Nouvelle reconfiguration mondiale: L’adhésion de l’Algérie aux BRICS est un choix judicieux et adéquat

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Au préalable, je voudrai mettre en relief que l’Algérie, contrairement à certains esprits malintentionnés à travers certains sites et les réseaux sociaux qui veulent isoler l’Algérie, qui affirment sans analyses objectives,  que le  voyage du président de la  République en Russie est un alignement sur les positions de Moscou contre l’Occident, anticipant même des sanctions occidentales, comme l’a souligné  le  président de la République lors de sa visite à Moscou, l’Algérie  tenant  compte à son  indépendance  politique, a opté pour une position de neutralité dans le conflit en Ukraine  expliquant d’ailleurs sa désignation en tant que membre non permanent au Conseil de sécurité et la proposition  de servir de médiateur.

L’Algérie entretient d’excellentes relations avec la Russie, les Etats-Unis d’Amérique, la Chine, l’Europe (USA/Europe/Chine, les principaux clients et fournisseurs, 80% des échanges hors matériel militaire),  pour ne citer que les principaux acteurs internationaux qui reconnaissent  en l’Algérie, un acteur stratégique  de stabilité de  la région méditerranéenne et africaine grâce aux efforts de l’ANP et des forces de sécurité.

1 – Rappelons que la ville du Cap, en Afrique du Sud, a accueilli la réunion préparatoire des BRICS, les 2 et 3 juin 2023 où les ministres des Affaires étrangères du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de l’Afrique du Sud et le vice-ministre chinois des Affaires étrangères étaient chargés de préparer le sommet des chefs d’État qui doit se tenir fin août 2023 à Johannesburg où l’Afrique du Sud exerce la présidence tournante. A été étudié le dossier de l’élargissement des BRICS à de nouveaux membres, soit comme membres soit comme observateurs, où dix-neuf pays ont exprimé leur intérêt à rejoindre les BRICS dont 13 ont officiellement déposé des demandes d’adhésion au groupe, selon l’ambassadeur de l’Afrique du Sud au sein du groupe BRICS, Anil Sooklal, dans un entretien avec l’agence américaine Bloomberg dont l’Arabie saoudite, l’Iran, l’Argentine, les Émirats arabes unis, l’Algérie, l’Égypte, Bahreïn et l’Indonésie, ainsi que deux pays d’Afrique de l’Est et un autre d’Afrique de l’Ouest, (sans les citer). Ainsi, nous devrions assister à une nouvelle configuration internationale, s’orientant vers un monde multipolaire, avec les impacts du conflit en Ukraine, le rétablissement des relations diplomatiques entre l’Iran et l’Arabie saoudite et le poids croissant des BRICS. Formé du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud, les BRICS sont considérés comme les grandes puissances émergentes actuelles avec une démographie de 3,2 milliards d’habitants et malgré cela, le groupe ne dispose que de 15% des droits de vote à la Banque mondiale et au Fonds monétaire international.

2 – En termes de produit intérieur Brut selon les dernières données internationales  de fin 2022, du  FMI, et de la Banque mondiale, les  20 pays les plus riches du monde sont les suivants:  USA  25346 milliards de dollars, la Chine 19911; le Japon 4912 : l’Allemagne 4258 : le Royaume-Uni 3376 : l’Inde 3291 : la  France  2936 : le Canada 2221 : l’Italie 2058 : le Brésil 1833 : la Russie 1829 : l’Australie 1748 : l’Iran 1739 : l’Espagne 1438 ; le  Mexique  1322 : l’Indonésie 1289 : l’Arabie saoudite  1040 ; les Pays Bas 1013 ; la Suisse 841,9 ; Taiwan 841,2 milliards de dollars  et le Portugal  très loin 240 milliards de dollars . Mais en termes de PIB par habitant, étant souhaitable d’éclater le PIB  en termes de parité de pouvoir  par couches sociales,    les dix premiers au classement en 2022 par le PIB par tête d’habitant sont:  le Luxembourg 196568 dollars, l’Irlande 111259, Singapour 106677 ; le  Qatar 100036 ; la  Suisse 78111 ; les Emiraties  74244 : la Norvège 69858 ; les USA  69375 : Macao 67474 ; Hong Kong 65403 dollars. Les autres pays cités précédemment  suivent de loin dont  l’Allemagne 58150 ; le Canada 53083 : le  Royaume Uni 46693 : l’Italie 45267 ;   le Japon 44934 ;   la France 44770 , l’Espagne 29413 milliards de dollars. Pour les autres pays du BRICS, avec d’importantes disparités, nous avons,   la Chine 12813 ;  la Russie 12200 ;  le Brésil 8519 ; l’Afrique du Sud 7060 et  l’Inde avec 2253.millions de dollars. Sur un   PIB mondial qui est passé de 96100 milliards de dollars en 2021 à plus de 100.000 milliards de dollars en 2022  le  total des BRICS avec l’Afrique du Sud dont le PIB  est de  835 milliards de dollars , nous avons  un total de  27700 milliards de dollars soit 27,70% du PIB mondial en 2022. Avec les nouvelles adhésions, nous aurons un accroissement d’environ 700 millions d’habitants, plus de 45% de la population mondiale estimée  au  01 janviers 2022  à  plus 8 milliards d’habitant  et un accroissement du PIB qui s ‘ajoutent aux cinq pays des BRICS  entre 6000/ 7000  milliards de dollars  sur un PIB mondial dépassant les 100.000 milliards de dollars, en 2022, hypothèse de structure stable en 2022 par rapport à 2021, un ratio de 33/34% du PIB mondial. Mais pour l’instant entre 2022/2023, les USA, et l’Europe y compris la Grande-Bretagne, pour moins d’un milliard d’habitants accaparent , représente environ 40% du PIB mondial. Contrairement au G7, les différents pays des BRICS et de ceux qui adhèrent ont des systèmes politiques (cas de l’Inde et de la Chine, deux poids lourds) et économiques hétérogènes, certaines économies mono exportatrices dans le domaine des hydrocarbures, (Russie, Arabie saoudite pesant chacun plus de 11 millions de barils/j), avec des alliances militaires et politiques différentes et donc il faut donc être réaliste, chaque pays défendra ses propres intérêts, car dans la pratique des relations internationales et surtout économiques, n’existent pas de sentiments, mais que des intérêts.

