Entre l’important déficit budgétaire et les incitations fiscales: La Loi de finances prévisionnelle 2026 permettra-t-elle de relancer l’économie nationale ?

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Rappelons  qu’une loi des finances n’est qu’un document comptable retraçant les recettes et les dépenses annuelles d’un pays  et ne saurait remplacer  la planification stratégique qui en Algérie fait cruellement défaut.  Afin d’avoir des comparaisons fiables, nous avons retenu , tout au cours de cette analyse un cours constant de novembre 2025  de 130 dinars un dollar.

1.-’évolution du déficit budgétaire  de 2021 aux prévisions de 2026  

Les principaux indicateurs du cadrage macroéconomique à moyen terme du PLF2026, selon le rapport de présentation de ce texte, élaboré par le ministère des Finances sont

-le  prix de référence fiscal du baril de pétrole brut est fixé à 60 dollars  et le   prix de marché du baril de pétrole brut est de 70 dollars,

-La loi de finances 2021 : des recettes budgétaires évaluées à 5 331,8 milliards de dinars et des dépenses totales de 8 113 milliards de dinars soit un  déficit  de 21,4 milliards de dollars

La loi de finances 2022 :   des recettes de 5 683,22 milliards de dinars et des dépenses totales de 9858,40 milliards de dinars, soit un écart de  32,17 milliards de dollars

La loi de finances 2023 : des recettes budgétaires de 7 901,90 milliards de dinars et des dépenses totales de 13 786,80 milliards de dinars. soit un déficit de 45,26 milliards de dollars

La loi de finances 2024 : des recettes de 9.105,3 milliards de DA  et des  dépenses  de 15.292,47 milliards de DA  soit un déficit de 47,60 milliards de dollars

La loi de finances 2025 en Algérie prévoit des recettes budgétaires de 8 523,1 milliards de DA et des dépenses de 16 794,6 milliards de DA, soit un écart  de 63,62 milliards de dollars .

Pour le PLF 2026, les  recettes devraient atteindre 8 009 milliards de dinars,(61,60 milliards de dollars) 19% du PIB  et les dépenses 17 636 milliards de dinars, 42% du PIB  (135,66 milliards de dollars ) soit un déficit de 9627 milliards de dinars soit au cours actuel 74,06 milliards  de dollars Avec -un taux de consommation prévu à 70%, les dépenses budgétaires devraient atteindre 12.345,7 mds DA environ 95 milliards de dollars –  en 2026,- en hausse de 5%par rapport à la clôture de 2025,

-la masse salariale, y compris  celle des EPA, s’élève à 5.926 mds DA en 2026, – 45,58 milliards de dollars soit 33,6% du budget de l’Etat,

– les   transferts sociaux avoisinent les 6.000 milliards de dinars soit 46,15 milliards de dollars soit 14,33% du PIB bien entendu le PIB extrapolé  le gouvernement pour 2026. Ainsi le texte de projet de loi reconduit, dans cette optique, les exonérations fiscales sur des produits de large consommation tels que l’huile brute de soja, le café, les légumes secs et les viandes rouges et blanches ainsi que les importations des ovins à l’occasion de l’Aïd El Adha, ces mesures ayant été décidées en 2024-2025 pour exonérer ces produits de droits de douane afin de contenir la hausse des prix.

– Objectif de croissance de 4,1 % en 2026, et  l’inflation à 2,9 %.

Précisons que Le prix du marché ou le fiscal retenu par la loi de finance 2025/206 , étant un artifice comptable car pour assurer l’équilibre budgétaire, , pour le FMI un baril entre 140/150 dollars est nécessaire. La dévaluation rampante du dinar tant par rapport au dollar que l’euro  (la banque d’Algérie parle  de glissement)   outre l’inflation importé pour les produits non subventionnés  et l’car croissant avec le l cours du marché parallèle qui en ce mois de novembre 2025 tend vers 80%, outre qu’ elle n’ ’a pas permis d’asseoir une économie diversifiée en dynamisant les  exportations hors hydrocarbures, supposant des entreprises compétitives,  le cours du dinar officiel  étant passé de 5 dinars un dollars  en 197O, 45 dinars  un dollars  en 1994, à 70 dinars  un dollar en moyenne vers les années 1998/2000 et   130/135 dinars entre 2020/2025, montrant que le blocage est d’ordre systémique,    diminue artificiellement  le déficit budgétaire en accroissant les taxes de produits importés et en augmentant les recettes hydrocarbures converties en dinars dévalué

