Une vaste étude internationale publiée dans Nature en octobre 2025 démontre que deux profils génétiques différents influencent l’âge du diagnostic de l’autisme. Chez certains, les variations génétiques favorisent une détection très précoce ; chez d’autres, les signes n’apparaissent ou ne sont reconnus que plus tard. Mais, comment expliquer ces différences ? Pendant longtemps, les différences d’âge au diagnostic de l’autisme étaient attribuées principalement à des facteurs sociaux, culturels ou organisationnels : manque de formation des professionnels, stéréotypes de genre, disparités d’accès aux soins. Ces éléments restent vrais. Mais selon une étude publiée dans Nature par l’équipe du généticien Kai Zhang (Polygenic and developmental profiles of autism differ by age at diagnosis, 2025), l’âge du diagnostic possède aussi une composante génétique propre, jusque-là insoupçonnée. En analysant les données de plus de 45 000 personnes autistes issues de grandes cohortes internationales, dont iPSYCH (Danemark) et SPARK (États-Unis), les chercheurs ont identifié deux ensembles polygéniques distincts : un profil “précoce”, souvent associé à des retards de développement et à une détection rapide, et un profil “tardif”, lié à des manifestations plus sociales, émotionnelles ou psychiatriques qui émergent plus progressivement. Les deux profils ne s’opposent pas totalement. Ils partagent une corrélation génétique modérée, indiquant une superposition partielle des mécanismes en jeu.
Détection de l’autisme : deux visages génétiques d’un même spectre
Concrètement, les enfants du “profil précoce” présentent dès les premières années des signes nets de difficultés de communication, d’interactions sociales ou de motricité. Ces signaux attirent rapidement l’attention des familles et des pédiatres, entraînant un diagnostic plus jeune, parfois avant trois ans. À l’inverse, le “profil tardif” correspond à des trajectoires plus subtiles. Ce sont des enfants dont le développement semble typique au départ, mais qui rencontrent plus tard des obstacles dans les relations sociales, la gestion des émotions ou l’attention. Ce second profil est génétiquement plus proche de troubles comme le TDAH, l’anxiété ou la dépression, ce qui rend parfois le repérage plus difficile et plus tardif. « Les manifestations ne sont pas moins réelles, mais moins immédiatement visibles », expliquent les auteurs dans Nature. L’étude précise que les variations génétiques communes expliquent environ 11 % de la variance de l’âge au diagnostic, tandis que les mutations rares à fort effet ne semblent pas jouer de rôle déterminant ici. Autrement dit, la génétique contribue, mais l’essentiel des différences de diagnostic reste lié à des facteurs environnementaux, sociaux et cliniques. Ces travaux ne visent pas à “génétiser” l’autisme, mais à mieux comprendre sa diversité. Savoir qu’il existe un profil génétique plus “tardif” pourrait aider à développer de nouveaux outils de dépistage, adaptés aux enfants dont les signes émergent plus tardivement. Cela permettrait d’éviter des années d’errance diagnostique, fréquentes surtout chez les filles, souvent sous-diagnostiquées à cause de leur capacité à “masquer” leurs difficultés. Cependant, les chercheurs insistent sur le fait que la génétique n’explique qu’une partie du tableau. Le diagnostic reste avant tout un processus clinique et humain, qui dépend de la vigilance des familles, des enseignants et des soignants. « Il faut éviter toute lecture déterministe. Ces profils ne prédisent pas un destin, ils aident à repérer la diversité des trajectoires », rappelle le Pr Anders Børglum, coauteur de l’étude.