3 – D’une manière générale, l’action des BRICS a permis de soulever des problèmes jusque-là ignorés par les pays développés dans un esprit dépassé de domination, comme le déséquilibre de l’économie mondiale, qu’il ne peut y avoir de développement global sans le développent et de prospérité de la majorité des pays en voie de développement, proposant de créer un partenariat global fondé sur le dialogue productif par une compréhension mutuelle et une coordination des efforts entre le Nord le Sud afin de résoudre les nombreux défis de notre monde. C’est sous l’impulsion des BRICS que le G20 a transformé le forum de stabilité financière en conseil de stabilité financière, les BRICS ayant soutenu le rapport sur les G-SIFI pour réduire les risques moraux des institutions financières systématiquement et globalement importants, les fonds de couverture, le shadow banking, les produits dérivés financiers des marchés offshore et les agences de notation ayant été ramenés pour la première fois sous la supervision. Mais c’est pour échapper à la dépendance de l’hégémonie du dollar que les BRICS ont décidé de créer une nouvelle banque de développement à travers la contribution des banques centrales des BRICS, une partie des réserves de devises étrangères pourrait être concentrée, de même, par l’émission d’emprunts sur le marché financier international, on pourrait concentrer des fonds pour servir à la construction des infrastructures dans les BRICS.

Les avantages de la Nouvelle Banque de développement tourneraient autour de trois axes directeurs : premièrement, de mieux utiliser leurs devises étrangères afin de réduire le risque d’inflation et de rétrécissement de leur réserve de devises étrangères, et de mieux servir leurs économies réelles; deuxièmement, les bénéfices que la banque de développement pourraient tirer de l’investissement dans les économies réelles et dépasseraient largement ceux que les banques centrales pourraient tirer de l’achat de bons du Trésor des pays développés, et l’investissement dans les infrastructures pourrait stimuler la demande intérieure de ces pays, entraînant la croissance économique; troisièmement, la Nouvelle Banque de développement ferait la promotion de l’usage des monnaies nationales des pays membres, ce qui pourrait promouvoir le commerce intérieur et l’investissement réciproque de ces pays, réduisant ainsi la dépendance au dollar, bien qu’en baisse mais dominant dans les transactions internationales suivi de l’euro. En effet, il faut être réaliste. La fin du «roi dollar» ressemble donc à «l’Arlésienne» depuis plus de cinquante ans, mais des événements récents viennent cependant d’ouvrir une sérieuse brèche, où après la Russie, l’Inde certains pays européens  ont déjà facturé de nombreux produits en yuans. Cependant, entre  2021 et 2022, selon les  données du FMI données du 28 avril 2023, la part de l’euro dans les paiements mondiaux s’élève à environ  à 38 %, l’euro faisant ainsi jeu égal avec le dollar, la part  de l’euro dans les avoirs de réserves de change étant  d’environ 20 % tandis que celle du dollar américain se situait aux alentours de 60% et la part du dollar dans les réserves de changes mondiales est passée de 71% en 1999, à 58% en 2022, l’euro comptant pour 20,5%, le yen pour 5,5% et la livre sterling pour près de 5% et le  yuan  chinois  2,7%. Aussi, tout dépendra des rapports de force  et de l’évolution de l’économie mondiale  où avec les tensions géostratégiques  actuelles et les nouvelles alliances le monde ne sera plus jamais comme avant la création de la Nouvelle Banque de développement traduit la volonté des BRICS d’une rénovation de leur gouvernance interne. La stratégie des BRICS est de favoriser le co-développement, se fondant sur le respect du choix du système politique et économique de chaque nation, tenant compte de son histoire et de son anthropologie culturelle.

En conclusion, outre les facteurs géopolitiques, l’Algérie étant un acteur stratégique de la stabilité de la région méditerranéenne et africaine, les futures adhésions doivent avoir une économie diversifiée, pour avoir une influence sur les décisions internationales et profiter de cette intégration. C’est dans ce cadre que le choix de l’Algérie à adhérer aux BRICS est un choix stratégique pour son développement futur et comme rappelé par le président de la République, il y a lieu de doubler son PIB approchant les 200 milliards de dollars fin 2022,  à environ 400 milliards de dollars horizon 2025. L’objectif stratégique est une structure économique diversifiée, car dépendant pour ses recettes en devises, en 2022, avec les dérivées à 98% des hydrocarbures, (inclus dans la rubrique hors hydrocarbures pour près de 60/70% ) avec une recette estimée en 2023, selon nos calculs, hypothèse de 75/80 dollars le cours du Brent, et 10/11 dollars le MBTU pour le gaz, entre 45/250 milliards de dollars, contre 60 milliards de dollars  en 2022. L’Algérie peut devenir  un pays pivot, elle en a les potentialités, sous réserve de l’approfondissement des réformes structurelles épaulées par une gouvernance rénovée et la valorisation de la connaissance.

A. M