Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, est attendu aujourd’hui à Alger pour une visite d’amitié et de travail. Il sera accompagné d’une importante délégation ministérielle relevant de plusieurs secteurs, ainsi que des hommes d’affaires. Le président turc aura l’occasion d’aborder avec le président de la République, Abdelmadjid Tebboune le volet de la coopération bilatérale et les questions régionales et internationales d’intérêt commun.
Cette visite qui fait suite à l’invitation formulée par le président de la République lors de l’audience qu’il a accordée au ministre turc des Affaires étrangères, intervient dans un contexte régional assez tendu et où la Turquie n’est pas étrangère. Pour rappel, le ministre des Affaires étrangères turc, Mevlut Cavusoglu, avait effectué une visite de travail en début du mois en cours et au cours de laquelle il avait salué le rôle important de l’Algérie dans la région et ses efforts pour la résolution par les voies pacifiques de la crise en Libye. S’exprimant lors d’une conférence de presse tenue avec le ministre des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, Cavusoglu avait indiqué que «l’Algérie a un rôle important dans la région», saluant les efforts qu’elle fournit pour «l’instauration de la paix en Libye», en privilégiant les solutions pacifiques. Affirmant que le «rétablissement de la sécurité passe par l’élimination des groupes terroristes», le chef de la diplomatie turque a souligné que les «conflits» en Libye ou dans un tout autre pays, avaient des «répercussions négatives sur l’Algérie». Après avoir mis en relief la concordance de vues entre la Turquie et l’Algérie concernant les questions régionales, Cavusoglu a assuré que son pays «ne croit pas en la solution militaire» et demeure attachée à la coordination bilatérale en vue de parvenir à une solution pacifique en Libye. Il a réitéré, dans le même cadre, l’attachement de son pays à l’intégrité territoriale de la Syrie. Au volet économique, le ministre des AE turc avait salué les réformes économiques entreprises par l’Algérie, lesquelles, a-t-il dit, «seront certainement bénéfiques pour les deux pays», rappelant, à l’occasion, que son pays est l’un des plus grands investisseurs en Algérie, un partenariat qui sera diversifié et conforté dans tous les domaines, à la faveur de «la relance de la Commission conjointe, les jours à venir». Le ministre turc a exprimé, à l’occasion, sa gratitude «pour les facilitations et l’appui que reçoivent les investisseurs turcs de la part du Gouvernement et du peuple algériens», réaffirmant «la détermination de son pays à poursuivre l’encouragement des sociétés turques à investir en Algérie. Quant à la décision des autorités turques relative à la réduction du nombre de visas accordés aux Algériens, Cavusoglu a estimé qu’il s’agissait d’«une mauvaise compréhension des procédures» et que «certaines sociétés ont détourné ce sujet», rassurant que les autorités de son pays «continueront à délivrer des visas d’entrée». Il a fait état, dans ce sens, d’une prochaine création d’«un mécanisme ou d’une commission consulaire conjointe» entre les deux pays, en vue de débattre de la question et de parvenir à des «solutions satisfaisantes», ainsi que de l’annonce prochaine de quelques «facilitations en termes d’octroi de visas au profit de certains catégories d’âge», a-t-il précisé. Les deux pays ont convenu d’impulser leurs relations et de leur donner un caractère privilégié dans les différents domaines De son côté, Boukadoum avait insisté sur l’impératif élargissement des perspectives de partenariat entre l’Algérie et la Turquie, dont le volume de ses investissements s’était élevé à plus de 4 milliards de dollars US, ce qui a permis la création de 28 000 opportunités d’emploi, s’est-il réjoui avant de relever que la révision par le Gouvernement algérien de la règle 51/49, «contribuera indubitablement à la dynamisation de l’investissement étranger». À ce propos, le chef de la diplomatie algérienne a indiqué que pas moins de 300 000 touristes algériens se rendent en Turquie annuellement. Lors de la rencontre avec son homologue turc, il a été procédé à l’évaluation des relations bilatérales qui se sont confortées, a-t-il dit, à la faveur du Traité d’amitié et de coopération en 2016, en vertu duquel, les deux pays ont convenu d’impulser leurs relations et de leur donner un caractère privilégié dans les différents domaines. Les deux parties ont également, poursuit Boukadoum, procédé à un échange de vues sur les questions d’intérêt commun, à l’instar de la situation dans la région du Sahel, la cause palestinienne et les crises libyenne et syrienne, saluant au passage, le respect par la Turquie de la question de l’intégrité territoriale de la Syrie. Au sujet du dossier libyen, le Président Tebboune qui intervenait devant les participants à la Conférence de Berlin sur la Libye, avait réitéré son appel à la communauté