Plusieurs centaines de personnes ont renoué samedi soir avec la magie du grand écran à Gaza, pour la première fois en plus de 30 ans, avec la réouverture, le temps d’une soirée, du cinéma Samer.
Le cinéma, construit en 1944 puis fermé dans les années 1960, a tenu une séance spéciale en projetant un film sur les Palestiniens dans les prisons israéliennes. Quelque 300 personnes, hommes et femmes, ont assisté à la séance. « Nous avons besoin de vivre comme des êtres humains, avec des cinémas, des espaces publics, des parcs », a affirmé Jawdat Abou Ramadan, un des spectateurs. Il n’y a actuellement aucune salle de cinéma ouverte dans l’enclave palestinienne, aux mains du mouvement islamiste Hamas et soumise depuis 10 ans à un blocus terrestre, aérien et maritime d’Israël. L’unique représentation de samedi est « symbolique » des efforts plus larges pour « redonner vie à l’idée du cinéma à Gaza », a déclaré à l’AFP Ghada Salmi, l’une des organisatrices. D’autres cinémas de la bande de Gaza ont tour à tour fermé dans les années 1980, au cours notamment de la première Intifada, le soulèvement palestinien. Des islamistes ont par ailleurs été soupçonnés d’avoir mis le feu à l’un des cinémas en 1987. « Les autres cinémas ont par la suite eu peur de diffuser des films », a affirmé Mme Salmi. Ironiquement, selon l’historien français Jean-Pierre Filiu, la branche gazaouie des Frères musulmans –dont est issu le Hamas– a tenu sa première conférence au cinéma Samer en 1946. Le film projeté samedi soir, « Dix ans », raconte l’histoire de détenus palestiniens dans les prisons israéliennes.
La projection a reçu l’accord du Hamas.
« Je ne pense pas qu’il y ait un problème avec le Hamas pour ouvrir un cinéma, dans la mesure où c’est un endroit artistique », a estimé Nermine Ziara, qui joue dans le film. « Nous, en tant que Palestiniens, avons besoin d’un grand espace pour l’art », a-t-elle indiqué à l’AFP. En mai, un rare festival de films traitant des sujets liés aux droits humains avait pu se tenir en plein air, au port de la ville de Gaza.La bande de Gaza, qui a connu trois guerres avec Israël entre 2008 et 2014 et où au moins deux tiers de la population dépend de l’assistance internationale, est en proie à une grave crise humanitaire et économique