2- Les mesures d’incitations fiscales prévues par le PLF 2026

-parmi les mesures  permettant de faciliter  la transition énergétique, le PLF 206 prévoit  un allégement fiscal  sur les entrants destinés  à la fabrication des panneaux  solaires photovoltaïques  en réduisant de 5%  les droits de douane , ainsi qu’une exonération  des droits de douane  des électrolyseurs  destinés  à la production d’hydrogène  ainsi que  l’exonération des taxes et droits sur l’importation et la vente de 10.000 bus, et la réduction du taux d’imposition sur le revenu global sur les dividendes perçus par les personnes physiques résidentes, passant de 15% à 10%.

-la loi de finances 2026 (PLF 2026) consacre une enveloppe de plus de 760 milliards de dinars (DA) au secteur de l’agriculture et de la pêche, avec pour objectifs de renforcer la production nationale, développer les filières stratégiques et moderniser le secteur. Les  importation de navires d’occasion autorisée pour les grandes pèches  a été prorogée de  5 ans à 15 ans et bénéficieront des exonérations des  droits de douane et de l’application du taux réduit de la TVA  de 9%.  Les   opérations d’importations  des matières premières  entrant dans  la production destinés à l’élevage  et des espèces  aquatiques d’élevage. Les produits  issus de la fabrication  de ces aliments  seront  soumis   au même taux de 0,5%  par transaction d’importation , ce taux étant calculé  sur la valeur  en douane majoré  des droits de douane  et d’une marge forfaitaire de 30%x

Les opérations de réhabilitation et de rénovation des anciens immeubles à usage d’habitation seront également soumises à un taux réduit de TVA de 9 %. Les exonérations fiscales pour l’importation de moutons vivants à l’occasion de l’Aïd El-Adha 2026 seront maintenues et    l’élargissement de l’exonération des droits de mutation à titre onéreux, actuellement accordée aux personnes physiques pour l’acquisition de logements dans le cadre de la promotion immobilière, afin d’y inclure également les biens immobiliers financés selon les formules de financement islamiques (Mourabaha et Ijara mountahia bitamlik).

Concernant la promotion de l’investissement, le projet de loi définit le régime fiscal applicable aux activités de « micro-importation », prolonge de deux années (au lieu d’une seule) les exonérations fiscales accordées aux start-up en cas de renouvellement de leur label et renouvelle les avantages fiscaux accordés aux incubateurs d’entreprises lors du renouvellement de leur agrément. Les contribuables exerçant une activité  de micro-importateur  seront soumis  à un taux d’imposition  forfaitaire unique de 0,5% par transaction  d’importation.

– les opérations d’importations  de marchandises s effectués dans  le cadre du troc transfrontalier  ont été exclus  du champs d’application  du paiement anticipé de l’IBS  lors  de l’importation  de produits destinés  à la revente  en  l’état  et les  entreprises réalisant un chiffre d’affaires annuel supérieur à deux milliards de DA seront tenues de consacrer au moins 1% de leurs bénéfices imposables au financement des activités de recherche, de développement et d’innovation, avec des exonérations fiscales prévues en faveur des filiales des établissements publics à caractère scientifique, culturel et technologique.

Autres mesures : – réduction du taux de l’impôt sur le revenu IRG ) sur les dividendes versés aux personnes physiques résidentes de 15 % à 10 % et  Introduction de réformes  pour les non-résidents, avec des allègements de TVA et de nouveaux droits de dépôt et prise en charge à 100 % des frais de participation aux salons spécialisés à l’étranger pour les entreprises, en particulier les PME et les entreprises de l’artisanat, prolongation de deux ans des exonérations fiscales pour le renouvellement du label des start-up  et élargissement de l’autorisation d’importation de véhicules neufs pour les secteurs du transport, des travaux publics et de l’hydraulique.

