Essais nucléaires au Sahara algérien- Un drame interpellant la France sur son passé colonial

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1951

Les séquelles des essais nucléaires français, effectués il y a 57 ans à Reggane (Adrar), continuent à peser sur la population et l’environnement affectés, interpellant, ainsi, la responsabilité historique et morale de la France face à ce drame. « Crimes contre l’humanité», «crimes abjects et abominables», «violation des Droits de l’Homme». Ce sont, entre autres, les qualificatifs décrivant les essais nucléaires perpétrés dans le Sahara algé- rien par la France, dont ceux effectués le 13 février 1960 dans la zone de Hamoudia, à Reggane (150 km au sud d’Adrar) De l’avis de chercheurs et spécialistes nationaux et étrangers, ces essais dépassent en intensité ceux d’Hiroshima (Japon) tant leurs effets ont été désastreux pour l’homme, la faune et la flore. Depuis leur expérimentation, il y a plus d’un demi-siècle, l’ampleur des ravages engendrés par ces violentes explosions a été décriée et attestée par des témoignages directs de victimes ou de leurs proches, par des études et recherches spécialisées ou encore par des comptes rendus médiatiques. L’horreur est également relatée par les populations, témoins des fortes secousses ayant ébranlé la région de Reggane et les zones environnantes, mais surtout de la tragédie humaine et environnementale qui en a découlé. Le porte-parole des victimes de ces essais en a appelé, à ce propos, aux responsabilités de la France coloniale, censée «répondre de ces crimes devant le droit international et devant le peuple algérien», en même temps qu’il a rappelé son obligation d’indemniser les populations affectées par l’onde de dommages qui s’en est suivie. Les retombées des essais nucléaires dans le Sud s’étaient avérées, au fil du temps, plus tragiques qu’il ne pouvait, au départ, paraître. Le plus important préjudice a été celui impactant la santé des habitants de la région : apparition de maladies diverses et inconnues, caractérisées par des malformations de tous types ainsi que des cas conséquents de cancer et de cécité, comparativement au reste du pays. Une vingtaine de maladies cancéreuses a été répertoriée comme étant une résultante directe de la radioactivité par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), dont certaines de contamination immédiate par la radioactivité et d’autres pouvant être développées à long terme. Plus de 50 ans après ces explosions, leurs effets néfastes pèsent toujours sur la population et l’environnement sahariens, tel que démontré par des tests effectués ces dernières années et révélant l’existence d’un taux élevé de radioactivité dans la région. Ceci, d’autant plus que des déchets nucléaires demeurent sur le site des expérimentations, constituant un péril certain pour les habitants et l’environnement des localités affectées, non encore assainies de la nocivité de la radioactivité. Une responsabilité qui continue, par ailleurs, d’interpeller la France, auteur des essais de Reggane mais aussi d’In Ecker (Tamanrasset) et des éssais chimiques de Oued Namous (Béchar). En déplacement à Illizi à l’occasion du 57e anniversaire de ces événements tragiques, le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, a indiqué que ces essais nucléaires constituent une preuve de l’atrocité des crimes commis par la France coloniale et dont les retombées néfastes sur la santé des populations locales persistent à ce jour. Ces évènements douloureux vécus par la région de Reggane (Adrar) et In Ecker (Tamanrasset), et dont le peuple algérien commémore le 57e anniversaire, font partie des «innombrables crimes perpétrés par le colonialisme contre le peuple algérien», a-t-il souligné. Zitouni a appelé à la préservation de la mémoire historique et collective du peuple algérien, en mettant en exergue et en glorifiant les sacrifices des ainés et en les léguant aux générations dans toute leur grandeur et avec une grande fierté. «Ce à quoi œuvre le ministère des Moudjahidine à travers l’intérêt porté à l’écriture de l’Histoire et sa transmission par tous les voies et moyens», at-il soutenu. S’agissant de la question des indemnisations des victimes des essais nucléaires dans le Sahara algérien, le ministre a indiqué qu’elle figure parmi les dossiers en suspens entre les deux parties (Algérie et France), dans son aspect lié à la prise en charge des séquelles de l’ère coloniale et à la mémoire collective du peuple algérien, nécessitant ainsi une méthodologie d’action judicieuse et son étude par le canal diplomatique. Un groupe de travail intersectoriel a été mis sur pied pour traiter ce dossier de l’indemnisation des victimes des explosions nucléaires françaises au Sahara, et les discussions algériennes se poursuivent, à ce sujet, dans le cadre d’un comité gouvernemental intersectoriel, a-t-il fait savoir. Dans le cadre de ce séminaire d’une journée, le directeur du Centre national des études et recherches sur le mouvement national et la Révolution du 1er novembre 1954, Djamel Eddine Miaâdi, a rappelé que ces essais nucléaires françaises au Sahara constituent l’un des principaux thèmes de séminaires locaux et nationaux visant à diffuser la culture historique et à ancrer le sens patriotique aux générations post-indépendance.