Emmanuel Macron a proposé ce statut qui ne se fera pas, dit-il, sans l’État ni contre l’État. Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire ? Le Président Macron applaudi par l’Assemblée de Corse à majorité nationaliste. Pour le président de la République, le moment est historique.
En effet, pour la première fois, il évoque un changement de statut de l’île de beauté. «Ayons l’audace de bâtir une autonomie à la Corse dans la République», affirme-t-il.
Qu’est-ce que ça changerait ?
Emmanuel Macron a donné six mois aux groupes politiques et à l’Assemblée territoriale pour arriver à un accord. Mais être autonome, cela ne veut pas dire être indépendant. La Corse appartiendrait toujours à la France. L’État conserverait ses compétences dans certains domaines, comme la police, la justice ou encore l’armée. L’île pourrait fixer ses propres règles en matière de logement, de santé ou encore d’éducation en donnant, par exemple, plus d’importance à la langue corse, une perspective qui divise les habitants. «Qu’on nous fasse confiance, on est à même de gérer au mieux notre territoire parce qu’on connaît la population, les problématiques», nous explique un habitant. «Cela ne changera pas grand-chose», selon une autre. La Corse est française politiquement depuis fort longtemps, juridiquement depuis moins longtemps, et culturellement depuis peu de temps. Elle l’est politiquement depuis fort longtemps, car l’action des Corses en France, et en faveur de la France remonte bien avant que nombre de provinces, aujourd’hui considérées comme des parts importantes et constitutives du pays, ne soient rattachées à l’entité française. Tout d’abord du fait de Marseille, véritable ville corse, à tel point que les premiers échevins de la cité sont quasiment tous corses du XVIe siecle à la veille de la Révolution. Quand les rois visitent la ville, c’est chez les insulaires qu’ils sont donc hébergés, à l’instar de Louis XIV en 1660. En dehors, nombre de familles de l’île servent le Roi sur terre et sur mer. Quand Louis XII occupe la Sérénissime république de Gênes, en 1507, c’est à l’insulaire Giacomo Corso qu’il confie le commandement du corps d’occupation, et ce, alors que la Corse était sous l’autorité de Gênes. Son neveu, Sampiero, un militaire, fut capitaine de Francois Ier puis colonel d’Henri II et chef du régiment corse au service du Roi. Il est le principal artisan de la première Corse française, entre 1553 et 1559. Durant ces quelques années, l’île passe sous le giron français. Cette administration par le roi de France fut possible du fait que l’île fut conquise par un insulaire et son armée, avec un solide appui au sein de la population. À cette époque, cette dernière pense s’être débarrassée définitivement de la tutelle génoise et avoir intégré, par sa volonté, le royaume de France. En vertu de la paix du Cateau-Cambrésis entre Philippe II et le roi de France, ce dernier rend la Corse à la République génoise, et à sa vindicte. L’abandon fut vécu douloureusement, car cet intermède fut considéré comme heureux au sein du peuple. Deux siècles plus tard, l’un des plus importants textes révolutionnaires corses, écrit par Don Gregorio Salvini et co-signé par Pasquale Paoli, résumait tout : «La bataille de Saint-Quentin [qui eut pour conséquence l’abandon de l’île], si elle fut un malheur pour la France, fut un désastre pour la Corse […]. Les Corses ont traîné, deux siècles durant, une chaîne ignominieuse au seul motif qu’ils s’étaient ralliés à la France, qu’ils lui avait obéi, qu’ils avaient combattu à son service, même sans solde, contre la République [de Gênes], pour soutenir les engagements et les intérêts du Très Chrétien Henri II, guerre qui leur coûta tant de sang, d’incendies et de désolation.» La Corse est depuis des siècles impliquée dans la construction de la France, sans pour autant en faire partie juridiquement.