3.-Le PLF 2026 confronté à la réalité économique

Il s’agit d’éviter tant le mythe du bureaucrate qui pense que faire de nouvelles lois  et reposer son action sur  l’administration, sans intermédiations politiques  et sociales collant avec la  réalité sociologique du pays,  résout tous les problèmes, que ce mythe monétaire de se braquer uniquement sur l’équilibre de la balance commerciale afin de préserver les réserves de change fonction essentiellement des recettes de Sonatrach qui ont été   de 60 milliards  de  dollars  en 2022, 50 en 2023,  45 en 2024    et entre 41/42 en 2025 qui selon le FMI ont été en  2021, les réserves de change  à environ 45,30 milliards de dollars, contre plus de 48,17 milliards fin 2020, en 2022, 60 milliards de dollars, de   69,50 milliards de dollars  2023 ,à  67, 08 milliards de dollars selon Trading Economics , et du fait de l’important déficit tant de la balance commerciale sue celle de la balance des paiements pour 2025, seront inférieures au montant de 2024, devant transformer  cette richesse virtuelle en richesses réelles . C’est une  vision statique, et non dynamique, où on assiste à des pénuries du fait  des restrictions d’importations , le taux d’intégration des entreprises publiques et privées  en 2024 étant inférieur à 15%, qui paralysent le tissu économique, faute de la faiblesse de la production nationale, devant transformer cette richesse virtuelle en richesse. En Algérie, le taux d’intégration tant des entreprises tant publiques que privées algériennes entre 2023/2024 ne dépasse pas 15%.  Pour que ces projections du projet de loi de finances 2026 se réalisent, il faut résoudre quatre équations :

Premièrement, ce  déficit alimentera t-il les dépenses non créatrices de valeur et dans ce cas l’accélération du processus inflationniste est inévitable, c’est une loi économique applicable à tous les pays sans exception, surtout en cas de stagnation comme en 2024/2025 ou de baisse des recettes des hydrocarbures en 2026 qui servent de tampon social ou une grande fraction sera t-elle affectée aux activités productives ? En cas d’un cours du gaz représentant un tiers des recettes de Sonatrach de 3O/35 dollars le mégawatt heure  et un baril moins de 60/65  dollars ,devant tenir compte des importations en euros donnant un cours  53/55 euros le baril alors que 50% des importations se font en euros, il y a risque d’accroissement des tensions budgétaires . Aussi s’imposent une nouvelle gouvernance centrale et locale , la valorisation savoir et de profondes réformes au sein d ‘une planifications stratégique qui fait cruellement , la création de la valeur reposant sur des entreprises productives loin des injonctions administratives

Deuxièmement  il faut avoir un fort taux de croissance devant ’attirer les IDE ce qui suppose   une visibilité dans la politique socio-économique, l’amélioration du milieu  des affaires et la lutte contre la bureaucratie étouffante et   l’émergence de segments hors hydrocarbures concurrentiels en termes de coût et qualité au niveau tant interne qu’au niveau international. . Selon les données du FMI et de la Banque mondiale, avec certains corrections des données du gouvernement algérien,  le taux de croissance , non proportionnel aux dépenses monétaires a été le suivant : 3,8% en 2021, en  2022 3,6%, en  2023  4,1%, prévision  pour   2024 3,3%, une prévision pour  2025 de 3,4% et une prévision de 3,7% pour 2026. Le produit intérieur brut  pour 2022 a été de 225,6 milliards de dollars  , en 2023, de 247,6 milliards de dollars , en 2024 263,6 milliards de dollars, une prévision de 278,7 milliards de dollars US pour 2025 et selon  le PLF 2026, le  produit intérieur brut (PIB), en valeur courante, devrait atteindre 41.878,3 mds DA en 2026, 322 milliards e dollars  pour augmenter à 45018,4 mds DA en 2027, 346 milliards de dollars , à 48.395,7 mds DA en 2028, soit 372 milliards de dollars. – Le PIB hors hydrocarbures à ne pas confondre avec les exportations hors hydrocarbures selon le PLF 2026   devrait atteindre 36.286,5 mds DA en 2026,  soit 27,91 milliards de dollars 39.578,3  soit 27,91 milliards de dollars mds DA en 2027, avant d’atteindre 43.117,8 mds DA en 2028, soit  33,16 milliards de dollars    Le taux annoncé  de  400 milliards de dollars par certains experts organiques  pour 2026/2027  selon les tendances de certaines institutions internationales, qui donnent PIB inférieur à  celui du gouvernement pour 2026/2028,  sous réserves de profondes réformes ne serait atteint  pas avant 2030/2032 supposant un taux de croissance constant  de 6/7% par an  pour juguler l’inflation et absorber un flux additionnel de demande d’emplois d’environ350.00/400.000  par an qui s ‘ajoute au taux de chômage actuel

