Le 15 avril 2024 en clôture, le Brent a été coté à 90,41 dollars (84,86 euros) et le Wit 85,69 dollars ( 80,42 euros) malgré l’attaque de l’Iran contre Israël, le marché tablant sur une désescalade plus probable qu’un embrasement de la région surtout après la décision américaine principal allié d’Israël et les recommandations de la communauté internationale d’éviter toute escalade qui risque de plonger l’économie mondiale vers une turbulence généralisée .Comme les tensions en l’Iran et Israël ne doit pas faire oublier, pour la stabilité de région, l’urgence d’un Etat palestinien.
1.- Brève historique et situation géographique de l’Iran
L’Iran compte 88,5 millions d’habitants en 2023 et la superficie est de 1648000 km 2, avec comme capitale Téhéran et les villes principales sont Mashhad, Ispahan, Tabriz, Karaj.. .L’ Iran est bordé au Nord par la Mer Caspienne, au sud-est par le golfe d’Oman et au sud par le golfe Persique. Elle partage des frontières avec le Turkménistan au nord-est, l’Afghanistan à l’est, le Pakistan au sud-est, l’Irak à l’ouest, la Turquie , l’Arménie et l’Azerbaïdjan au nord-ouest. L’Iran est un pays fortement diversifié tant sur le plan des grands ensembles naturels que de sa population et sa culture où les langues courantes avec la langue officielle le Persan sont, kurde, baloutchi, turc azéri, arabe. L’Iran est l’un des plus anciens berceaux civilisationnels du monde, ayant été habité par les Elamites dès le IVe millénaire av. J.-C.. l’Iran devenant un empire indépendant au siècle suivant sous l’impulsion des Parthes et à partir du iiie siècle de notre ère, les Sassanides érigèrent l’Empire perse au rang de grande puissance de l’Asie de l’Ouest pendant plus de quatre cents ans, la conquête arabo-musulmane au viie siècle ayant conduit à l’islamisation de l’Iran, dont les contributions aux arts, aux sciences et à la philosophie au cours de l’Age d’or de l’Islam furent nombreuses. Après le déclin du califat abbasside, l’Iran fut gouverné par des dynasties locales puis par les Turcs seldjoukides , puis par Ilkhans mongols. La dynastie séfévide unifia à nouveau l’Iran au xve siècle et fit de l’Islam chite la religion officielle. Après que l’Iran eut été une puissance majeure sous Nader Chah au XVIIIe siècle, des rivalités tribales ont permis l’émergence de la dynastie kadjar .qui stabilisa le pouvoir pendant un siècle et demi en résistant aux tentatives de colonisation des Britanniques et des Russes, sans pouvoir empêcher des pertes territoriales face à l’empire russe .Au début du xxe siècle, la révolution constitutionnelle persane aboutit à l’instauration d’un parlement (1905-1911) et la dynastie Pahlavi régna sur le pays de 1925 à 1979, période au cours de laquelle la Perse devint officiellement l’empire d’Iran (1935). Le pays fut gouverné de façon parlementaire ou autoritaire de façon fluctuante pendant cette période, marquée par un coup d’Etat américano-britannique contre le Premier ministre Mohammad Mossadegh en 1953 et la révolution islamique en 1979 aboutit à l’établissement de l’actuel régime politique de l’Iran où le Guide de la révolution depuis 1989, détient l’autorité suprême. L’Iran est sous sanctions avec une courte pose entre 2017/2020 avec la signature de l’Accord de JCPoA et en 2020 lorsque l’administration Trump a décidé de s’en retirer .Récemment, le 17 septembre 2021 lors du 20ème sommet a été retenue la candidature de l’Iran pour devenir le 9ème membre de l’Organisation de coopération de Shanghai (OSC) et le 24 août 2023, parmi la quarantaine de candidats, l’Arabie saoudite, l’Égypte, les Émirats arabes unis, l’Éthiopie, l’Iran et l’Argentine, qui a finalement décliné l’invitation, ont été retenus.
