On peut accuser nos joueurs de tous les maux. Ce sont des piètres footballeurs, des «peintres», des pieds carrés, ils s’expriment mal en public, etc. Mais il y a une chose dans laquelle ils excellent, ce sont de fins négociateurs, ils savent comment défendre leurs intérêts. Profitant de leur renommée surfaite ou pas et de la concurrence entre les clubs sur le marché des transferts, ils imposent leur loi lors de la signature du contrat.
Ce sont eux ou leurs agents qui mènent les discussions. Les dirigeants sont souvent contraints d’accepter leurs conditions pour ne pas les voir filer chez le concurrent. Une surenchère qui a créé une bulle inflationniste rendant tous nos clubs vulnérables et dépendants sur le plan financier, mais pas seulement. Ils ont surtout appris à glisser un avenant qui leur permet de se libérer de leur contrat au cas où ils sont sollicités à l’étranger. Le club, dans ce cas, est dans l’obligation de les laisser partir sans contrepartie. On a eu deux exemples édifiants à ce propos, ces derniers jours avec les joueurs du MCA, Azzi et Bendebka. Deux tauliers qui ont pris la tangente au moment où leur équipe avait le plus besoin de leurs services. Il est vrai que l’amour des couleurs est un thème révolu, tombé depuis longtemps en désuétude, mais dans ce cas on peut parler de fuite des responsabilités.
C’est irrespectueux de quitter son club dans ces conditions le laissant dans une situation exécrable. Mais visiblement, ils n’en ont cure. Dès que les sirènes du Golfe ont appelé, ils ont couru sans regarder derrière eux, les valises déjà faites. C’est à croire que c’est un coup prémédité. Mais peut-on les incriminer pour ça. Ils n’ont fait que profiter d’une conjoncture de précarité extrême et de la faiblesse de nos dirigeants. Personne, en effet, ne leur a mis le couteau sous la gorge pour accepter ce genre d’accord humiliant pour eux et pour leurs clubs. S’ils ne se respectent pas eux-mêmes, aucun autre ne va le faire à leur place. D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle, le marché algérien est devenu un terrain de prédation où il n’y ni foi, ni loi. Les Tunisiens se permettent de venir débaucher nos jeunes talents sans aucune gêne, sans payer le moindre kopeck à leurs clubs formateurs. Ce qui se passe chez nous en matière de transferts n’obéit à aucune norme. On est loin des standards internationaux qui régissent ce genre de transactions. Les étrangers profitent du champ libre et de la déliquescence de nos clubs pour venir carrément les piller au vu et au su de tout le monde. Il semble même qu’il y ait une complicité à l’intérieur pour faciliter le travail.
A cette allure, on n’aura plus de joueurs valables dans le championnat, puisque même les jeunes espoirs n’échappent pas à l’appétit vorace des recruteurs étrangers. Pendant ce temps, nos responsables, derrière leurs bureaux, réfléchissent à la révision des statuts des Ligues, du code disciplinaire et des règlements du football professionnel. Ne voient-ils qu’il y a un danger plus urgent qui guette notre football. Celui de la dilapidation de nos clubs qui risque de les mettre définitivement hors circuit.
Ali Nezlioui