Troisièmement,, lié à l’axe précédent, le   PLF 2026  mise surtout sur les recettes fiscales hors hydrocarbures étant prévu   que  la fiscalité des hydrocarbures budgétisée devrait diminuer, passant au cours constant de 130 dinars un dollar de  20,75 milliards de dollars  en 2026 à 19,90 milliards de dollars  en 2027 et à 19,30 milliards de dollars.  Or , un projet après sa mise en exploitation réelle , son seuil de rentabilité, sous réserve qu’il s ‘insère dans la logique des valeurs internationales et de la levée des contraintes bureaucratiques, n’est atteint qu’au bout de 3 ans pour les PMI/PME et 5/7 ans pour les grands projets. Selon les données officielles pour les exportations hors hydrocarbures nous avons selon les statistiques douanières ( APS) : près de 6,9 milliards de dollars en 2O22 , 5,O1 en 2O23 selon la banque d’Algérie et selon les dernières données de l’ONS, une diminution de 6,7% par rapport à 2O23 ce qui donnerait pour 2O24 environ 4,7 milliards de dollars.

Quatrièmement, constatant  la stagnation de la fiscalité ordinaire, qui ne représente que 10% du PIB, soit environ 4.300 milliards de dinars le PLF 2026 prévoit pour plus de justice sociale élargir  l’assiette fiscale  ce par l’inclusion du marché parallèle mais  le grand problème qui se pose à l’Algérie   comment  intégrer  la masse minutaire hoirs banques ? En 2023, la circulation fiduciaire hors banques (l’équivalent de la masse monétaire hors banque) était de 8 300,76 milliards de dinars, ce qui représentait plus d’un tiers de la masse monétaire M2, et ce chiffre restait globalement similaire en 2024. Selon les rapports de la Banque d’Algérie, la masse monétaire en circulation hors du circuit bancaire en Algérie a atteint environ 66,25 milliards de dollars à la mi-2024. ce montant représentant  une part très importante de la masse monétaire totale (M2), estimée à environ 34%. Cette circulation fiduciaire hors banques a connu une croissance continue, avec un taux de 8,6% fin 2023 et de 7,25% fin juin 2024, montrant qu’il reste un long parcours  pour  bancariser cet argent, la numérisation n’étant qu’un moyen , la solution redonner confiance sans laquelle aucune mesure et aucun développement fiable  ne peut se concrétiser . Aussi se pose cette question de l’efficacité de la mesure introduites  dans le PLF 2026 où pour lutter contre l’informel où il est prévu  une amnistie fiscale à 10% et des garanties de non-poursuites judiciaires contre les personnes qui accepteraient de déposer leur argent dans les banques, procédure permettant la déclaration des montants cachés contre le paiement d’un impôt raisonnable et la garantie de ne pas être poursuivi, disposition  valable une année, jusqu’au 31 décembre 2026.

En conclusion, le déficit budgétaire a plus que triplé entre 2021 et 2025/2026 et le risque, si on attire pas les investissements directs étrangers à valeur ajoutée et non de simples fournisseurs marchands    avec la baisse des recettes d’hydrocarbures, serait de recourir à la planche à billets qui aurait un effet inflationniste dévastateur   remettant en cause la nécessaire cohésion sociale. Face à un monde turbulent et instable et à des besoins sociaux internes croissants, l’Algérie étant fortement connectée à l’économie mondiale -importation/exportation, le taux de croissance via la dépense publique, le taux d’emploi, les réserves de change, le corps social étant irrigué essentiellement par la rente des hydrocarbures, une Nation ne pouvant distribuer plus que ce qu’elle produit, afin d’éviter de vives tensions sociales à terme, cela rend urgent, la nécessité de gérer efficacement les finances publiques pour assurer la stabilité et le développement économique à moyen et long terme.

Pr des universités, Expert international-  Dr d’Etat 1974- Abderrahmane Mebtoul

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