2.-Structure de l’économie iranienne
Selon le volume exporté et les fluctuations des prix , les hydrocarbures en Iran représentent 85 à 90 % des recettes d’exportation, 40 à 50 % des ressources budgétaires de l’État iranien et 15 à 20 % du PIB. L’économie iranienne est caractérisée par la prédominance du secteur public Ainsi, en 2021, parmi les 100 premières sociétés cotées du pays par la valeur de la capitalisation boursière, 5 seulement avaient une ou plusieurs personnes privées comme actionnaire majoritaire. Les acteurs publics et semi-publics bénéficient d’aides substantielles de l’État, pour partie financées par emprunt bancaire. Dans son dernier rapport trimestriel, connu sous le nom de Perspectives de l’économie mondiale, le FMI estime la croissance économique de l’Iran à 5,4 % en 2023 avec une prévision de 3,8 %, en 2024 , le produit intérieur brut PIB de l’Iran ayant été de 351 milliards de dollars en 2021 et de 413,5 milliards de dollars en 2022. L’industrie représente 40% dont 20% pour l’industrie manufacturière ; l’agriculture 12,4% du PIB employant 17% de la population active Le FMI a estimé que les réserves de change disponibles pour l’Iran fin 2022 à 30,8 milliards de dollars et que le taux de change du Ryal iranien le 14 avril 2024 est de 0, 000024 un dollar US. Quant au taux de chômage, le ministre iranien de l’Économie, citant le rapport du Centre iranien des statistiques, a atteint 7, 6% en 2023 contre 7,90% en 2022, mais avec un taux de jeunes de 20,60% en 2023 contre 20,10% en 2022. Ayant instauré un système de subventions ciblées où la part de l’énergie est prépondérante, le revenu mensuel brut par habitant iranien est de 325 dollars contre une moyenne mondiale de 1076 dollars et le revenu mensuel brut par habitant de 3900 dollars contre une moyenne mondiale de 12911 dollars ( source Banque mondiale 2022 ) et pour d’autres sources en janvier 2024 , le salaire mensuel moyen en Iran se situe autour de 20 à 30 millions de rials iraniens, ce qui équivaut à environ 400 à 600 dollars ..ce qui explique avec le taux d’inflation important il y a risque de vives tensions sociales. Pour le taux d’alphabétisation (2021), nous avons 89 % pour les Iraniens de plus de 15 ans)et l’Indice de développement humain est de 0,774 (76ème rang mondial en 2021). Les importations de biens ont été de 49,35 milliards de dollars en 2018, 41,82 en 2019, 38,75 en 2020 , 48,97 en 2021 , 55,446 milliards de dollars en 2022 et les importations des services pour la même période 17,254, 15, 00, 7,27, 11,07 et 11,158 milliards de dollars en 2022. Quant au exportations de biens entre 2018/2022, nous avons 103,42 milliards de dollars en 2018, 65,71 en 2019, 46,91 en 2020, 71,64 en 2021 , 77,200 en 2022 et pour les exportations de services, nous avons en 2018 9,90 milliards de dollars , 10,95 en 2019, 4,77 en 2020 , 5,76 en 2021 , 6,52 milliards de dollars. Les importations par rapport au PIB ont évolué ainsi : 28% en 2018, 27% en 2019, 24% en 2020, 22% en 2021, en 2022 et les exportations par rapport aux PIB 30% en 2018, 23% en 2019, 19% en 2020 , 23% en 2021 et en 2022. La destination des exportations de l’Iran en 2022 est principalement la Chine 32% , la Turquie 17%, Taiwan 6%, Afghanistan 5% , l’Europe 4% et pour les importations nous avons la Chine 26%, les Emirats 15%, l’Europe 13%, la Turquie 9% et la Russie 7%. Ainsi, avec le primat de la Chine, les E.A.U, la Turquie, l’Inde et l’Irak représentaient les trois-quarts du total des échanges hors pétrole de l’Iran en 2022 contre moins des deux-tiers en 2017. L’Iran souffre d’une faible ouverture aux échanges internationaux, depuis les vagues successives de sanctions économiques internationales et malgré un tissu industriel varié (pétrochimie ; automobile ; pharmaceutique ; etc.), les nombreux produits interdits à l’importation par les autorités locales et les allocations de devises aux importateurs insuffisantes limitent l’approvisionnement en équipements et technologies nécessaires au maintien et au développement de l’industrie ce qui a amplifié l’inflation. Pour les autres indicateurs financiers et économiques, selon la commission européenne, la dette publique de l‘Iran a évolué de 121,318 milliards d’euros en 2018 ) , 100,715 en 2019, 82,705 en 2020 et 103,652 milliards d’euros en 2021 Selon les agences internationales , le 13 février 2023, l’Iran avait 4,676 milliards de dollars de la dette extérieure, surtout des dettes à moyen et long terme contre 6,904 milliards de dollars en fin septembre 2022, ce qui montre une dette faible en diminution , grâce au recettes des hydrocarbures.
