Une avancée technologique majeure dans le domaine de l’élevage a été franchie à Alger, où l’École nationale supérieure agronomique (ENSA) a inauguré une bergerie intelligente dédiée à la race ovine autochtone « El Hamra », dans le cadre d’un projet innovant alliant préservation génétique et technologies de suivi sanitaire.
Située à proximité du département de production animale de l’école, cette infrastructure d’un nouveau genre accueille actuellement plus d’une cinquantaine de têtes — béliers, brebis et agneaux — de la race « El Hamra », fournies par l’Institut d’élevage de Saïda, partenaire historique de l’ENSA dans la conservation de cette race menacée. Fruit d’un partenariat entre l’ENSA et la start-up Pro-Checker, spécialisée dans les technologies d’identification animale, cette bergerie est équipée d’un système numérique basé sur des puces électroniques. Chaque animal est identifié de manière individuelle grâce à ces puces, qui enregistrent en temps réel des données essentielles telles que l’âge, les antécédents sanitaires, la croissance, ainsi que la généalogie. « Ce système intelligent vise avant tout à améliorer le suivi sanitaire du troupeau en permettant des interventions précoces en cas de problème », a expliqué Dr Mohamed Khalil Ghozlane, chef du département de production animale de l’ENSA. Le dispositif de géolocalisation intégré permet en outre de cartographier la répartition géographique de cette race originaire de régions comme Saïda, Méchria, Naâma, Sidi Bel Abbès et le sud de Tlemcen. L’objectif est à terme de constituer un registre généalogique officiel de la race « El Hamra », en concertation avec les autorités agricoles, afin d’assurer sa préservation dans ses zones d’origine.
Des incitations pour préserver la pureté génétique
Dans une perspective de durabilité, Dr Ghozlane propose la mise en place de primes financières pour les éleveurs qui s’engagent à maintenir la pureté génétique de la race. Selon lui, de telles incitations sont nécessaires pour éviter les croisements non contrôlés et ainsi protéger la biodiversité ovine nationale. Bilal Loubar, directeur de Pro-Checker, souligne que cette technologie pourrait bénéficier à d’autres races locales telles que Ouled Djellal, Rambi ou Tazegzawt. Le système offre un suivi rigoureux de la santé animale et une traçabilité complète, indispensable pour réagir efficacement en cas de maladie détectée à l’abattoir.
« Ce système permet de retracer l’origine d’un animal et d’agir rapidement pour éviter toute propagation », précise-t-il.
Les puces électroniques constituent également un outil de lutte contre le vol de bétail, permettant aux autorités de vérifier l’identité et la provenance des animaux lors de contrôles sur le terrain. Bilal Loubar plaide pour l’instauration d’un cadre législatif renforcé, incluant notamment l’obligation d’identifier les animaux dès la naissance, à l’image de ce qui se fait dans des pays comme la Nouvelle-Zélande, le Canada ou le Brésil. « Une numérisation bien encadrée peut révolutionner la gestion du cheptel en Algérie et améliorer significativement la productivité de la filière viande rouge », conclut-il. Avec cette bergerie intelligente, l’ENSA et ses partenaires ouvrent la voie à une modernisation durable de l’élevage ovin algérien, en plaçant la technologie au service de la préservation des ressources génétiques et de la sécurité sanitaire du cheptel national.






