La mémoire tatouée

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En fin de compte, les commémorations se suivent et se ressemblent. Cette Journée du chahid est passée inaperçue et n’a donc pas failli à la tradition protocolaire, celle-là qui consiste à déposer la gerbe de fleurs, à lire la Fatiha et à se disperser en attendant la prochaine date-souvenir. C’est que nous avons un rapport presque superficiel avec notre propre histoire et à la longue, c’est devenu à peine un devoir que nous accomplissons avec l’obséquiosité qui sied en pareilles circonstances. Alors, nous arborons l’ai grave et la mine déconfite devant l’alignement des tombes de ceux-là qui sont morts pour la patrie. Pourtant, le récent hôte de l’Algérie, le candidat Macron a jeté un pavé dans la mare en déclarant que «la colonisation est un crime contre l’humanité» et c’est là une occasion idoine pour remettre sur le tapis les horreurs commises au nom de la colonisation. Quoi de plus opportun que cette Journée du chahid pour évoquer à coups de conférences ou de meetings toutes les exactions commises par la soldatesque française ? Et Dieu seul sait qu’il y en a eu des exactions et des horreurs. Depuis les enfumades du Dahra où des tribus entières étaient enfermées dans des grottes et affreusement assassinées à la fumée, jusqu’au mitraillages des douars entiers en passant par tout le reste, les tortures, les corvées de bois, les viols, les dépossessions, les exécutions sommaires…Il faudra peut-être songer à revoir intégralement les programmes de l’histoire telle qu’elle est enseignée dans les écoles où l’on fait plus dans l’héroïsme que dans la narration fidèle et objective des faits. L’histoire de tout un peuple spolié de sa terre ancestrale, agressé, torturé, massacré, fuyant dans les montagnes parce que dépossédé de ses plaines nourricières…Les vieux sont d’excellentes mémoires vivantes et il suffit de les solliciter pour connaître ces épisodes dramatiques subis par le peuple. Loin de toute démagogie.