Révision de l’Accord d’Association Algérie-Europe: Vers un stand-by ? 

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L’Accord d’association Algérie-UE en vigueur depuis le 01 septembre 2005 est, pour le moins qu’on puisse dire, en stand-by, l’Algérie , qui s’estime lésée, avait demandé depuis plusieurs années sa révision, afin d’asseoir une meilleure base d’échanges mutuellement bénéfique. Les agences de presse internationales Reuters et AFP ont annoncé le 14 juin 2024 que Bruxelles risque d’ouvrir une procédure contre l’Algérie, accusée de restreindre depuis 2021 les exportations et investissements de l’Union européenne (UE), menaçant de recourir à l’arbitrage international, et a réclamé des consultations avec les autorités du pays.

Malgré des discours rassurants de l’ambassadeur de l’union européenne à Alger durant le premier semestre 2O25, , les  tensions actuelles avec la France pilier dz l’Union européenne avec l’Allemagne  ne vont pas faciliter les négociations où en plus  selon  mes contacts avec des experts à Bruxelles s’occupant de ce dossier,  comme je l’ai souligné dans de nombreuses contributions depuis des années, qu’il n’est pas question de modifier l’accord cadre mais seulement certaines dispositions( mebtoul Google 2O16-2O24). Comme l’Algérie devra être attentive aux nouvelles mutations énergétiques mondiales (transition énergétique et numérique) et  à une éventuelle augmentation des exportations russes  et américaines  en hydrocarbures vers ‘l’Europe entre 2025-2O3O sans compter les nombreux gisements découverts en Afrique

1-Les principes de l’Accord d’association sur le plan économique sont identiques à ceux que l’on retrouve avec les règles de l’OMC dont les pays membres accaparent plus de 95 % du commerce mondial et parmi lesquels se trouve la majorité des pays de l’OPEP et hors OPEP ainsi que la Chine et la Russie. L’Algérie qui a déposé sa demande d’adhésion (à l’époque au GATT) en juin 1987 et depuis elle n’est toujours pas entrée à l’OMC. Il y a lieu de préciser que les principales résolutions de la quatrième Conférence ministérielle, tenue à Doha, en novembre 2001, a examiné les problèmes que rencontrent les pays en développement pour mettre en œuvre les Accords actuels de l’OMC, c’est-à-dire les accords issus des négociations du Cycle d’Uruguay. La décision sur la mise en œuvre a porté au titre de la balance des paiements avec des conditions moins rigoureuses énoncées dans le GATT. Cela est applicable aux pays en développement s’ils restreignent leurs importations pour protéger l’équilibre de leur balance des paiements. Du point de vue de l’Accord d’association, l’on devra distinguer les incidences générales des incidences sur les services énergétiques. En ce qui concerne les incidences générales : l’interdiction du recours à la « dualité des prix » pour les ressources naturelles, en particulier le pétrole (prix internes plus bas que ceux à l’exportation) ; l’élimination générale des restrictions quantitatives au commerce (à l’import et à l’export) ; obligation de mettre en place les normes de qualité pour protéger la santé tant des hommes que des animaux (règles sanitaires et phytosanitaires). Les conséquences de tels accords sont : le démantèlement des droits de douanes et taxes pour les produits industriels et manufacturés sur une période de transition ; les relations de partenariat entre les deux parties seront basées sur l’initiative privée. Tous les monopoles d’Etat à caractère commercial sont ajustés progressivement pour une période à négocier. La coopération économique devra tenir compte de la composante essentielle qu’est la préservation de l’environnement et des équilibres écologiques. En ce qui concerne les incidences sur les services énergétiques, l’Algérie se doit d’être attentive à la nouvelle stratégie énergétique qui se dessine entre 2025/2030 tant au niveau européen qu’au niveau mondial. Les accords dont il est question devraient faire passer les industries algériennes du statut d’industries protégées à des industries totalement ouvertes à la concurrence internationale. Ces accords prévoient la suppression progressive des obstacles tarifaires et non tarifaires, avec d’énormes défis aux entreprises algériennes . Si ces accords ne peuvent avoir que peu d’impacts sur le marché des hydrocarbures en amont, déjà inséré dans une logique mondiale , il en va autrement de tous les produits pétroliers à l’aval qui vont être soumis à la concurrence européenne et internationale. Ainsi, est interdite la dualité des prix, mesure par laquelle un gouvernement maintient des prix internes à des niveaux plus bas que ceux qui auraient été déterminés par les forces du marché. Autre incidence, l’ouverture à la concurrence du marché des services énergétiques qui concernent toutes les activités et l’urgence d’intégrer la sphère informelle dominante en Algérie qui contrôle selon les données officielles fin 2023  plus de 33% de la masse monétaire en circulation  faussant la concurrence. Enfin, pour l’environnement, l’Algérie doit s’engager à mettre en œuvre les différentes recommandations contenues dans les chartes sur l’énergie.

