Ce mois est propice au recueillement parce que le Coran y est descendu et que les portes de l’enfer y sont fermées. Alors, il est recommandé d’observer le jeûne avec la plus stricte des humilités, en tendant la main à l’autre, en évitant les excès, en multipliant les bonnes actions dans la discrétion la plus totale…Mais il se trouve toujours des hurluberlus pour donner à ce mois de piété des dimensions outrancières. Passons sur l’esprit mercantile qui s’empare du commun des citoyens qui se découvrent les qualités de businesmen en faisant commerce de tout produit, de la boisson citronnée appelée «cherbet» (celle-là qui soit dit en passant, a donné le mot «sorbet» à la langue française, à la zlabia dégoulinante, au pain au sésame en passant par le fameux quelb-ellouz vendu à même le trottoir, tout est donc monnayable et source de profit. Mais il y a l’autre aspect du Ramadhan, spirituel celui-là et une immense ferveur s’empare alors du commun des jeûneurs qui «thésaurise» ainsi les bonnes actions et les investit pour les onze mois qui restent. Ainsi, il est permis d’écrire que durant ce mois, le croyant devient un peu plus croyant avant de retrouver sa foi ordinaire le reste de l’année. Les mosquées deviennent les lieux les plus appropriés où s’exerce cette foi surérogatoire et certains imams n’hésitent pas alors à forcer un peu la dose dans leurs prêches en confondant allègrement l’époque actuelle avec celle lointaine des grandes conquêtes musulmanes. Ils se plaisent à développer la thèse selon laquelle les musulmans sont en guerre contre les infidèles en Irak, Syrie et ailleurs et omettent de préciser que l’Arabie saoudite, pays des Lieux Saints, passe le plus clair de son temps à bombarder un autre pays musulman et surtout extrêmement pauvre, le Yémen, avec la bénédiction et les armes des infidèles! Aussi, quand les imams terminent leurs prêches par l’invocation «que Dieu fasse triompher l’islam et les musulmans», on ne sait pas contre qui…