internationale d’assumer sa responsabilité en matière de respect de la paix et de la sécurité dans ce pays, affirmant que l’Algérie refuse toute atteinte à son intégrité nationale et à la souveraineté de ses institutions. «Nous sommes appelés à arrêter une feuille de route aux contours clairs, qui soit contraignante pour les parties, visant à stabiliser la trêve, à stopper l’approvisionnement des parties en armes afin d’éloigner le spectre de la guerre de toute la région», a indiqué Tebboune, appelant à encourager les parties libyennes à s’asseoir autour de la table pour résoudre la crise par le dialogue et les voies pacifiques et éviter ainsi des dérapages aux conséquences désastreuses. Après avoir souligné que la région avait besoin d’une stabilité fondée sur la sécurité commune, il a réitéré l’attachement de l’Algérie au maintien de la région loin des ingérences étrangères, assurant que la sécurité de la Libye est le prolongement de «notre propre sécurité et le meilleur moyen de préserver notre sécurité régionale reste la coopération et l’entraide avec nos voisins pour faire face au terrorisme et à l’extrémisme». A cet égard, le président de la République a rappelé les efforts que l’Algérie n’a eu de cesse de déployer pour inciter les parties libyennes à adhérer au processus de dialogue, parrainé par les Nations unies et accompagné par l’Union africaine en vue de former un gouvernement d’entente nationale apte à gérer la transition et la réédification des institutions de l’Etat libyen pour relever les défis qui se posent au peuple libyen. L’Algérie a participé activement à divers niveaux à tous les efforts en faveur d’une solution politique à la crise libyenne, a-t-il encore soutenu, citant, dans ce cadre, son initiative, en mai 2014, pour la création du mécanisme des pays voisins de la Libye, qui a tenu sa 1e réunion à Alger, ainsi que les différentes cycles de dialogue qu’elle a abritées depuis mars 2015 entre les dirigeants des partis politiques libyens dans le cadre des processus de dialogue, supervisés par l’ONU. Mettant en avant la position équidistante de l’Algérie dans le conflit, il a évoqué ses efforts pour le rapprochement des vues et l’établissement de passerelles de communication avec tous les acteurs en plus de ses appels incessants à faire prévaloir la sagesse et à favoriser le processus pacifique pour le règlement de la crise, option qui demeure la seule à même de garantir l’unité du peuple libyen et le respect de sa souveraineté, loin de toute ingérence étrangère, a-t-il affirmé. Pour ainsi dire, Tebboune veut redynamiser le rôle de la diplomatie algérienne parallèlement aux efforts que les forces de l’ANP sont en train de déployer pour sécuriser nos frontières. Ceci d’autant que l’Algérie est devenue un exemple à suivre dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et en matière de maitrise totale de la sécurisation de ses frontières contre tous les dangers et toutes menaces d’où qu’elles viennent et ce, conformément à la stratégie globale et intégrée adoptée.
Sabri Boukadoum avait indiqué, au sujet de la crise en Libye, que l’action militaire ne pourra guère aboutir à la résolution de cet conflit, soulignant que «seule une solution politique négociée et acceptée par l’ensemble des protagonistes est à même de rétablir la paix dans ce pays». Il a ajouté qu’il appartenait dès lors aux Libyens d’engager dans les meilleurs délais, un processus inclusif de réconciliation nationale, comme cadre indispensable devant mettre un terme à la division et aboutir à l’objectif ultime de l’organisation d’élections transparentes sous l’égide de l’Union africaine et de l’ONU. Boukadoum avait soutenu que la tenue de ces élections, dont les résultats devraient être respectés par toutes les parties prenantes, «contribuerait à l’instauration d’un climat de confiance et à la mise en place d’institutions gouvernementales démocratiques pérennes, dont une armée nationale unifiée et seule responsable d’assurer la sécurité du pays». Il avait, par la même occasion, rappelé que «l’Algérie qui a toujours encouragé les frères libyens à s’engager sur la voie du dialogue inclusif et de l’entente nationale, est convaincue que les parties libyennes sauront faire montre de sagesse pour dépasser leurs différends et faire prévaloir les intérêts nationaux suprêmes». Il a également fait remarquer que l’Algérie avait condamné avec la plus grande force l’attaque ayant ciblé un centre d’hébergement de migrants et a appelé à «situer les responsabilités et à identifier les auteurs de ce crime abject». Il avait, en outre, relevé que la situation des migrants africains en Libye est intrinsèquement liée à la crise majeure que connaît ce pays depuis 2011, soulignant «la nécessité d’un retour sans délai au processus de dialogue inclusif entre l’ensemble des parties libyennes afin de parvenir à une solution consensuelle de ce conflit qui n’a que trop duré».
- Benslimane