2e version: «Bien informés, les Algériens sont des citoyens, mal informés, ils deviennent des sujets»

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1- L’Algérie de la période des Numides à la période romaine

L’Algérie a été peuplée, dès l’aube des temps.

Les vestiges de la présence humaine en Algérie remontent à 400 000 ans, âge attribué aux restes de l’Atlanthrope, découverts dans les sédiments du lac préhistorique Ternifine, en Oranie. Atlanthrope est un contemporain du Sinanthrope et du Pithécanthrope de Java. Des ossements ont été retrouvés au milieu des outils de pierre taillée qu’il fabriquait. Des outils du même type ont été retrouvés sur d’autres sites attestant la présence de l’homme primitif. En Algérie, on assiste, d’une façon frappante, au voisinage immédiat de l’histoire et de la préhistoire. Hérodote et Saluste portent témoignage sur les formes maghrébines de la civilisation néolithique. Il faut souligner, que c’est au Sahara, que la civilisation néolithique a connu ses plus belles réussites avec une perfection technique inégalée, comme en témoignent les peintures du Tassili-N’Ajjers, du Tassili du Hoggar avec les pierres taillées et polies, comme on peut en voir dans la magnifique collection du musée du Bardo. A l’aube de l’histoire, l’Algérie était peuplée par les Numides qui gardèrent, de la civilisation primitive, la famille Agnatique et l’Aguellid. Il est probable que c’est cette organisation sociale que trouvèrent les Carthaginois, à leur arrivée, au IXe siècle av. J.-C. Les Phéniciens fondèrent Carthage vers l’année 814 av. J.-C. et poussèrent leurs bateaux jusqu’en Espagne. Mais la côte africaine de la Méditerranée était très hostile : de nombreux récifs et de hauts-fonds rendaient la navigation très difficile. D’est en ouest, la côte algérienne abritait des comptoirs qui sont devenus : Annaba, Skikda, Collo, Jijel, Béaïa, Dellys, Alger, Tipasa, Cherchell, Ténès, Bethioua, près d’Arzew, Ghazaouet, comptoirs qui seront plus tard les assises des villes puniques, numides et romaines. Carthage étend son influence sur les populations de l’intérieur, à travers les relations commerciales. Ainsi, apparurent des villes, où l’influence punique est incontestable. Alors que Carthage rayonnait de toute sa puissance, les Royaumes numides de Gaia, Massinissa et Syphax, avaient atteint un degré de développement exceptionnel sur les plans économique, social et culturel. Bien que peu, ou encore mal connue, cette période reste l’une des plus passionnantes de l’Histoire de l’Algérie. Au plan politique, la Numidie connut des tribus indépendantes, des républiques villageoises, de vastes royaumes dotés d’un pouvoir fort qui s’est superposé aux structures tribales. Quand la Numidie réapparut au IVe siècle av. J.-C., elle formait au couchant, le royaume des Massaesyles limité par l’Ampsaga (Rhumel) à l’est et par la Moulouya à l’ouest, avec Siga pour capitale et le royaume des Massyles dans la partie orientale du Constantinois, avec Cirta pour capitale. Hérodote rapporte que des relations commerciales se développèrent très tôt entre Phéniciens et Numides, favorisant ainsi la pénétration de la langue et de la culture puniques assez profondément dans le pays. Les Numides apprirent aux Phéniciens les procédés agricoles et industriels avec la fabrication de l’huile d’olive, du vin, l’exploitation et le travail du cuivre. L’influence culturelle, par contre, fut très limitée et s’exerça essentiellement par l’intermédiaire de Carthage. Elle ne se manifesta que dans le domaine de l’art, dont nous retrouvons des exemples dans les grands médracens de l’Aurès et de Tipasa. Au cours des années qui suivirent cette guerre, la puissance carthaginoise s’affaiblit, ce qui permit au roi des Massyles, Gaïa, grand père de Massinissa, d’entreprendre la conquête des villes côtières, dont Hippo-Régius, qui devint sa capitale, en chassant les Carthaginois. Pendant la deuxième guerre punique (218-202) av. J.-C.) Romains et Carthaginois se disputèrent avec acharnement l’alliance des royaumes numides. Alliée à Hannibal, la cavalerie numide parvint à envahir l’Iberia, la Gaule, traversant les Pyrénéees, puis les Alpes, contribuant à remporter en 216 av. J.-C. la bataille de Cannae, la plus célèbre victoire des troupes d’ Hannibal, demeurée, à ce jour, dans les annales militaires, comme un exemple de stratégie et de tactique. Lors de son couronnement, Massinissa avait 36 ans. Né en 238 av. J.C., il régna pendant 54 ans jusqu’à sa mort en 148 av. J.-C. Pendant son long règne, il entreprend la construction d’un Etat unifié et monarchique. D’abord il s’attacha à sédentariser les populations et transforma les pasteurs nomades en agriculteurs. Il favorisa l’urbanisation de la Numidie, poussant les cultivateurs à former de gros bourgs, auxquels il donna une organisation semblable à celle des villes puniques. Massinissa qui regardait avec intérêt l’Orient grec, avait accepté la forme de civilisation que six siècles, placés sous l’influence de Carthage, elle-même hellénisée au cours des deux derniers siècles, avaient apportée aux élites Numides. Le projet politique le plus cher à Massinissa fut l’unification de tous les royaumes numides. La récupération des terres ayant appartenu à ses ancêtres lui permit d’introduire de nouvelles méthodes dans des domaines aussi variés que l’agriculture, l’hydraulique et la culture en terrasses. Pour mieux assurer sa puissance, il voulut diviser la monarchie et établir le culte de la divinité royale. Au plan militaire, son pouvoir, aussi, fut considérable : il entretint une puissante armée et une flotte importante. Sur le plan économique, la Numidie occupe, pendant son règne, une place prépondérante dans l’économie mondiale de l’époque. Sa gestion fit de son pays un Etat très prospère qui commerçait avec la Grèce et Rome. Cirta en fut la capitale où à cette époque l’actuelle Europe vivait encore dans l’indigence. Dans son œuvre d’unification, il empiéta sur le domaine de Carthage, qui lui déclara la guerre. Massinissa en sortit vainqueur.

