Algerie: Situation 2022/2024 et perspectives de l’économie algérienne 2025/2030

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Un débat serein loin  de toute sinistrose ou de toute autosatisfaction s’impose  à la veille de l’élection présidentielle en Algérie. J’articulerai cette présente contribution qui a été l’objet de mon  Intervention  de la 1ere partie à la 56ème rencontre du CAP H-2054 – le jeudi 20 juin de  18h à 20h  avec un large débat , en présence notamment des professeurs d’Universités experts internationaux   de Taieb Hafsi  , de Mazouz Bachir  de  HEC Montréal  et de bon nombre d’autres experts   en deux parties interdépendances,  l’ensemble des données étant celles  du gouvernement algérien et des institutions internationales.

Premièrement, je livrerai d’abord quelques indicateurs   macro- financiers, macroéconomiques et macro sociaux  de l’économie algérienne  2022/2024  et  deuxièmement  les  projections  2025/2030, posant  les conditions pour avoir un PIB  de 400 milliards  de dollars horizon 2029/2030 et comme condition du financement ,  pour pouvoir produire plus de 200 milliards de mètres cubes gazeux dont 100 milliards d’exportation tenant compte de la forte consommation intérieure

1-Quelques indicateurs macro financiers et  macro économiques  2022/2024

1.-1.-Les  indicateurs macro financiers  ,

Le déficit budgétaire prévu dans la loi de finances 2024 sera de  46,04 milliards de dollars, plus de 17% du PIB  contre 16% en 2023 le prix de référence du baril de pétrole brut ayant  été fixé à 60 dollars et le prix du marché du baril de pétrole brut de 70 dollars, étant un simple artifice comptable. En effet, compte tenu de la  réévaluation du PIB  en 2023 d’environ 33% incluant la sphère informelle, en attendant son avalisation par les institutions internationales, le budget de l’Etat, dans le cadre de la  loi de finances 2024 , prévoit une hausse historique des dépenses à 15.275,28 milliards de dinars, soit au cours de 134 dinars 113,99 milliards de dollars un dollar , alors que les recettes devraient s’établir à 9.105,3 milliards de  dinars soit   67,95 milliards de dollars   . 

-Le ratio de la dette publique   avoir culminé à 62,9 % du PIB à la fin-2021, la combinaison d’un déficit budgétaire plus faible en 2022 et d’une augmentation significative du PIB nominal a conduit à une baisse  à 55,6 % en 2022  et  de 49,5% du PIB  en 2023 avec  une :dette extérieure : 1,5 % du PIB.. Selon le rapport de la banque mondiale  après avoir atteint 10,8% du PIB en moyenne au cours des cinq années précédant la pandémie, le déficit budgétaire s’est réduit à 7,2% en 2021 du PIB puis à 2,9 % en 2022, en grande partie grâce à l’augmentation des recettes d’hydrocarbures, et malgré l’augmentation des dépenses en salaires et en transferts (+2,1 pp du PIB)  et  le déficit budgétaire hors-hydrocarbures s’est détérioré, passant de 19% en 2021 à 23,3 % du PIB  et au premier semestre 2023, la chute des exportations d’hydrocarbures (–27,2 % par rapport  à la même période 2022)

-Pour son équilibre budgétaire selon le FMI  et en référence à la loi de finances 2023,  l’Algérie a besoin d’un baril de pétrole à près de 149,2 dollars, dans  son rapport d’octobre 2022  contre 135 dollars pour l’exercice 2020/2021 et  100/109 pour l’exercice 2019/2020.  Qu’en sera-t-il pour la loi  de finances 2024 où il est prévu une augmentation des dépenses, l’équilibre budgétaire dépendant avant tout des recettes de Sonatrach qui ont été de 60 milliards de dollars en 2022 pour un cours moyen de 106 dollars le baril et 16 dollars le MBTU pour le gaz, avec une moyenne de 80 dollars pour l’année 2023 les recettes hydrocarbures ont été de 50 milliards en 2023, et vu la moyenne des cours les recettes seront certainement du même niveau, la Coface . prévoyant un creusement du déficit budgétaire

-Les réserves de change de l’Algérie ont clôturé à   69 milliards de dollars de réserves de change fin 2023 , contre rappelons le – 2013 : 194,0 milliards de dollars, 2015 : 144,1 milliards de dollars – 2017 : 97,33 milliards de dollars, – 2022 : 61 milliards de dollars.  environ 80 milliards de dollars  y compris les 173 tonnes d’or qui n’ont pas  évolué en volume depuis 2006/2007,  irrigant d’ailleurs tout le cors social directement ou indirectement,  qui représentent environ 92% des entrées en devises concernant le pétrole et le gaz brut et semi brut mais si on compte  les dérivées d’hydrocarbures  en 2023 inclus dans la rubrique hors hydrocarbures pour plus de 67% qui est passée de 7 milliards de dollars ( source APS) de 7 milliards de dollars en 2022 à un peu plus de 5 milliards de dollars en 2023   on trouve 97/98%.