Dans les bureaux de change à Téhéran, la monnaie nationale s’ est échangée en 2022/2023 de 500.000 à 505.000 rials contre un dollar et le 11/04/2024 , un (1) dollar s’échange à 42.062,50000 IRR , cette dévaluation accélérant l’inflation, tout en ayant permis de dynamiser certains produits à l’exportation. Selon le rapport du FMI, l’atténuation de la dépréciation du Ryal qui, de fin 2022 à fin mai 2023 qui a perdu 20 % de sa valeur par rapport à l’USD sur le marché parallèle et la baisse des prix mondiaux des denrées alimentaires aideront l’inflation annuelle à décélérer pour atteindre 40 % en 2024, contre près de 50 % en 2022. Cela se traduira par une légère accélération de la consommation des ménages (environ 45 % du PIB). En outre, l’investissement (35 % du PIB) commencera à se redresser progressivement au cours de la période à venir, principalement grâce à la reprise des relations diplomatiques avec l’Arabie saoudite en 2023 et à la hausse des investissements . En 2024, une légère augmentation de la production de pétrole (9 % du PIB) est attendue, d’environ 0,5 % par rapport à l’année 2023, pour atteindre 3,7 millions de barils par jour, en fonction de la demande de la Chine et d’autres pays asiatiques, pour laquelle l’Iran est en concurrence avec la Russie.
3.-L’Iran contrôlant le détroit d’Ormuz , acteur stratégique au niveau des hydrocarbures
Afin de combler ces besoins et faute de pouvoir s’approvisionner en produits occidentaux, l’Iran renforce ses partenariats avec les pays frontaliers et l’Asie , au premier plan, la Chine absorbant près de 90% des exportations de brut iranien (1,3 MB/j en 2023 souvent à des prix préférentiels comme d’ailleurs la Russie en direction de l‘Inde et de la Chine. L’Iran étant un acteur stratégique majeur de la région contrôle le détroit d’Ormuz bordé par le sultanat d’Oman reliant le Golfe persique à la mer d’Arabie et à l’Océan Indien. Cet étroit passage maritime est l’un des points névralgiques du commerce mondial, ce qui lui confère une haute importance stratégique. Plus des trois-quarts de ces exportations sont destinés aux pays d’Asie, en premier lieu la Chine, l’Inde et le Japon. Si l’Arabie saoudite et les Émirats ont établi un réseau d’oléoducs pour contourner le détroit, ces voies alternatives comportent en réalité des volumes limités. Face au rétablissement annoncé des sanctions américaines sur son pétrole, Téhéran a menacé de bloquer cette voie par laquelle transitent jusqu’à 30% des exportations maritimes de pétrole, à l’extrémité des eaux du Golfe, entre l’Iran au nord, Oman et les Emirats arabes unis au sud. Sur le plan énergétique l’Iran détient 11,5% des réserves mondiales de pétrole conventionnel, la deuxième au Moyen Orient derrière l ‘Arabie Saoudite ( la première réserve mondiale étant le Venezuela mais pétrole lourd ), le quatrième producteur mondial entre 3,5 et 4 millions de barils/j et la seconde réserve mondiale de gaz derrière la Russie 15% des réserves mondiales et sa capacité de production de gaz est de plus d’un milliard de mètres cubes par jour, mais comme pour le pétrole , devant tenir compte de la forte consommation intérieure,, le prix largement inférieur au prix du marché international. L’Iran comme d’ailleurs la Russie, confrontés aux sanctions occidentales, fortement dépendante des ventes d’hydrocarbures, c’est la