Les nouvelles lois relatives aux partis politiques et aux associations, en Algérie: Permettront-elles leur dynamisation pour une participation et mobilisation citoyenne ?

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La présidence algérienne devrait procéder prochainement  à une révision  des lois  sur les  partis politiques et la société civile ayant distribué un avant projet de texte pour enrichissement.

Devant pour reprendre  la méthodologie des grand philosophes allemands Kant et Hegel différencier régime transitoire   de ‘l’Etat permanent , les   résultats des différentes élections en Algérie qu’elles soient présidentielles, nationales( députés)  ou locales  durant les trois  dernières décennies puisque avant, on ne pouvait pas parler d’élections   il y avait prépondérance du parti unique ,   ont montré clairement que les partis politiques et les différents segments  et la société civile  dont la fonction est déterminante comme intermédiation politique, sociale et économique afin d’éviter un affrontement direct services de sécurité -citoyens en cas de malaise social, renvoyant à la sécurité nationale, ont  eu un impact limité.  Car pour  pouvoir mobiliser, outre la moralité des dirigeants nous renvoyant aux analyses du grand sociologue maghrébin Ibn Khaldoun   sur la moralité,  le système partisan et la société civile doivent être au service du citoyen et non dans le sillage des relations de clientèles.   La méfiance vis-à-vis du politique n’est pas propre à l’Algérie du fait que les vieilles recettes de mobilisation ne portent plus même dans les pays  les plus développés dits démocratiques.  Pour la mobilisation des citoyens, cela rend urgent la restructuration du système partisans et la société civile officielle bénéficiant pourtant d’un budget de l’Etat conséquent et que seules deux institutions tiennent l’Algérie, l’ANP et les forces de sécurité dans toute leur composante, pour la stabilité et la défense du territoire et sur le plan économique Sonatrach qui avec les dérivées comptabilisées dans la rubrique hors hydrocarbures pour 67% en 2023 selon les statistiques gouvernementales officielles, représentent 98% des recettes d’exportation en devises du pays.