-Toujours sur le plan financier  nous avons assisté à la dépréciation officielle  du dinar  avec un écart qui est passé en une décennie de 40 à plus de 60% sure marché parallèle, en rappelant que toute appréciation est liée à l’accroissement de la production et de la productivité interne et non à des décisions administratives . Le   cours officiel du dinar  (cours achat) en 1970, a été de 4,94 dinars un dollar, en 1980 à 5,03 dinars un dollar ; – 2001 : 77,26 dinars un dollar et 69,20 dinars un euro– 2020 : 128,31 dinars un dollar -; en 2022 140, 24 pour un dollar et 139,30, un dinar pour un euro  et  le 13 juin 2024 l’euro s’échange à un taux d’achat de 145.76 dinars algériens et à un taux de vente de 145.85 dinars algériens, ce qui semble indiquer une certaine constance dans sa valeur. La  dépréciation officielle  du dinar permet d’augmenter artificiellement la fiscalité des hydrocarbures (reconversion des exportations d’hydrocarbures en dinars) et la fiscalité ordinaire (via les importations tant en dollars qu’en euros convertis en dinar dévalué), cette dernière accentuant l’inflation des produits importés (équipements), matières premières, biens, montant accentué par la taxe douanière s’appliquant à la valeur du dinar, supportée, en fin de parcours, par le consommateur comme un impôt indirect, l’entreprise ne pouvant supporter ces mesures que si elle améliore sa productivité.

– La cotation du dinar  au niveau de la sphère informelle qui est amplifiée souvent par l’instabilité juridique et monétaire et par le processus inflationniste qui par définition  contribue  modifie la redistribution du revenu  national  au profit des  rentes spéculatives et au détriment des revenus fixes , durant l’année 2011, le dinar algérien était coté en moyenne annuelle à 135 dinars pour 1 euro , le 8 octobre 2022, à 209 dinars 1 euro, plus précisément le 22 septembre 2022, à 227 dinars à l’achat et 229 dinars à la vente, le dollar américain à 210 dinars à l’achat et 212 dinars à la vente , Depuis le début juin 2024, , les cours de change de l’euro y sont nettement plus élevés, grimpant jusqu’à 239.00 dinars algériens à l’achat et 241.00 dinars algériens à la vente avec une légère-baisse depuis entre le 15/20 juin 2024. En ce qui concerne le dollar américain, la Banque d‘Algérie dans sa note de conjoncture de février 2024 indique que la circulation fiduciaire hors banques représente 33,35% de la masse monétaire globale en Algérie, soit quelque 7395 milliards de dinars à fin septembre 2022, contre 6712 milliards de dinars à fin décembre 2021, au cours de 137 dinars un dollar 53,98 milliards de dollars, reflétant un état de sous-bancarisation alors que dans les pays développés les plus bancarisés, la part de la circulation fiduciaire ne dépasse guère les seuils de 4 à 5% de la masse monétaire globale.  . Pour lutter contre la sphère informelle, le gouvernement a décidé d’accélérer la numérisation. Cela suppose aussi un système d’information fiable en temps réel, de favoriser les bureaux de change alimenté en grande partie par la Banque d’Algérie, dont l’écart de vente entre l’’officiel et le parallèle doit être inférieur à 10/15% et d’introduire la monnaie numérique, ne devant pas la confondre avec les crypto-monnaies qui circulent sur Internet hors de toute institution bancaire. L’annonce de l’ouverture de bureaux de change date pas d’aujourd’hui puisque les dispositions du règlement n°95-07 du 23 décembre 1995 modifiant et remplaçant le règlement n°92-04 du 2 mars 1992 relatif au contrôle des changes notamment ses articles 10 à 15,  plus de 40 bureaux de change ont été agréés, aucun n’étant  opérationnel.   Sa  réussite  suppose une démarche progressive, la stabilité juridique et monétaire par la maîtrise du processus inflationniste, la refonte du système financier dont les banques publiques accaparent plus de 85% des crédits octroyés et que si l’écart entre l’officiel et le marché parallèle est entre 10/15% minimum, car dans la pratique des affaires pas sentiments.