sécurisation de ses immenses réserves d’hydrocarbures qui le pousse à développer un programme nucléaire civil et à chercher à disposer de l’arme nucléaire parallèlement à la construction d’une importante industrie de défense conventionnelle, ces capacités militaires correspondent pour Téhéran, à un impératif de sécurisation de ses sites de production d’hydrocarbures, axé sur deux constatations stratégiques. L’Iran a tout d’abord un sentiment d’encerclement du fait de la présence militaire des États-Unis sur pratiquement toutes ses frontières terrestres et maritimes (Turquie, Irak, Koweït, Arabie saoudite, Bahreïn, Qatar, Émirats arabes unis, Oman, Pakistan et Afghanistan). Ensuite, la plupart des sites de production iraniens sont concentrés et vulnérables, car principalement situés à proximité de l’Irak ou en off-shore dans le golfe Arabo-Persique. Or deux régions d’Iran (Lorestan et Khouzistan pour le pétrole, South Pars pour le gaz) recèlent 90 % de son pétrole et 63 % de son gaz Cependant, le défi majeur défi est lié à un retour à l’accord sur le nucléaire iranien, officiellement connu sous le nom de Plan global d’action conjoint (JCPOA), dont les États-Unis se sont retirés unilatéralement en mai 2018. Un retour à l’accord semble difficile à réaliser dans le contexte géopolitique mondial actuel, malgré les récents pourparlers indirects entre l’Iran et les États-Unis. Les relations (ou l’absence de relations) de l’Iran avec ses principaux voisins, en particulier l’Arabie saoudite, Israël, l’Égypte, la Russie, Oman et les Émirats arabes unis, continueront de façonner le paysage extérieur, ainsi que l’avenir de l’Irak, du Liban, de la Syrie, du Caucase du Sud et récemment des tensions au Moyen Orient. Les rivalités actuelles, la concurrence pour l’influence et les luttes de pouvoir régionales pourraient potentiellement accroître les tensions.
En conclusion, le Moyen-Orient en 2022/2023 , représente 32,7% de la production du pétrole et 20% du gaz naturel et pour les réserves 60% de pétrole et 40% de gaz naturel , le détroit d’Ormuz contrôlé par l’Iran 30% du transit mondial des produits d’hydrocarbures sans compte les tensions en Mer rouge, entre 12/15% du commerce mondial de marchandises, la mer Rouge jouant un rôle particulièrement important dans les échanges Europe-Asie (40 % des échanges), où selon l’Institut Kiel ,un conteneur navigant entre la Chine et l’Europe est passé en moyenne de 1500 dollars à 4000 dollars. Si le conflit entre l’Iran et Israël et entre Israël et Hamas se propage aux pays voisins, les conséquences tant géostratégiques que pour l’économie mondiale pourraient être particulièrement lourdes, avec comme impact direct la fermeture du détroit d’Ormuz avec des interruptions d’approvisionnement en hydrocarbures renchérissant le coût de l’énergie de toutes les chaînes d’approvisionnement et leurs coûts de production avec un prix qui dépasserait les 100 dollars le baril, des pressions inflationnistes avec une récession économique à terme dont les premières victimes seront les pays les plus vulnérables . Espérons que la raison l’emporte sur les passions, et une des solutions pour apaiser toutes ces tensions est la création d’un Etat palestinien sur des bases fiables permettant de mettre fin à ce massacre , la cohabitation des peuples de la région dans la paix et la sécurité .
A.M