La puissance grandissante de Massinissa en Afrique inquiéta Rome, au point qu’en déclarant la guerre à Carthage en 149 av. J.-C., elle visait aussi Massinissa. En détruisant Carthage en 146 av. J.C. et en créant la première colonie romaine en Afrique, Rome mettait une limite à l’extension territoriale de la Numidie et au renforcement de son pouvoir économique et politique. L’occupation romaine de l’Afrique du Nord, à partir de Carthage, se fit par trois axes principaux : Le premier, suit la côte de la Tunisie du nord au sud, puis vers l’est en passant par la Libye. Le second, qui va d’est en ouest, suit la ligne du plateau intérieur, nettement en arrière des massifs côtiers. Le troisième, en diagonale nord-est et sud-ouest, représente la voie de pénétration vers la frontière sud et vers l’Aurès par Ammaedara (Haïdra, Tunisie), Thevesti (Tebessa), Thamugadi (Timgad), et enfin Lambaesis (Lambèse). Trois de ces villes furent les bases de la légion romaine, qui occupa Ammaedara sous le règne d’Auguste. En l’an 75, elle s’installa à Thevesti, en 81 à Lambaesis, qui devint par la suite son siège définitif avant d’être la capitale de la Numidie. La Numidie est un territoire militaire, dont le commandement est installé à Lambèse ; elle deviendra une province indépendante de la Proconsulaire en 198. A partir de 126, des voies de pénétration l’aideront à progresser par les pistes du Sud, mais elle se rétrécit vers le nord : Hippo Régius (Hippone) est en Proconsullaire, Igilgili (Jijel) et en Maurétanie Sétifienne. La côte de Numidie a deux ports : Rusicade (Skikda) et Chullu (Collo). Le reste de l’Algérie forme la Maurétanie Césarienne. La Maurétanie était gouvernée à partir de Césarée (Cherchell). Sa frontière est plus méridionale, loin des monts du Hodna. Au-delà de cette bande côtière, les populations numides continuent à suivre leur mode de vie, et à se battre contre l’occupation romaine. Si la sédentarisation s’est faite au temps des Phéniciens et des Royaumes numides, c’est l’urbanisation qui constitue la base de l’empire romain. Le nombre et la splendeur monumentale des cités romaines que révèlent les imposantes ruines de Timgad, Lambèse, Djemila-Cuicul, Tiddis, Tipasa témoignent du rôle joué par les Cités africaines. Dans le monde, seules deux villes, demeurent intactes et témoignent de la perfection urbanistique des cités romaines : Pompéi, en Italie, ensevelie et sauvegardée par les cendres du Vésuve, et Timgad en Algérie, ensevelie et sauvegardée par le sable du désert. Les Berbères, christianisés par Rome résistèrent de façon différenciée à la chute de Rome, puis des Vandales et l’instabilité durant la période byzantine. Certains s’enfuient en Sicile. D’autres, notamment dans les Aurès, vont résister à l’arrivée des musulmans entre 670/702. Cette période a entraîné la reconstitution de plusieurs principautés berbères. De nombreux Berbères se convertissent ensuite en masse à la religion musulmane. La conquête musulmane de l’Espagne et du sud de la France qui s’ensuivit fut menée par un contingent arabo-berbère comptant beaucoup de convertis.

