Les manifestants soudanais ont continuaient lundi a occuper les alentours du quartier général de l’armée à Kahrthoum, afin de solliciter le soutien de cette dernière dans ce qu’ils appellent « l’éjection » du président Omar el- Bachir du poste du président qu’il occupe depuis maintenant 30 ans.
Munis de pancartes et de banderoles, les manifestants -déjà sur place depuis samedi-, scandaient à voix déployée des slogans hostiles au régime de Omar el-Bachir, l’appelant notamment à démissionner sans délais. L’armée soudanaise qui a laissé faire les manifestants durant les deux derniers a déployé lundi ses troupes autour de son quartier général leur demandant de disperser les foules. Pour ce faire, ces dernières ont usé, selon des témoins, des tirs de gaz lacrymogènes et de la violence. « Plus tôt dans la matinée, des véhicules transportant des membres du NISS et de la police anti-émeute avaient également pris position près du siège de l’armée. Les forces de sécurité « ont commencé à tirer des gaz lacrymogènes sur les manifestants », ont rapporté plusieurs médias citant des témoins. « Les forces de sécurité tentent de disperser le sit-in par la force », a indiqué lundi l’Alliance pour le changement et la liberté dans son communiqué rendu public. « Les militaires ont installé aussi des barricades le mon de plusieurs rues à proximité du QG de l’armée afin d’empêcher des véhicules de s’approcher », ont affirmé en outre des témoins. Depuis l’éclatement de la contestation au Soudan le 19 décembre, l’armée ne s’est pas immiscée dans la répression, menée par le puissant service de renseignement (NISS) et les forces de police anti-émeute. Pour protéger les manifestants, les initiateurs de la contestation ont appelé les habitants de la capitale et des environs à se joindre aux manifestants et protéger les manifestants. « Nous appelons toutes les personnes de Khartoum et des environs à se rassembler pour protéger les manifestants sur le terrain », ont-ils écrit. Les manifestations de ces derniers jours ont coïncidé avec des coupures d’électricité dans tout le pays, que le ministère de l’Electricité attribue à un problème technique. Le président Omar el-Bachir qui avait jugé légitimes les revendications des manifestants, ne s’est pas empêché pour autant d’instauré l’état d’urgence dans tout le pays depuis le 22 février. La mobilisation avait depuis d’ailleurs nettement baissé avant la journée de samedi, date qui marquait l’anniversaire de la révolte du 6 avril 1985, qui avait permis de renverser le régime du président Jaafar al-Nimeiri.
L’appel au changement « doit être entendu »
Déclenchées le 19 décembre suite à la décision du gouvernement de tripler le prix du pain dans un contexte économique difficile, les manifestations se sont rapidement transformées en mouvement de contestation contre M. Béchir, qui dirige le pays depuis un coup d’Etat en 1989. Les manifestations qui ont été violemment au début par les forces de l’ordre ont fait selon l’ONG Human Rights Watch (HRW) 51 morts. L’attitude de Omar el- Bachir a fait, pour rappel, réagir l’Union européenne. « Le peuple soudanais a montré une résilience remarquable face aux obstacles extraordinaires auxquels il a été confronté ces dernières années », a affirmé dimanche l’Union européenne qualifiant les rassemblements des deux derniers jours de « sans précédent ». L’UE attend que le Soudan réponde à « l’appel au changement » par un engagement à mener des « réformes essentielles », a-t-il ajouté. Le Soudan, amputé des trois quarts de ses réserves de pétrole depuis l’indépendance du Soudan du Sud en 2011, est confronté à une inflation de près de 70% par an et fait face à un grave déficit en devises étrangères. En poste du président depuis 1989, Omar el-Bachir compte parmi dont la longévité est la plus longue au monde.