de la masse monétaire globale en Algérie, soit quelque 7395 milliards de dinars à fin septembre 2022, contre 6712 milliards de dinars à fin décembre 2021, au cours de 137 dinars un dollar 53,98 milliards de dollars, reflétant un état de sous-bancarisation où des entrepreneurs, gros commerçants, ménages et autres intermédiaires préfèrent le cash pour moins de traçabilité et surtout pour mieux échapper au fisc alors que dans les pays développés les plus bancarisés, la part de la circulation fiduciaire ne dépasse guère les seuils de 4 à 5% de la masse monétaire globale. Dans ce cadre. il s’agit de revoir la politique industrielle par une nouvelle la politique de la gestion des capitaux marchands de l’Etat s’adaptant aux nouvelles mutations technologique, l’intelligence artificielle devant bouleverser toute la configuration économique actuelle, ayant des incidences géostratégiques et sécuritaires Autres axes, la révision du foncier industriel une nouvelle politique agricole, la facture alimentaire dépassant actuellement les 10 milliards de dollars, les exportations hors hydrocarbures dont 67% les dérivés d’hydrocarbures qui sont passées de 7 milliards de dollars en 2022 à 5 milliards de dollars doivent être dynamisées, par de nouvelles filières évitant ces assainissements répétées des entreprises publiques qui selon les données du premier ministère (source APS) ont coûté au Trésor public durant ces trente dernières années plus de 250 milliards de dollars à fin 2020, une nouvelle politique de gestion de l’eau, en accélérant les unités de dessalement de l’eau de mer, une nouvelle politique du tourisme devant distinguer le tourisme destiné aux couches populaires, aux couches moyennes et celui permettant la venue d’étrangers. Le cinquième axe est la réforme du système financier, lieu de distribution de la rente, les banques publiques représentant plus de 85% des crédits octroyés avec parfois des crédits de complaisance de plusieurs dizaines de milliards de dinars à certains opérateurs rentiers, enjeu énorme de pouvoir (banques, douane, fiscalité, domaine renvoyant à l’épineux problème du foncier) avec un tableau de la valeur relié aux réseaux internationaux pour détecter les surfacturations, comme je l’ai préconisé entre 1980 et1983 lorsque je dirigeais le département des études économiques à la Cour des comptes, avec l’accélération de sa numérisation afin qu’il s’oriente dans la dynamisation de projets créateurs de valeur ajoutée et pas seulement comme par le passé en favorisant l’importation, ainsi qu’une nouvelle politique des subventions ciblées pour les plus défavorisés, tant inter-socio-socioprofessionnelle qu’inter-régionale pour garantir la cohésion sociale, renvoyant à une nouvelle politique salariale privilégiant les emplois productifs, la distribution de salaires et des dépenses improductives sans contreparties accélérant le déficit budgétaire nécessitant pour l’Etat de rationaliser la dépense publique (pour la loi de 2024, le budget de l’Etat prévoit des dépenses à 15.275,28 milliards DA en 2024 et des recettes de 9.105,3 milliards de DA, soit un le déficit budgétaire d’environ 46 milliards de dollar.)  Le sixième axe est de mettre une politique clairement définie dans le temps de la transition énergétique combinant les énergies transitionnelles, l’énergie solaire, l’hydrogène bleu, vert et blanc et une nouvelle politique de l’habitat utilisant les nouvelles méthodes de constructions économisant la consommation d’énergie (efficacité énergétique qui touche tous els secteurs ), ainsi que de la réforme de Sonatrach lieu de production de la rente procurant avec les dérivés 97/98% des ressources en devises avec les dérivés comptabilisées dans la rubrique hors hydrocarbures. Le septième axe est la restructuration des capitaux marchands de l’Etat, dépénaliser l’acte de gestion pour permettre aux managers de prendre des risques, ne pouvant continuer à perfuser des entreprises non compétitives au nom d’une paix sociale fictive, toute entreprise devant être rentable en termes de coût/qualité, de garantir un minimum de sécurité alimentaire, n’existant dans aucun pays une sécurité alimentaire à 100% donc une nouvelle politique agricole axée sur la mise en valeur des terres, évitant cette urbanisation accélérée pour un espace équilibré et solidaire, des Hauts-Plateaux du Sud. Le huitième axe directeur, la mère des réformes, et comme synthèse concernant tous les secteurs est de favoriser le primat de la connaissance par l’adaptation du système éducatif, centre d’élaboration et de diffusion de la culture et de l’idéologie de la résistance au changement et à la modernisation du pays du primaire au supérieur y compris la formation professionnelle. Il s’agit de favoriser l’apport de nos émigrés à l’étranger qui peuvent contribuer au développement national ayant de solides connaissances dans le savoir-faire. En conclusion, il y a lieu d’éviter l’illusion monétaire car la monnaie est avant tout un rapport social, traduisant le rapport confiance Etat/citoyens, étant un signe permettant les échanges ne créant pas de richesses. La richesse d’une Nation repose sur la bonne gouvernance et la valorisation du savoir. Une cotation administrative qui n’est pas souhaitable, en baisse du dinar, aurait, certes un effet à court terme de baisse des prix des produits importés mais à terme, en cas de non-accroissement proportionnel à cette baisse de la production interne un accroissement du déficit budgétaire, à moyen terme du taux d’inflation avec l’amplification de la sphère informelle et l’ accroissement de l’écart entre le taux officiel et celui du marché parallèle jouant comme redistributeur de revenus en faveur des couches spéculatives et au détriment de la majorité de la population notamment les revenus fixes. Seule une croissance forte, 8/9% par an, 350 000/400 000 demandeurs d’emplois par an qui s’ajoutent au taux de chômage actuel, au moyen d’une planification stratégique, en ce monde turbulent et instable, permettra de faire face au chômage et à l’inflation 9/10% entre janvier 2023 de janvier 2024 et c’est une loi économique universelle qui s’applique à tous les pays. Si les projets structurants sont mis en œuvre en juin 2024 pour les PMI/PME, la rentabilité ne se fera pas avant trois années et pour les grands projets pas avant 7/8 ans. Aussi, l’objectif stratégique est de saisir les tendances réelles de la société algérienne face tant aux mutations internes que mondiales, d’analyser avec lucidité au niveau interne, les relations dialectiques réformes/démocratie/justice sociale/économie de marché concurrentielle dans le cadre des valeurs internationales, loin de tout monopole public ou privé et les segments de la production de la rente (Sonatrach) et celui de sa redistribution (système financier) qui bouleversent des intérêts par une lutte contre le cancer de la bureaucratie et son appendice la corruption. La population algérienne exige un sacrifice partagé. La structure des sociétés modernes s’étant bâtie d’abord sur des valeurs et une morale qui a permis la création de richesses permanentes. Comme nous l’ont enseigné les grands penseurs dont le grand sociologue Ibn Khaldoun qui, dans son cycle des civilisations, lorsque l’immoralité gangrène la Cité dans son ensemble et dévalorise la vertu du travail, c’est la décadence de toute la société.

Abderrahmane Mebtoul,

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