2.- Les négociations entre l’Algérie et l’Europe concernant l’Accord d’association ont connu des divergences qui se sont accentuées suite aux décisions du gouvernement courant 2009 de postuler 51 pour cent aux Algériens dans tout projet d’investissement.  Selon Bruxelles, la part de l’UE dans les importations de l’Algérie a régressé au bénéfice de la Chine. Pour l’Algérie, de 2010 à fin 2024, existe un déséquilibre commercial en défaveur de l’Algérie  concernant  les segments hors hydrocarbures. Pour Bruxelles , pour toute évaluation, il faut inclure les importations européennes de pétrole et de gaz et dans ce cas le déséquilibre commercial est en défaveur de l’Europe et en dehors des hydrocarbures que peut exporter l’Algérie en direction de l’Europe et que si l’Algérie n’a pas tiré profité de l’Accord d’Association, bien que des efforts aient été faits,  d’importantes réformes structurelles sont nécessaires pour rendre l’économie algérienne compétitive. L’Europe prétend n’être pas contre une révision de l’Accord mais souhaiterait « la création d’un cadre juridique stable et transparent, propice à l’investissement, ainsi que la réduction des subventions, la modernisation du secteur financier, la levée des entraves au secteur privé, le développement du potentiel des partenariats public-privé qui font partie des réformes structurelles nécessaires qui doivent encore être menées. L’Europe  se félicite de l’assouplissement introduit récemment par les autorités algériennes de la règle 51/49, pour cent au moins pour les secteurs non-stratégiques, encore qu’il faille définir avec exactitude ce qui est stratégique et ce qui ne l’est pas » Sur le plan géostratégique, pour l’Europe l’Algérie est un acteur déterminant de la stabilité régionale et de l’approvisionnement en énergie de l’Europe . Dans plusieurs rapports entre 2018/2024 -l’Union européenne a salué les efforts de l’Algérie en matière de sécurité et de défense où les tensions au niveau de la région influent par ricochet, sur l’Europe, ainsi que la stabilisation de son voisinage immédiat, considérant que l’Algérie demeure un acteur-clé au niveau régional et international pour la sécurité  et  les menaces terroristes.  Sur le plan énergétique, l’Europe reconnaît le rôle majeur de ‘l’Algérie pour son approvisionnement ,  Sonatrach étant un acteur fiable

3 ;–Pour l’Algérie, l’Accord d’association englobe une multitude de domaines de coopération, politique, économique, culturel, la libre circulation des personnes et autres, mais c’est le volet relatif au rééquilibrage des échanges commerciaux qui motive le plus la demande de la partie algérienne à renégocier l’accord en question invoquant le titre 2 de l’accord, portant «libre circulation des marchandises», dans son premier chapitre sur «les produits industriels» où l’article 11 donne la possibilité à l’Algérie de bénéficier de «mesures exceptionnelles» de durée limitée dérogeant aux dispositions de levée des barrières douanières. pouvant s’appliquer qu’à des industries naissantes ou à certains secteurs en restructuration. L’Accord   reconnait à l’Algérie un droit de prendre des mesures de protection, dont  l’article 24  qui donne à l’Algérie le droit de prendre des mesures de sauvegarde, en arrêtant l’importation d’une catégorie de produits si elle porte préjudice à la production nationale, devant être renégocié pour rendre son champ d’application plus efficace et avantageux. Aussi, pour l’Algérie, l’objectif de cet accord est de « densifier » cette coopération, dont la démarche d’évaluation réclamée ne vise nullement à remettre en cause le cadre global de l’’Accord, mais, bien au contraire, à l’utiliser pleinement dans le sens d’une interprétation positive de ses dispositions permettant un rééquilibrage des liens de coopération et que seules des négociations constructives permettraient de relancer la coopération entre l’Algérie et l’UE dans le but de mettre les relations économiques au centre de cette coopération, de donner à cet accord toute son importance et d’utiliser tout son énorme potentiel dans ses trois composantes: politique, économique et humaine.  Aux préoccupations soulevées par l’UE concernant ses parts de marché en Algérie suite aux mesures de rationalisation des importations prises par le gouvernement algérien dans un contexte bien particulier, cela n’est pas propre à notre pays comme en, témoigne bien avant l’épidémie du coronavirus les mesures restrictives de bon nombre de pays tant pour les USA que l’Europe et les tensions avec la Chine. L’Algérie reste convaincue que les discussions productives permettront d’arriver à des solutions acceptables qui prennent en ligne de compte les intérêts légitimes de chaque partie. Le nouveau code d’investissement assouplissant la règle des 49/51%, ainsi que nouvelle loi des hydrocarbures ont pour objectif combiné avec une lutte contre la bureaucratie néfaste rendant plus accessible le marché algérien afin de dynamiser l’investissement direct étranger.

En conclusion , , il s’agit comme je l’ai souligné il y a quelques années lors d’une conférence, à l’invitation du parlement européen à Bruxelles, de dépassionner les relations car la stabilité des deux rives de la Méditerranée, nous impose d’entreprendre ensemble, l’Algérie et l’Europe étant deux partenaires stratégiques. Mais pour un développement durable , et être un pays pivot au niveau de la région, une Nation n’étant respectée que si elle a une économie forte, des réformes de structurelles doivent avoir lieu avec pour finalité une économie diversifiée , loin des aléas de la rente des hydrocarbures( 98% des recettes en devises avec les dérivés inclus dans la rubrique hors hydrocarbures pour 67% en 2023), encourager l’investissement créateur de valeur ajoutée passant par la lutte contre la bureaucratie afin d’améliorer le climat des affaires, la refonte du système socio-éducatif, le foncier, le système financier, (douanier, fiscal, domaine, banques) l’administration centrale/ locale et une nouvelle régulation sociale ciblée au profit des plus démunis, loin du populisme, des salaires versés sans contreparties productives.  

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