-Sur le plan fiscal, la directrice générale des Impôts a fait état, le 04 avril 2023 , de 6000 milliards de dinars d’impôts non recouvrés soit au cours de 134 dinars un dollar 44,77 milliards de dollars. Pour les  transferts illicites de capitaux à l’étranger,  selon les données du FMI, les entrées en devises entre 2000/2021 sont estimées, approximativement, autour de 1100 milliards de dollars avec une importation de biens et services de plus de 1050 milliards de dollars le solde étant les réserves de change au 31/12/2020 et une surfacturions entre 10% et 15% donnerait un transfert illicite de devises  entre 100 et 150 milliards de dollars entre 2000/2020 placés dans l’achat de biens , ou de tierces personnes ayant la nationalité étrangère  et  dans des paradis fiscaux où il est difficile de les récupérer.

1.2- Les  indicateurs  macro économiques

-Il y a  accroissement de la population algérienne avec des besoins croissants  qui a évoluée ainsi :– 1960 11,27, – 1970 14,69, -1980 19,47, -1990 26,24, -2010 à 37,06 – et au 01 janvier 2024,  47 298 268 et  d’ici 2030  plus 51  millions . Pour le taux de chômage, nous avons plus  de 2 millions de bénéficiaires d’allocation chômage selon le Ministère du travail(source APS),  à fin 2023  sur une population active selon, l’ONS  est passée de 12 202 063  en 2021 à  13 425 064 en 2023 ce  donne un taux de  14,89%, taux proche de celui de la Banque mondiale mais incluant les sureffectifs dans les  administrations et entreprises publiques . Or, faut un taux de croissance  sur 5/7 ans  de 8/9% pour absorber le flux additionnel de demandes d’emplois entre 350.000/400.000 emplois par an. qui s’ajoute au taux de chômage actuel qui paradoxalement touche de plus en plus les diplômés  en raison à la fois de la désindustrialisation et de la non  correspondance du système socio- éducatif aux besoins économiques favorisant d’ailleurs l’ exode de cerveaux  Car l’emploi ne se crée pas décret et dépend de la croissance des entreprises publiques et privées dont le taux d’intégration en Algérie en 2022 ne dépasse pas 15/20% . Lié à l’emploi, (le revenu brut par habitant étant selon le FMI de 325 dollars entre 2022/2023  et  le revenu brut annuel 3900 dollars mais devant éclater la moyenne pour déterminer la répartition du revenu national par couches sociales.

-Pour le FMI , le taux d’inflation après correction des données algériennes tenant compte des prix   réels sur le marché   de 1970 à fin 2022, la moyenne a été de 8,8% par an et durant cette période le taux d’inflation  aurait été  de 6969,61% où un  bien de consommation qui coûtait 100 dinars en 1970 ,à fin décembre 2022 coûte 7069,01 dinars . Entre 2022  2023 le processus inflationniste a atteint un niveau intolérable plus de 9%/an, étant prévu 5% en 2024, mais calculé rapport à 2023, donne un taux cumulé de 15%  avec  plus 100% pour les pièces détachées toutes catégories confondues , parallèlement à une pénurie de nombre de produits. En plus des factures d’électricité, de l’eau, du loyer, on peut se demander comment un ménage entre 30.000/50.000 dinars, peut-il survivre, s’il vit seul, en dehors de la cellule familiale, qui, par le passé, grâce au revenu familial, servait de tampon social ? Mais attention à la vision populiste : doubler les salaires sans contreparties productives entraînera une dérive inflationniste, un taux supérieur à 20% qui pénaliserait les couches les plus défavorisées, l‘inflation jouant comme distributeur au profit des revenus spéculatifs

