Il y a quelques décennies de cela, l’université algérienne était en ébullition à l’approche du 19 Mai, Journée nationale de l’étudiant. En effet, ce fut un 19 Mai 1956 que les étudiants désertèrent les bancs de l’université pour rejoindre les maquis de l’ALN. Le fameux mot d’ordre de l’époque était «un Algérien diplômé ne fera pas de meilleur cadavre». Ainsi, cette journée fut décrétée celle de l’étudiant en souvenir des universitaires tombés au champ d’honneur et chaque année, elle était marquée par de nombreuses festivités musicales, théâtrales et autres. C’est ainsi que les étudiants de ces années ont pu assister gratuitement à des concerts de Marcel Khalifa, des pièces de Kateb Yacine (en présence de l’auteur) de Benguettaf, Alloula, Medjoubi et autres monstres sacrés du 4e art. De plus, chaque semaine, il y avait la projection d’un film suivie d’un débat dans le cadre des activités du ciné-club universitaire. A cette époque, des excursions étaient organisées régulièrement et tous les étudiants (tes) pouvaient y participer gratuitement. C’est dire que l’étudiant était réellement pris en charge dans sa vie sociale, culturelle, sportive… Après, vinrent les années quatre-vingt et le grand virage libéral pris par le pays. En cette année 1981, les étudiants s’apprêtaient à fêter comme d’habitude le 19 Mai et ils furent violemment attaqués par des groupes aux cris de «Allah Akbar». Armés de barres de fer, ils poursuivirent les étudiants et les agressèrent devant le regard impassible des agents de sécurité et même des policiers qui avaient reçu l’instruction ferme de ne pas intervenir afin de «laisser les étudiants régler leurs problèmes entre eux». Mais le combat était trop inégal et on assista à l’émergence de nouveaux groupes à l’université qui imposèrent une chape de plomb déclarant toute activité la yadjouz. Les islamistes qu’on appelait à l’époque «Frères musulmans» venaient de prendre définitivement l’université entre leurs mains. Avec les conséquences dramatiques qu’on sait. Depuis, le 19 Mai est devenu une date comme une autre.