2 – De la période du kharidjisme à la dynastie des Almohades

Durant le kharidjisme amazigh de 736/947, les Imazighen ne tardent pas à se révolter contre l’autorité du calife d’Orient, autant pour des raisons fiscales que politiques. Plusieurs royaumes amazighs autonomes font leur apparition. Dans le Maghreb central, l’un d’eux, la principauté de Tahert se développe durant 140 ans. À la suite du grand schisme de l’islam, lorsque Ali, gendre du prophète disputant le califat à Muawiya accepta une transaction, à la suite de laquelle Muawiya fut vainqueur. L’islam se divisa alors en deux branches principales : les adeptes de la branche dominante prirent le nom de sunnites et ceux qui se réclamaient d’Ali devinrent les chiites. La branche qui prévalut en Afrique du Nord est le sunnisme. Quant au kharidjisme, il disparut entièrement de l’Afrique du Nord où il n’a subsisté que dans le Sud algérien, au Mzab, les actuels originaires du Mzab, ou mozabites exerçant dans le reste de l’Algérie, les activités pacifiques, notamment le commerce contrastant particulièrement avec le goût pour le combat de leurs ancêtres. Vient la dynastie rostémide de 776/909, Ibn Rustom prenant comme épouse une femme berbère des Banou Ifren. Il fonde en 761 un royaume ibadite dans le nord du Maghreb avec Tabert pour capitale. Celui-ci, comme l’émirat de Cordoue depuis sa création en 756, conserve son indépendance du califat des Abbassides, malgré les pressions diplomatiques et militaires ainsi que les pertes de territoires. En 909, en proie à des crises intérieures, le chef chiite et fondateur de la dynastie des Fatimides, Obeid Allah, mit fin au royaume rostémide. Pour la dynastie Idrisside de 788/985, Idriss prend comme épouse une Berbère et eu un enfant, Idriss II. Deux versions des faits existent : selon la première, Abou Ourra invite Idriss vers 790 à séjourner à Tlemcen. Selon la deuxième version, Idriss regroupe ses alliés et fait une incursion à Tlemcen. Le chef des Maghraouas Mohamed Ibn Khazer fait allégeance à Idriss vers 790. Idriss va combattre les kharidjites et les Aghlabides, lorsqu’il prend le pouvoir au Maghreb. La dynastie Ifrenide ayant régné de 790/1066 est anciennement établie dans leur royaume de Tlemcen. Les Banou Ifren sont des opposants à tous les régimes idéologiques. Ils choisissent d’être sufrites berbères au début VIIe siècle.  Abu Yazid, vers 942, est le chef de la révolte contre les Fatimides. Mais, vers 947, il est tué et les Banou Ifren organisent une lutte contre les Fatimides.