– Pour assurer la cohésion sociale en attendant une croissance plus rapide , les transferts sociaux directs et indirects en 2023 ont été  d’environ 5000 milliards de dinars soit au cours de 134 dinars  dollar 37,31 milliards de dollars avec une hausse de plus de 7% en 2024 par rapport à 2023, où le  montant des transferts sociaux directs devrait passer de 2.714 milliards de dinars en 2023 à 2.895 milliards en 2024,  de 20,27 milliards de dollars à 21,60 milliards de dollars  Cela concerne pour 2024, notamment  la subvention directe des produits alimentaires et autres services dont  502 milliards de DA seront consacrés à la stabilisation des prix du sucre, d’huile de table, de la farine, la semoule et des légumes secs, 163 milliards à l’électricité et 313 milliards de DA au logement.. Toujours pour assurer la cohésion sociale,  le gouvernement a consacré 5000 milliards de dinars aux transferts sociaux  soit au cours de 137 dinars un   dollar, 36,49 milliards de dollars, mais des subventions non ciblées injustes, celui qui perçoit 200.000 dinars par mois bénéficiant au même titre que celui qui perçoit 20.000/30.000 dinars et  le  Décret présidentiel n° 21-137 fixe le salaire national minimum garanti à 20.000 dinars mensuel depuis le 1er juin 2021 (soit au cours du marché parallèle 85 euros). Pour  l’année 2023, il a été prévu une augmentation de 4.470 dinars, où un travailleur qui touche 30.000 dinars actuellement, sur les deux années, son salaire sera porté à plus de 39.000 dinars, touchant 2,8 millions de fonctionnaires et contractuels, l’incidence financière étant de  de 340 milliards de dinars en 2023, le  Ministre des finances ayant donné la masse salariale globale qu’il a  estimé à  4.629 milliards de dinars  représentant  47,39% du budget de fonctionnement. Par ailleurs, il  y a eu  l’exonération de l’IRG (Impôt sur le revenu global) de tous les salaires de moins de 30.000 dinars ayant bénéficié selon l’APS  à 6,5 millions de citoyens.

– Le produit intérieur brut PIB, qui a été réévalué d’environ 30% par le gouvernement algérien en 2023 en incluant la sphère informelle avec un  faible flux des IDE (0,8% du PIB), le  FMI  donne     243 milliards de dollars en 2023,   de   268 milliards de dollars en 2024,    293 milliards de dollars en 2025,,   318 milliards de dollars en 2026  et   370 milliards de dollars  en 2028 sur une moyenne de de croissance annuelle de ¾%, la banque  africaine de développement prévoyant 4% pour 2024, taux proche de celui du FMI qui prévoit 3,8% en 2024 et 3,1% en 2025 contre 4,2% en 2023, soutenue par essentiellement la dépense budgétaire via la rente de hydrocarbures.

– Rappelons que selon les agences internationales Reuters et l’AFP du  14 juin 2024, Bruxelles a ouvert une procédure contre l’Algérie, accusée de restreindre depuis 2021 les exportations et investissements de l’Union européenne (UE) , menaçant de recourir à l’arbitrage international, et a réclamé des consultations avec les autorités du pays.    L’Accord d’association Algérie-UE  en vigueur depuis le 01 septembre 2005 est, pour le moins qu’on puisse dire, en stand-by, l’Algérie , qui s’estime lésée, avait  demandé depuis plusieurs années , sa révision, afin d’asseoir une meilleure base d’échanges mutuellement bénéfique, l’Algérie engorgeant plus de 50% de ses devises avec l’Europe mais l’Algérie assurant la sécurité énergétique de l’Europe Aussi, contrairement à certains qui  supputent une détérioration des relations  économiques entre l’Algérie et l’Europe, dans un but de déstabilisation de l’Algérie étant entendu que dans la pratique des relations internationales  que des affaires n’existent pas de sentiments mais que des intérêts, chacun défendant avant tout ses intérêts propres,  ,  malgré ces divergences conjoncturelles, il s’agit comme je l’ai souligné il y a quelques années lors d’une conférence, à l’invitation du parlement européen à Bruxelles, de dépassionner les relations car la stabilité des deux rives de la Méditerranée, nous impose d’entreprendre ensemble,  l’Algérie et l’Europe étant  deux partenaires stratégiques. C’est que l’Europe reste un partenaire clef  pour l’Algérie comme en témoigne la structure du commerce extérieur  où l’Europe en 2022 s’impose comme le premier partenaire commercial  de l’Algérie avec 61,1 milliards de dollars  soit environ  la moitié des échanges totaux où  en 2022, les échanges commerciaux se sont élevés à 104,2 Mds USD, en hausse de 37% par rapport à 2021

A.M ( 1/2 )

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