Le président zimbabwéen Robert Mugabe (93 ans) a été démis de ses fonctions ce dimanche 19 novembre à la tête de la Zanu-PF lors d’une réunion extraordinaire du comité central de ce parti. Il a été remplacé à ce poste par l’ex-vice-président Emmerson Mnangagwa.
La ligue des jeunes de la Zanu-PF, au pouvoir au Zimbabwe, a exigé du président Robert Mugabe, placé en résidence surveillée par l’armée, de « démissionner » et demandé « l’expulsion » de son épouse Grace du parti. « Nous exigeons l’expulsion à tout jamais de Mme (Grace) Mugabe de la Zanu-PF et exigeons du président Mugabe qu’il démissionne de son poste de président et premier secrétaire du parti et du poste de président de la République du Zimbabwe », a indiqué la ligue dans un communiqué. « Le vieux chef de l’Etat pourra ainsi se reposer », a-t-elle ajouté au lendemain de manifestations contre le chef de l’Etat, cette semaine, réclamant sa démission. La ligue a également « fermement condamné » l’expulsion du parti et du gouvernement du nouvel homme fort du Zimbabwe, soutenu par l’armée, le vice-président Emmerson Mnangagwa et « recommandé » qu’il soit « immédiatement rétabli » dans ses fonctions. La destitution le 6 novembre de M. Mnangagwa a provoqué l’intervention de l’armée, qui n’a pas accepté la perspective que Grace Mugabe « se retrouve en position favorite pour succéder, le moment venu, au chef de l’Etat ». C’est elle qui a obtenu du président que M. Mnangagwa, un des plus fidèles alliés du chef de l’Etat, soit démis de ses fonctions, selon les observateurs locaux. « Il est fâcheux que le président lui ait permis d’usurper son autorité, détruisant ainsi le parti et le gouvernement », a estimé la ligue. La pression n’a jamais été aussi forte sur le président Mugabe, au pouvoir depuis 1980, pour qu’il démissionne. Le comité central de la Zanu-PF doit se réunir dimanche pour le destituer de ses fonctions au sein du parti, selon des sources à la Zanu-PF. M. Mugabe doit aussi à nouveau rencontrer dans la journée des représentants l’armée pour tenter de trouver une issue à la crise.
Mugabe rencontre l’état major de l’armée
Le président zimbabwéen, Robert Mugabe, a rencontré dimanche l’état-major de l’armée au lendemain de manifestations massives à Hararé et la deuxième ville du pays Bulawayo réclamant sa démission, a rapporté la télévision d’Etat. Les négociations entre Robert Mugabe et l’armée, engagées jeudi, se sont poursuies dimanche, a annoncé la télévision ZBC, en citant le prêtre catholique Fidelis Mokonori, l’un des médiateurs pour la crise zimbabwéenne. Le président a accepté de rencontrer le chef de l’armée, pour la deuxième fois depuis le début du coup de force militaire, après la première rencontre entre les deux hommes jeudi, en présence des envoyés spéciaux de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC). L’armée a pour sa part indiqué qu’elle dialoguait avec M. Mugabe sur la marche à suivre pour l’avenir. Parallèlement, le parti au pouvoir, la Zanu-PF, devra se réunir dans la journée pour discuter du « départ » du président Robert Mugabe, assigné à résidence par l’armée. Le comité central du parti doit se réunir pour décider de son sort. « Nous nous réunissons pour endosser les décisions des neuf provinces » du pays, a déclaré à l’AFP un haut responsable du parti. La veille, le Zimbabwe a connu l’une des plus grandes manifestations jamais organisées depuis l’indépendance et l’arrivée au pouvoir de Robert Mugabe en 1980. Des dizaines de milliers de Zimbabwéens se sont rassemblés, dans une ambiance festive, pour exiger son départ, selon des images rapportées samedi soir par la télévision. Les manifestations organisées dans la capitale et la deuxième ville du pays, Bulawayo (sud-ouest), ont rassemblé des citoyens de tout bord politique: des ministres, des proches du parti au pouvoir, la Zanu-PF, mais aussi de l’opposition. Les manifestants ont salué l’intervention de l’armée qui a pris le contrôle du pays dans la nuit de mardi et à mercredi et assigné à résidence le président Mugabe, au milieu de portraits du chef d’état-major, le général Constantino Chiwenga. A Harare, l’armée, qui a officiellement apporté son soutien à cette journée anti-Mugabe, a stoppé en début d’après-midi des milliers de personnes qui se dirigeaient vers le palais présidentiel. La foule s’est finalement dispersée dans le calme, entourée de militaires. L’intervention de l’armée constitue un tournant dans le pays en proie à une grave crise économique. Environ 90% de la population active est au chômage. A 93 ans, Robert Mugabe, se retrouve selon les médias de plus en plus isolé : après l’armée et les anciens combattants, neuf des dix sections régionales de la Zanu-PF ont demandé vendredi soir son départ. Dans la nuit de mardi à mercredi, l’armée était intervenue à Harare en soutien à Emmerson Mnangagwa, limogé une semaine plus tôt de son poste de vice-président. Le nom d’Emmerson Mnangagwa, surnommé le « crocodile », circule désormais pour prendre la direction d’une éventuelle transition politique. Plusieurs manifestants brandissaient samedi son portrait et des objets en forme de reptile, devenu le symbole de cette « révolution de palais », selon les médias. Ils avaient répondu à l’appel des anciens combattants du Zimbabwe – acteurs « incontournables » de la vie politique – et de mouvements de la société civile, dont le mouvement ThisFlag du pasteur Ewan Mawarire, une des têtes d’affiche de la fronde anti-Mugabe en 2016, réprimée par les forces de sécurité.