1.-L’urgence de la restructuration du système partisan et de la société civile

Pour la majorité des Partis , leur présence se fait d’une manière formelle et ostentatoire lors des élections meublant le vide, impuissant presque toujours à agir sur le cours des choses et à formuler clairement les préoccupations et les aspirations de la société réelle.  En raison des crises internes qui les secouent périodiquement, du discrédit qui frappent la majorité d’entre elles, de la défiance nourrie à leur égard , les formations politiques ont une faible capacité de faire un travail de mobilisation et d’encadrement efficient, de contribuer significativement à la socialisation politique et donc d’apporter une contribution efficace à l’œuvre de redressement national. Ce sont là des raisons suffisamment importantes pour envisager sérieusement de réorganiser le système partisan pour qu’il puisse remplir la fonction qui est la sienne dans tout système politique démocratique, devant laisser le soin au marché et non à l’administration par la création de partis artificiels, de mesurer le poids de chaque Parti fonction du nombre de ses adhérents réels.  En effet, le discrédit qui frappe les formations politiques doit laisser la place à des formations crédibles, supposant une appréciation objective du statut et du rôle qui doivent être les leurs dans une société qui ambitionne de rejoindre le rang des sociétés développées, d’autant plus que pour les années à venir, les réformes différées seront très douloureuses. Dans ce cadre, l’avant-projet distribué par la Présidence de la République pour enrichissement portant loi organique relative aux partis politiques comprend plusieurs modifications parmi lesquelles la dissolution du parti en cas de non-présentation de candidats lors de deux élections successives, selon l’article 21, que tout membre d’un parti politique doit être définitivement radié de ses listes s’il change d’affiliation politique et selon l’article 36  que  le parti politique doit se compose d’organes et de commissions nationales et de structures locales, qui doivent être élus et renouvelés selon des principes démocratiques, basés sur le choix libre des adhérents ». L’article 37 précise que le parti politique doit disposer d’un organe délibérant et d’un organe exécutif, qui en assurent la direction au niveau national et que ces organes sont élus pour une durée maximale de cinq ans, renouvelable une seule fois de manière consécutive ; Les nouvelles règles modifient également la représentation des wilayas lors du congrès fondateur. Selon la loi organique en vigueur, le congrès fondateur doit réunir au moins 400 congressistes provenant d’au moins un tiers des wilayas, avec un minimum de 16 congressistes par wilaya. Cependant, pour atteindre le minimum requis de congressistes, le congrès doit être représenté par au moins 25 wilayas. Ainsi, la représentation des wilayas dans le projet préliminaire de cette loi organique a été révisée pour que 50 % des wilayas soient représentées. Quant à la société civile, force est de constater qu’elle est éclatée , certaines confréries religieuses qui avec la désintégration sociale et une jeunesse parabolée ont de moins en moins d’impacts sur la mobilisation citoyenne , contrairement à une vision du passé. Comme pour les partis, la majorité de  la société  civile dite officielle ,se manifeste, , la majorité vivant du transfert de la rente et non sur la base des cotisations de leurs adhérents, que lors d’évènements électoraux . C’est que la confusion qui prévaut actuellement dans le mouvement associatif national rend malaisée l’élaboration d’une stratégie visant à sa prise en charge et à sa mobilisation. Sa diversité, les courants politico-idéologiques qui la traversent et sa relation complexe à la société et à l’Etat ajoutent à cette confusion et rendent impératif une réflexion qui dépasse le simple cadre de cette contribution.  Constituée dans la foulée des luttes politiques qui ont dominé les premières années de l’ouverture démocratique des années 199O, l’Algérie ayant vécu jusqu’à 1999 une longue période d’instabilité due au terrorisme, la société civile va se scinder en quatre sociétés segments fondamentalement différents, trois au niveau de la sphère réelle et une dominante dans la sphère informelle. Le plus gros segment, interlocuteur privilégié et souvent l’unique des pouvoirs publics, ce sont des sociétés civiles se trouvant à la périphérie des partis du pouvoir où les responsables sont parfois députés, sénateurs, vivant en grande partie du transfert de la rente. Nous avons une société civile ancrée franchement dans la mouvance islamiste, certains segments étant l’appendice de partis islamiques légaux. Nous avons une société civile se réclamant de la mouvance démocratique, faiblement structurée, en dépit du nombre relativement important des associations qui la composent, et minée par des contradictions en rapport, entre autres, avec la question du leadership. Et enfin nous avons une société civile informelle, inorganisée, totalement atomisée qui est de loin la plus active et la plus importante avec des codifications précises formant un maillage dense et sans son intégration, non par des mesures bureaucratiques autoritaires, il ne faut pas compter sur une réelle dynamisation de la société civile. Car lorsqu’un Etat veut imposer ses propres règles déconnectées par rapport aux pratiques sociales, la société enfante ses propres règles qui lui permettent de fonctionner avec ses propres organisations. La dynamisation de la société civile afin d’en faire un instrument efficace d’encadrement de forces vives et un levier puissant de leur mobilisation en vue de leur implication active dans la société n’a de chance de réussir que si le mouvement associatif qui le compose ne soit pas au service d’ambitions personnelles inavouables et parfois douteuses

.(conférences du Pr Abderrahmane Mebtoul devant le parlement européen, à l’Université de Clemson-Caroline du Sud -USA , au siège de l’Unesco, devant les ambassadeurs accrédités à Alger, au siège du ministère des affaires étrangères Algérie, à l’Académie Inter-Armes de Cherchell, – à l’Ecole Supérieure de Guerre, à l’ Institut miliaire IMPED -MDN , devant les cadres de la DGSN et de l’État – major de la gendarmerie nationale, aux universités de Annaba, Constantine, de Tizi Ouzou, Béjaïa, de Sid Bel Abbès, Tlemcen, d’Oran et à l’école nationale d’administration d’Alger-ouvrage collectif toujours d’une brûlante actualité  -les enjeux de l’Algérie : réformes et démocratie 2 volumes Casbah Édition Alger- 2005 (520 pages et le  Maghreb face aux enjeux géostratégiques Harmattan Paris 2017/2018 ).

 2.- Quelles perspectives ?