Les Banou Ifren reprennent leurs territoires et contrôlent tout l’ouest du pays. Yala Ibn Mohamed détruit complètement Oran et choisit Ifgan comme capitale militaire. Les Fatimides font ensuite alliance avec les Banou Ifren. Des luttes acharnées entre les trois dynasties (Maghraouas, Ifreides et Zirides) débutent pour le pouvoir du Maghreb. Il en ressort que les Banou Ifren ne cèdent pas face aux deux dynasties et Tlemcen reste leur capitale. La dynastie Banou Ifren s’achève dès l’arrivée des Hilaliens et des Almoravides au Maghreb. Vient ensuite la dynastie Aghlabide de 800/909. En 800, le calife abbasside Haroun ar-Rachid délègue son pouvoir en Ifriqiya à un gouverneur arabe du Zab, Ibrahim Ibn Al-Aghlab, qui obtient le titre d’émir Al-Aghlab établissant la dynastie des Aghlabides, qui règne durant un siècle sur le Maghreb central et oriental. Le territoire bénéficie d’une indépendance formelle tout en reconnaissant la souveraineté abbasside, les émirs aghlabides prêtant allégeance au calife abbasside. Au début du Xe siècle, une nouvelle dynastie supplante les Aghabides et les Rostémides et dans le Maghreb central : les Fatimides de 909/  à 972. De doctrine chiite et pensant que le califat doit revenir à la descendance d’Ali, ils considèrent les khalifes Abbassides comme des usurpateurs. Aussi, dès sa prise de pouvoir en 909 à Raqqada, le premier représentant de cette dynastie, Ubayd Allah revêt le titre de Mahdi et celui de commandeur des croyants. Il constitue une armée parmi les Kutamas, et s’attaque aux Aghlabites dont il conquiert l’émirat en une quinzaine d’années (893-909). Cependant, les tribus berbères zénètes d’Abu Yazid en 944 s’emparent de Kairouan. Le chef berbère Ziri Ibn Menad, ayant réuni sous son autorité les tribus Sanhadja, met en déroute les tribus zénètes et sauve l’empire Fatimide. Il y gagne le poste de gouverneur du Maghreb central comme récompense de sa fidélité. Peu à peu, l’armée affaiblie des Fatimides se recompose, puisant toujours ses forces chez les Kutamas, mais aussi désormais en Perse et en Syrie. Ils parviennent finalement à se réimposer en maîtres du Maghreb occidental, avant de tourner leurs efforts armés vers l’Orient, pour aboutir à la conquête de l’Egypte en 969. À partir de ce moment, les Fatimides commencent à se désintéresser de leurs terres d’origine, les laissant au fur et à mesure tomber aux mains des Zirides à tel point qu’en 1060 la dynastie n’a plus pour territoire que l’Égypte. Le Maghreb a connu également la domination de la dynastie Maghraoua de 970/1068 et celle des Zirides de 972 à 1152. Les Maghraouas sont une tribu Zénète dont le royaume est dans le Chlef actuel. Les Maghraouas s’allient aux Fatimides puis aux Omeyyades mais finissent par former une dynastie indépendante avec pour capitale Oujda.

Les Maghraouas, grâce à Ziri Ibn Attia, prennent les principales villes de l’ouest : Tlemcen et les Zibans. Les Maghraouas envahissent la partie nord, le Maghreb el Aqsa (actuel Maroc), et choisissent Fès comme capitale. Les deux dynasties Zénètes se font la guerre. Plusieurs chefs des Maghraouas commandent la dynastie jusqu’à sa chute vers 1068. Quant à la dynastie ziride fondée par Bologhine Ibn Ziri, originaire de ces tribus berbères sanhadjas, elle règne sur l’Ifriqiya et une partie d’Al Andalus pendant environ deux siècles avec successivement Achir Kairouan et Mahdia pour capitales. En 1046, alors vassaux des Fatimides, les Zirides rompent totalement leurs relations : en reconnaissant les Abbassides comme califes légitimes, les Zirides montrent ouvertement aux Fatimides qu’ils abandonnent le chiisme. Pour réprimer les Zirides, les Fatimides envoient en 1052 les Hilaliens qui détruisent Kairouan en 1057. Mahdia devient alors la nouvelle capitale de l’empire. M.