Comme toutes les idéologies coloniales de peuplement, le Sionisme a toujours été obsédé par la race.
Né au plus fort du colonialisme européen et de la science raciale, il a cherché à apprendre des deux. Les Sionistes ont compris qu’avoir des prétentions raciales était fondamental et essentiel pour leur projet colonial, réalisation qui façonne encore aujourd’hui la politique coloniale et raciale d’Israël. A la fin du 18ème siècle, les philologues européens ont inventé la rubrique « Sémite » pour décrire les langues de la Méditerranée orientale et de la Corne de l’Afrique – Arabe, Hébreu, Araméen et Amharique, entre autres – pour les distinguer des langues indo-européennes « Ariennes ». Etant donné la force du racialisme européen et sa culture profondément raciste, alors et aujourd’hui, la croyance en l’extranéité des Juifs a persisté. Depuis lors, les Chrétiens européens ont commencé à considérer les Juifs européens, qui ne parlaient pas Hébreu, comme des « Sémites », en se fondant sur les affirmations religieuses des Juifs et des Chrétiens comme quoi les Juifs européens étaient les descendants des anciens Hébreux de Palestine. Ce qui est remarquable, cependant, c’est que personne n’a alors suggéré – ni aujourd’hui – que les Chrétiens européens étaient aussi les descendants des anciens Chrétiens de Palestine ! Lorsque l’antisémitisme est né en tant qu’idéologie politique, il s’est accroché à la rubrique linguistique Sémite, qui comprenait les Juifs, et les antisémites l’ont convertie en rubrique raciale. En 1879, German Wilhelm Marr, qui a popularisé le mot « antisémitisme », a insisté pour dire que l’hostilité des antisémites envers les Juifs n’était pas fondée sur leur religion, mais sur leur « race ». La recherche historique a établi depuis des décennies que les Chrétiens et les Juifs européens étaient des autochtones européens convertis aux deux religions palestiniennes, Christianisme et Judaïsme, et non pas les descendants de leurs anciens adeptes, pas plus que les Musulmans indonésiens ou chinois ou bosniaques d’aujourd’hui ne sont les descendants des anciens Musulmans arabes de la péninsule arabique. Mais, étant donné la fore du racialisme européen et sa culture profondément raciste, alors et aujourd’hui, la croyance en l’extranéité des Juifs a persisté. C’est une croyance que le mouvement sioniste a épousée.
Pureté raciale Le Sionisme a accepté l’affirmation d’une « race » juive distincte de la race des Gentils, et a poursuivi pour justifier son projet colonial fondé sur cette affirmation. Exactement comme les Européens ont interprété la « supériorité » de leur race comme justification de leur colonialisme, le Sionisme, en tant que nouveau membre du club colonial, s’est servi des mêmes arguments pour coloniser la terre des Palestiniens. Pour prolonger les affirmations raciales du Sionisme, les érudits juifs sionistes ont créé en 1902 à Berlin l’Association des Statistiques Juives pour étudier, entre autres sujets, les causes de la « dégénérescence » raciale des Juifs européens. La notion même de « dégénérescence » raciale avait été inventée dix ans plus tôt par le deuxième plus important chef sioniste de l’époque après Theodor Herzl : Max Nordau, dont le livre de 1892 Dégénérescence a popularisé le terme. Maintenant qu’ils avaient affirmé que les Juifs étaient une race, les Sionistes avaient besoin de prouver qu’ils étaient les descendants directs des anciens Hébreux, alors qu’il semblait y avoir d’autres prétendants à cette affirmation – à savoir, les Palestiniens. Les érudits sionistes se sont focalisés sur le concept de race juive, la centralité de la démographie pour la survie de la race, la santé physique des Juifs européens, le taux de mariages avec des non-Juifs, le taux de naissances juives, et le taux de conversion de Juifs au Christianisme. Ils ont diagnostiqué la situation des Juifs européens comme celle d’une « dégénérescence », prétendument causée par leur résidence dans la « diaspora ». La tâche du Sionisme était de les « régénérer » en créant un Etat colonial de peuplement en Palestine pour les Juifs européens.
Nouveaux venus en Palestine
A l’inverse, les conditions sociales dans la diaspora et l’antisémitisme étaient perçus comme les causes sociales de la « dégénérescence » physique et mentale des Juifs – qui, à la différence de la dégénérescence raciale, pouvait être renversée par la colonisation juive de la Palestine, que le Sionisme assumait en son nom. Maintenant qu’ils avaient affirmé que les Juifs étaient une race, les Sionistes devaient prouver qu’ils étaient les descendants directs des anciens Hébreux, puisqu’il semblait y avoir d’autres prétendants à cette affirmation – à savoir, les Palestiniens qui habitaient cette terre depuis des temps immémoriaux. Comme pour leurs voisins Egyptiens, Syriens et Irakiens, on dit des Palestiniens qu’ils se sont mélangés aux Arabes de la péninsule après que les Arabes de la péninsule aient conquis la région au septième siècle. Les Sionistes ne prétendent pas que les Egyptiens, Syriens et Irakiens d’aujourd’hui sont de purs descendants de l’invasion arabe, plutôt que les peuples indigènes qui se sont mêlés à eux. Pourtant des Sionistes, comme Netanyahu, insistent bizarrement pour dire que tous les Palestiniens sont des nouveaux venus en Palestine arrivés de la péninsule arabique.
Que les dirigeants du mouvement sioniste reconnaissent les Palestiniens comme les anciens habitants de cette terre, dont la majorité s’est convertie du Judaïsme et autres croyances locales au Christianisme et, plus tard, à l’Islam, était un dangereux précédent qu’il fallait effacer de la mémoire du Sionisme officiel et d’Israël. Et ainsi fut fait. Cet arrière-plan terrifie les idéologues sionistes et met en danger leurs revendications raciales. Et là, les avancées dans la science génétique de ces quelques dernières décennies et les revendications sans fondement de beaucoup de ses professionnels de la publicité on été un cadeau pour le racialisme sioniste.