Le vice-président du Conseil des ministres italien, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Antonio Tajani, en visite à Alger les O3/O4 mars 2O25 ayant souligné que «l’Algérie est un partenaire-clé pour la sécurité énergétique italienne et européenne dans une conjoncture historique particulièrement délicate au niveau international ».
Cependant, les relations entre l’Italie et l’Algérie dans le domaine économique rentre dans un cadre plus vaste qui est celui de l’ Afrique qui en ce XXIème siècle, continent de tous enjeux et des rivalités des grandes puissances et des nations émergentes. Après les sommets USA/Afrique, Chine /Afrique, Europe/Afrique, Russie/ Afrique , Turquie /Afrique, Japon/ Afrique et bien d’autres rencontres internationales similaires, s’est tenu le Sommet Italie-Afrique, l’Italie étant un des pays les plus touché par les flux migratoires, les 28 et 29 janvier à Rome, afin d’intensifier la de coopération autour d’un ambitieux programme d’investissements axé sur les échanges économiques avec le continent africain, appelé «plan Mattei pour l’Afrique», en présence de la présidente de la commission européenne, du président du Conseil européen, de la cheffe du FMI, du directeur général de la FAO, de responsables des principales agences des Nations unies et chefs d’Etat africains, de chefs de gouvernement et des ministres des affaires étrangères. L’Algérie a été représentée par le ministre des Affaires étrangères ce dans ce contexte , il me paraît utile d’analyser les perspectives de la coopération entre Alger et Rome en espérant des résultats concrets pour une prospérité partagée
1.-Situation de l’Italie : une économie performante
Les économies des Etats membres de l’UE représentent un PIB de 16 970 milliards d’euros en 2023 et l’économie allemande est de loin la plus importante de l’Union, avec un PIB de 4 122 milliards d’euros, suivie par celle de la France avec 2 803 milliards d’euros ; viennent ensuite l’Italie (2 085 milliards) et l’Espagne (1 462 milliards) Selon le site Touteleurope.eu , en termes de PIB par tête d’habitant l’Italie en 2O23 est classé en Europe 15eme avec 39OOO dollars , le premier étant l’Allemagne 54.OOO dollars et derrière la France 447OO et l’Espagne 335OO dollars. L’Allemagne reste le 1er partenaire commercial de l’Italie en 2023 (11,4% du total, -0,12 pts par rapport à 2022), devant la France (7,6% du total, -0,13 pts), les Etats-Unis (6,2%, -0,11 points) et la Chine (4,6%, -0,19 pts). Paradoxe du fait du conflit en Ukraine , certes la Biélorussie et l’Allemagne sont restés les principaux partenaires commerciaux de la Russie en Europe en 2024, mais l’Italie qui avant le conflit importait presque 5O% de ses besoins énergétiques de Russie , ayant été entre temps remplacé par l’Algérie, se hissera en 2O25 à la troisième place pour la première fois depuis 2015, selon les calculs de l’agence de presse Ria Novost Les destinations les plus courantes des exportations de l’Italie sont en 2O23, l’Allemagne avec 71,4 milliards de dollars ; suivi des USA 7O,9 milliards de dollars , la France 61,1 milliards de dollars , l’Espagne 3O,1 milliards de dollars et le Royaume Unis 29,5 milliards de dollars. Selon les dernières prévisions de la Commission européenne, la croissance économique italienne a atteint 0,9 % en 2023 et 0,8 % en 2024. L’économie italienne en 2023 a échappé à la récession que beaucoup lui prédisaient à l’été 2022 à la suite de la crise du gouvernement, marquée par la démission de Mario Draghi et l’arrivée de Giorgia Meloni à la fonction de Présidente du Conseil, porté par le dynamisme des PMI/PME innovantes , l’industrie ayant un poids important où la part de l’industrie dans la valeur ajoutée totale y atteint, en effet, 21,1 %, contre une moyenne de la zone euro de 20,2% , la France 14 %, le Portugal (17,1 %), l’Espagne (17,4 %) ou encore la Belgique 17,7 %. Les importations de biens en 2020 ont été de 422 milliards de dollars et de services 92 milliards de dollars, pour 2021, 409 milliards de dollars de biens et 101 milliards de dollars de services et pour 2023 les importations ont augmenté plus fortement (+35%) pour atteindre 783 Md€, soit 41% du PIB, la part des biens dans les échanges commerciaux étant largement majoritaire (84%) et en augmentation depuis 2019 (+4pp), les échanges de services étant plus marginaux s’élevant à 245 Md€ (en hausse de 32% sur l’année). Les exportations de biens ont été en 2021 de 409 milliards de dollars de biens et 99 