La ville de Syrte, où les forces pro-gouvernementales appuyées par des frappes aériennes américaines, resseraient l’étau sur le groupe terroriste autoproclamé Etat islamique (EI/Daech), a été pendant des décennies la ville symbole de la Libye avant de tomber il y a un an aux mains des terroristes.
A la faveur d’une offensive d’envergure lancée le 12 mai pour reprendre Syrte, située à 450 km à l’est de la capitale Tripoli, les forces du gouvernement d’union libyen (GNA), soutenu par l’ONU, sont entrées le 9 juin dans la cité et y assiègent depuis les terroristes. Localité stratégique, Syrte est située à mi-chemin entre la capitale Tripoli et Benghazi, et à 180 km de Misrata à l’ouest, d’où sont partis en mai le gros des forces du GNA -composées de différentes milices- pour reprendre le fief de l’EI.
300 km séparent Syrte des rives européennes. Sa proximité avec la zone du «croissant pétrolier» plus à l’est a donné des visées expansionnistes aux éléments de Daech, qui tente de contrôler les terminaux et ports pétroliers.
La majorité des habitants de Syrte appartiennent à l’une des quatre grandes tribus de la région: les Kadhafa (le clan de la famille de l’ancien dirigeant Maammar el Gueddafi), les Werfalla (numériquement importante dans l’ouest de la Libye et très influente à Bani Walid), les Forjane et surtout les Magariha (fidèle à l’ancien régime). La ville comptait 120 000 habitants avant sa prise le 9 juin 2015 par Daech, mais 75% d’entre eux ont réussi à fuir.
Il y resterait quelque 30 000 civils. Le centre de conférence Ouagadougou, érigé par l’ancien régime pour accueillir les sommets africains et internationaux, et qui a vu la genèse de l’Union africaine le 9 septembre 1999 lors de la «déclaration de Syrte», est utilisé par les terroristes de Daech qui sont aujourd’hui pris en étau à mesure que les forces du GNA progressent dans la ville. Le port de Syrte, son aéroport international, une importante base aérienne et un hôpital ont été repris aux terroristes en juin 2016.
Syrte livrée au chaos
Avant qu’elle ne tombe aux mains des terroristes de l’EI, Syrte a été livrée au chaos après les évènements de 2011 ayant conduit à la chute du régime de Kadhafi. Pendant des siècles, l’intérêt pour Syrte -une région désertique séparant naturellement les provinces romaines et helléniques d’Afrique du Nord- résidait dans sa situation géographique.
Ville natale de Kadhafi, l’ancien leader aspirait à en faire la capitale de la «Jamahiriya» (Etat des masses, ndlr), mais a toutefois créé une nouvelle province dans la région de Syrte: «al-Wosta» (la centrale), en plus des trois autres déjà existantes: la Tripolitaine, la Cyrénaïque et le Fezzan. Depuis juin 2015, Daech a imposé son prétendu drapeau noir qui flottait sur les bâtiments publics de la ville et ses éléments sillonnaient les rues. Le groupe terroriste a commis des exactions sanglantes dans cette ville.
L’étau se resserre contre Daech
Les forces progouvernementales libyennes ont repris le contrôle d’un quartier important du centre de la ville de Syrte, resserrant davantage l’étau autour des positions du groupe terroriste, ont affirmé mardi les autorités. «Nos forces ont pris le contrôle total du quartier al-Dollar après l’assaut lancé dimanche par les forces loyales» au gouvernement d’union nationale installé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale, a indiqué le bureau médiatique des forces pro-GNA.
«La nouvelle ligne de front s’établit désormais dans le secteur situé entre le quartier al-Dollar et le centre de conférence de Ouagadougou», où se positionnent l’EI à Syrte. Cette avancée des forces pro-GNA a été annoncée alors que les Etats-Unis ont lancé lundi leurs premières frappes aériennes contre des cibles de l’EI à Syrte.
Ces frappes ont été annoncées par le chef du gouvernement d’union Fayez al-Sarraj et confirmées par le Pentagone. «Les premières frappes américaines contre des cibles précises de Daech ont eu lieu aujourd’hui» à la demande du GNA, «infligeant de lourdes pertes (aux terroristes) à Syrte», a indiqué al Sarraj lors d’une allocution télévisée.
«En réponse à la demande du centre de commandement de l’opération (pour la reprise de Syrte) et en coordination avec le ministère de la Défense, le conseil présidentiel (du GNA), en sa qualité de commandant suprême de l’armée libyenne, a demandé un appui direct aux Etats Unis pour effectuer des frappes aériennes ciblées contre des positions de l’EI dans la ville de Syrte et ses alentours», a-t-il ajouté, soulignant que ces frappes interviennent dans un cadre limité dans le temps, et «ne dépasseront pas Syrte et sa banlieue».