Toxicomanie (Forem): «  L’évolution de la consommation de ces substances en Algérie est préoccupante » souligne  Mustapha Khiati

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La stratégie nationale de lutte contre les  drogues doit être revue, a préconisé, hier à Alger, le président de la  Fondation nationale de Promotion de la Santé et du Développement de la Recherche médicale (Forem), Mustapha Khiati, qualifiant de « préoccupante »  l’évolution de la consommation de ces substances en Algérie.

« Il faut revoir la stratégie nationale de lutte contre les drogues et de prise en charge des personnes qui s’y adonnent. La situation est  préoccupante au regard des paramètres existants », a déclaré le Pr. Khiati, au forum d’El-Moudjahid, coïncidant avec la célébration, le 26 juin, de la Journée internationale contre le trafic et l’abus de drogues. Pour établir son constat « inquiétant », le président de la Forem s’est  appuyé sur les trois paramètres que sont le nombre des saisies, des consommateurs et des arrestations liées à la consommation et au trafic de drogues, rappelant en cela les données fournies par la Direction générale de Sûreté nationale (DGSN) dans ce sens. L’hôte du forum a ainsi plaidé pour « un autre modèle » de lutte contre la  progression de la consommation des différents types de ces substances, à commencer par placer l’Office national de Lutte contre les Drogues, créé en 2002, sous la tutelle du Premier ministère et non pas de celle de la Justice, laquelle « ne peut être juge et partie », a-t-il argumenté. « Comme partout ailleurs, la lutte contre la drogue est menée par une  structure supra-ministérielle et en Algérie, la question concerne pas moins de 24 départements ministériels dont il faut coordonner les « , a-t-il explicité, déplorant, en outre, le choix « coûteux » des pouvoirs publics pour des Centres de consultations et de prise en charge des addictions, dont l’efficacité est « moindre ». Faisant savoir qu’il en existe actuellement plus d’une quarantaine  répartis à l’échelle nationale, il ajoutera que ce nombre sera appelé à évoluer à court terme, au moment où l’option des « communautés thérapeutiques » s’est avérée ailleurs « à 70 % plus efficace et moins onéreuse », a-t-il affirmé, expliquant qu’il s’agit de fermes qui encouragent les toxicomanes à des activités manuelles, tout au long de leur séjour durant lequel ils sont accompagnés par des psychologues et d’anciens  toxicomanes. De la sorte, les concernés acquirent des « savoirs-faires » et parviennent à une meilleure « réinsertion sociale ». Ainsi, le volume des saisies des différentes drogues a atteint durant les 15 dernières années 211 tonnes, dont 32 tonnes l’année écoulée, alors que celui des arrestations a été de 150.000 durant les 5 dernières années, soit une moyenne annuelle de 30.000, a-t-il détaillé, notant la « surcharge » que  cela induit pour les centres de détention. S’agissant du nombre de consommateurs, les études de la Forem menées en 2015 faisaient ressortir qu’entre 15 et 17 % des élèves du CEM ont consommé de la drogue, contre 22 à 23 % pour les lycéens et 27 % pour les universitaires, a-t-il poursuivi, faisant remarquer l’implication des filles, dés le cycle moyen. Ces données ont été « confirmées » par une étude menée en 2017 par le CENEAP  pour le compte de l’Office dédié à la lutte contre la drogue, a-t-il soutenu, faisant remarquer que l’Algérie n’est, en outre, pas à l’abri du danger des drogues dures, comme en témoigne la saisie, en 2018, de plus de 700 kg de cocaïne au port d’Oran. A ce sujet, le Pr Khiati a déploré « l’absence » d’études sur le comportement des consommateurs de ce type de drogues, sachant qu’après leur prise en charge en hospitalisation, la rechute est de « 100 % », a-t-il souligné, réitérant la nécessité de la  création d’un Observatoire des drogues. Allant dans ce sens, Mme Sabrina Dehar, psychologue et par ailleurs, vice-président de la Fondation, a plaidé pour des solutions qui « maintiennent le sevrage le plus longtemps possible », les risques de rechute étant liés au contexte familial, social et psychologique des personnes souffrant d’addictions.  

Yasmine Derbal