milliards de dollars de services, en 2022, de 496,12 milliards de dollars et des services 86,53 milliards de dollars soit au total : 582,65 milliards de dollars et pour 2023, les exportations ont atteint 742 Md€, soit 38% du PIB, en hausse de 22% sur l’année. . Quant aux autres indicateurs macro financiers , l’Italie a fait preuve de rigueur budgétaire en 2024 où le déficit public a diminué davantage que prévu, à 3,4% du produit intérieur brut (PIB), Rome s’étant engagé à ramener le déficit public dès 2026 à 2,8% du PIB, en dessous du plafond de 3% fixé par le pacte de stabilité européen frôlant les 3.000 milliards d’euros, ses réserves de change estimées par la banque centrale d’Italie à 294 milliards de d’euros en janvier 2O25 contre 28O décembre 2O24 lui laissant une marge de manœuvre appréciable. Quant aux indicateurs macro sociaux les dernières données sur le marché du travail du gouvernement montrent que le taux de chômage a atteint son plus bas niveau en 16 ans étant estimé à 7,2% en janvier 2O24 et 6,2% en janvier 2O25 mieux que les 6,3 % de la zone euro. Quant aux d’inflation annuelle, il a atteint 1,5% en janvier 2O25 contre 1,3% durant les mois de novembre et décembre 2O24,selon les estimations préliminaires. Il s’agissant de la plus forte augmentation des prix à la consommation depuis octobre 2023, en grande partie due à une forte hausse des coûts réglementés de l’énergie mais se situant dans une fourchette raisonnable puisque le taux d’inflation annuel de la zone euro est estimé 2,4% en février 2O25 , contre 2,5% en janvier selon une estimation publiée par Eurostat. Malgré les incertitudes, l’Italie structurée autour de PME dynamiques dispose d’une solide industrie manufacturière spécialisée dans des niches à haute valeur ajoutée et intégrée aux chaînes de valeurs mondiales, la deuxième européenne après l’Allemagne.
2.-Quelles perspectives pour la coopération économique entre les deux pays ?
Pour 2O23 selon les statistiques douanières de l’Algérie concernant les partenariats commerciaux, la structure des échanges reste relativement stable. La Chine demeure le principal fournisseur de l’Algérie, avec une part de marché de 22,9 %, suivie de la France (11,7 %) et de l’Italie (7,4 %). En termes d’exportations, l’Italie, la France et l’Espagne demeurent les principaux clients de l’Algérie, avec respectivement 15,2 Mds USD, 7,6 Mds USD et 6,7 Mds USD. . En 2020, le volume global des échanges commerciaux entre l’Algérie et l’Italie avait atteint près de 6 milliards de dollars (USD), dont 3,5 milliards USD d’exportations algériennes vers l’Italie (notamment des hydrocarbures) et 2,42 milliards USD d’importations de ce pays (des équipements surtout). Pour 2021, elles ont connu un accroissement s’établissant à 8,5 milliards de dollars, dont 6,6 milliards de dollars d’exportation de l’Algérie et en 2024,les exportations vers l’Italie ont représenté 24,4% des échanges extérieurs . Côté importations, l’Italie est le troisième fournisseur de l’Algérie, avec une part de marché de 6,6% sur la même période mais les échanges commerciaux entre les deux pays ont connu une légère baisse par rapport à 2023, avec un volume total de 12,5 milliards d’euros entre janvier et novembre 2024, contre 15,5 milliards l’année 2O23. Plus précisément, selon la source officielle algérienne, l’agence APS, en 2024, le gaz naturel a représenté 85,3% des exportations algériennes vers l’Italie, pour une valeur de 8,48 milliards d’euros. À cela s’ajoutent les produits pétroliers raffinés (897 millions d’euros) et le pétrole brut (388 millions d’euros).L’Italie a importé d’Algérie des produits chimiques, du fer, de l’acier, du ciment et divers matériaux de construction et a exporté vers l’Algérie des véhicules (257 millions d’euros), des machines industrielles (500 millions d’euros) et des produits issus du raffinage du pétrole (229 millions d’euros). Aussi c’est le secteur des hydrocarbures qui occupe une place importante dans les relations économiques algéro-italienne grâce notamment au partenariat entre le Groupe Sonatrach et le groupe énergétique italien Eni, présent depuis 1981 en Algérie et se posera cette question à l’avenir la positon de l’Italie vis-à-vis du gaz russe, si un accord de paix est conclu entre la Russie et l’Ukraine étant par le passé le principal client avec des prix préférentiels où l’essentiel du gaz russe livré à l’Italie passait par l’Ukraine, à travers le gazoduc TAG qui arrive à Tarvisio dans le nord du pays, à la