 Enjeux de pouvoir interne, crise économique, sociale et culturelle et, enfin, contraintes externes de plus en plus pesantes rendent urgent une véritable stratégie nationale d’adaptation au phénomène total des nouveaux enjeux géostratégiques et des nouvelles mutations économiques mondiales nous orientant vers un monde multipolaire et un nouvel ordre mondial où toute Nation qui n’avance pas recule forcément, n’existant dans toute société de situation statique (voir valeur et croissance- ouvrage du professeur Abderrahmane Mebtoul -Office des Publications Universitaires – Alger 1983-120 pages – : la théorie de la thermodynamique appliquée à l’analyse de la société et programme de l’Association  Algérienne de l’Économie de Marché ADEM largement  diffusée au niveau mondial en anglais-arabe et français entre 1992/1993 dont j’ai eu l’honneur d’être le président de 1992 à 2O16).  Tout discours politique doit coller avec la réalité et les aspirations de la société algérienne en mutation ce qui renvoie à la refondation de l’Etat inséparable de l’accélération de la réforme globale où on constate paradoxalement que lorsque la valeur de la rente des hydrocarbures s’accroît, les réformes sont freinées, assistant à une redistribution passive de la rente pour une paix sociale éphémère. Ce couple contradictoire rente/réformes explique l’instabilité juridique et le manque de cohérence dans la réforme globale, les gagnants de demain n’étant pas forcément ceux d’aujourd’hui. Dans ce contexte, comment ne pas rappeler qu’entre 1980//2024, j’ai eu l’honneur  de coordonner des ouvrages pluridisciplinaires, ayant abordé les réformes politiques, sociales et économiques, et ce afin d’expliquer notre démarche de la transition fondée sur l’alternance démocratique tenant compte de l’anthropologie culturelle, fruit de travaux collectifs auquel ont contribué des spécialistes en anthropologie, en sciences politiques, en sociologie, experts militaires, juristes, économistes (1). Il a été démontré que le  passage de l’État de « soutien » à l’Etat de justice est de mon point de vue un pari politique majeur, car il implique tout simplement un nouveau contrat social et un nouveau contrat politique entre la nation et l’Etat et que l’ Algérie ne peut revenir à elle-même que si les faux privilèges sont bannis et les critères de compétence, de loyauté et d’innovation sont instaurés comme passerelles de la réussite et de promotion sociale en conciliant la modernité tout en préservant son authenticité.. Il n’est plus permis en ce mois de mars 2O25 grâce à une aisance financière, de continuer de dépenser sans compter, importer au lieu de privilégier la production locale se fondant tant sur l’entreprise locale ou étrangère créatrice de richesses impliquant une nette volonté politique d’aller vers une économie de marché concurrentielle à finalité sociale. C’est pourquoi, la refondation de l’Etat implique des aménagements dans l’organisation du pouvoir devant poser la problématique stratégique du futur rôle de l’Etat dans le développement économique et social et ne devant pas occulter les besoins d’autonomie de pouvoirs locaux qui doivent être restructurés en fonction de leur histoire anthropologique et non en fonction des nécessités électoralistes ou clientélistes. La refondation de l’Etat ne saurait se limiter à une réorganisation technique , création de nouvelles wilayas ne devant pas confondre décentralisation nécessaire avec déconcentration et ce grâce aux  nouvelles technologies facilitant  le rapprochement  avec les citoyens éloignés.  L’autonomie des pouvoirs locaux ne signifie pas autonomie vis-à-vis du pouvoir central mais un acte qui renforce le rôle de la société civile afin de transformer les collectivités locales « providence » en « commune entreprise ». Cela suppose que toutes les composantes de la société soient impliqués, dans le processus décisionnel qui engage la configuration du territoire, afin de renforcer la cohésion sociale et l’efficacité économique grâce à une réelle décentralisation autour de six à sept grands pôles économiques régionaux, piloté par des chambres de commerce régionales regroupant entreprises publics, privées, banques, universités, centres de recherche, syndicats, réseaux de la société civile , les autorités centrales et locales servant de facilitateurs, de régulateur.,  étant illusoire de vouloir fonder le développement sur des réseaux de l’administration, ce qui renforcera forcément  la bureaucratisation facteur de blocage et de corruption.

En résumé, l’Algérie, pays à fortes potentialités, peut devenir entre 2028/2030 ,sous réserve de profondes réformes, un pays pivot facteur de la sécurité des espaces méditerranéens et africains. La solution est essentiellement interne et il appartient aux citoyens algériens et à eux seuls de réaliser cette espérance afin de réaliser un développement harmonieux conciliant l’efficacité économique et une profonde justice sociale   au sein d’un monde en plein bouleversement,. en n’oubliant jamais que la  richesse d’une Nation provient du travail et non d ‘une rente éphémère.

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