frontière avec l’Autriche.. Les deux Groupes gèrent le Gazoduc TransMed, aussi appelé Enrico Mattei, reliant l’Algérie à l’Italie via la Tunisie, d’une capacité d’un volume allant jusqu’à 32/33 milliards de mètres cubes de gaz algérien fonctionnant actuellement en surcapacités, vers l’Italie, ayant exporté en 2021 environ 21 milliards de mètres cubes gazeux à travers cette canalisation avec un surplus de 2 à 3 milliards de mètres cubes gazeux entre 2O22/2O23 suite à différents accords.. Selon les données de l’Institut italien des statistiques (Istat), Pugliese 40% de la consommation italienne de gaz provient de l’Algérie et les volumes de gaz exportés selon les accords d’entente Italie/Algérie devraient augmenter dans les années à venir . Mais sous réserve d’investissements additionnels, à la faveur de l’accord signé, le 11 avril 2022 à Alger par les Pdg des groupes Sonatrach et le groupe Eni, qui est devenu un des plus important investisseur étranger dans le domaine gazier en Algérie Il est prévu, outre les interconnexions électriques et la production d’hydrogène, l’activation du projet Galsi gelé depuis 2012, qui devait approvisionner la Sardaigne et la Corse d’une capacité de 8 milliards de mètres cubes gazeux et d’un coût estimé en 2010 à 3 milliards de dollars (voir conférence du Pr Mebtoul en 2012- Tv France 3 Corse sur ce sujet lors d’une tournée en Sardaigne pour défendre ce projet). .Et sans compter le projet NIGAL – Nigeria – Niger- Algérie -Europe d’une capacité de 33 milliards de mètres cubes gazeux s’il venait à se réaliser ce qui augmenterait les capacités d’exportations vers l’Europe via l’Italie dont l’étude rentabilité est en cours.
3.- Intensifier la coopération bilatérale
L’objectif stratégique entre l’Algérie et l’Italie sera de diversifier la coopération économique et sur le plan politique de consolider davantage les réalisations bilatérales avec l’objectif commun de promouvoir une plus grande stabilité et prospérité dans la région méditerranéenne. C’est dans ce cadre que responsables algériens et italiens ont exprimé récemment le souhait de voir la coopération bilatérale entre Alger et Rome se diversifier. L’Algérie est prête à accroître ses exportations en direction de l’Europe mais il appartient aux Européens de venir investir en Algérie, dont l’Italie tant dans les hydrocarbures traditionnels que dans les énergies renouvelables et l’hydrogène vert un des axes de la stratégie énergétique de l’Algérie est le développement de l’investissement dans les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique ambitionnant de couvrir la consommation intérieure de 40% à partir des énergies renouvelables horizon 2030/2035, d’exporter vers l’Europe à travers des interconnexions et exporter également l’hydrogène vert pour couvrir les besoins de l’Europe d’environ 10/15% horizon , étant souhaitable que l’annonce du câble électrique sous-marin reliant l’Algérie à la Sardaigne, un projet stratégique, soit alimenté par les énergies renouvelables. D’une manière générale, avec la présence entrepreneuriale italienne en Algérie outre les hydrocarbures, un nombre dépassant les 200 entreprises italiennes en activité dans grands travaux publics, l’industrie, les équipements et le machinisme, l’objectif sera de diversifier la coopération économique : pas seulement dans l’énergie, mais surtout d’impulser les segments hors hydrocarbures, dont les infrastructures, les PME, l’innovation technologique (donc le savoir pilier du XXIème siècle avec bonne gouvernance), l’agro-industriel et les télécommunications.. La coopération entre l’Algérie et l’Italie ne concerne pas seulement le volet hydrocarbures mais d’autres secteurs comme récemment les projets industriels et agricoles, mais également les volets politiques, sécuritaires et culturels. Sur le plan économique, l’Italie a une longue expérience d’intégration de la sphère informelle, qui était dominante par le passé, au sein de la sphère réelle et est également un vivier d’expériences pour la dynamisation des PMI/PME et peut être bénéfique pour l’Algérie dans le cadre de ses réformes structurelles, déterminantes entre 2025-/2030. Sur le plan politique, il s’agira de consolider davantage les réalisations bilatérales avec l’objectif commun de promouvoir une plus grande stabilité et prospérité dans la région méditerranéenne En bref, puisse la coopération Italie Afrique , contribuer à faire des espaces euro-africains un lac de paix et une prospérité partagée.






