L’Algérie, une histoire millénaire dans la résistance et l’édification de l’Etat-Nation: Des Numides à l’Indépendance du 5 juillet 1962

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Par le Dr Abderrahmane Mebtoul professeur des universités, expert international

L’histoire étant le fondement de la connaissance, bien informés, les Algériens sont des citoyens, mal informés, ils deviennent des sujets.

2. De la période du kharidjismeDurant le kharidjisme amazigh de 736/947, les Imazighen ne tardent pas à se révolter contre l’autorité du calife d’Orient, autant pour des raisons fiscales que politiques. Plusieurs royaumes amazighs autonomes font leur apparition. Dans le Maghreb central, l’un d’eux, la principauté de Tahert se développe durant 140 ans. À la suite du grand schisme de l’Islam, lorsque Ali, gendre du prophète (QSSSL) disputant le califat à Muawiya accepta une transaction, à la suite de laquelle Muawiya fut vainqueur. L’Islam se divisa alors en deux branches principales : les adeptes de la branche dominante prirent le nom de sunnites et ceux qui se réclamaient d’Ali devinrent les chiites. La branche qui prévaut en Afrique du Nord est le sunnisme. Quant au kharidjisme, il disparut entièrement de l’Afrique du Nord où il n’a subsisté que dans le Sud algérien, au M’zab, les actuels originaires du M’zab, ou mozabites exerçant dans le reste de l’Algérie, les activités pacifiques, notamment le commerce contrastant particulièrement avec le goût pour le combat de leurs ancêtres. Vient la dynastie rostémide de 776/909, Ibn Rustom prenant comme épouse une femme berbère des Banou Ifren. Il fonde en 761 un royaume ibadite dans le nord du Maghreb avec Tabert pour capitale. Celui-ci, comme l’émirat de Cordoue depuis sa création en 756, conserve son indépendance du califat des Abbassides, malgré les pressions diplomatiques et militaires ainsi que les pertes de territoires. En 909, en proie à des crises intérieures, le chef chiite et fondateur de la dynastie des Fatimides, Obeid Allah, mit fin au royaume rostémide. Pour la dynastie Idrisside de 788/985, Idriss prend comme épouse une Berbère et eu un enfant, Idriss II. Deux versions des faits existent : selon la première, Abou Ourra invite Idriss vers 790 à séjourner à Tlemcen. Selon la deuxième version, Idriss regroupe ses alliés et fait une incursion à Tlemcen. Le chef des Maghraouas Mohamed Ibn Khazer fait allégeance à Idriss vers 790. Idriss va combattre les kharidjites et les Aghlabides, lorsqu’il prend le pouvoir au Maghreb. La dynastie Ifrenide ayant régné de 790/1066 est anciennement établie dans leur royaume de Tlemcen. Les Banou Ifren sont des opposants à tous les régimes idéologiques. Ils choisissent d’être sufrites berbères au début VIIe siècle. Au Abu Yazid, vers 942, est le chef de la révolte contre les Fatimides. Mais, vers 947, il est tué et les Banou Ifren organisent une lutte contre les Fatimides. Les Banou Ifren reprennent leurs territoires et contrôlent tout l’ouest du pays. Yala Ibn Mohamed détruit complètement Oran et choisit Ifgan comme capitale militaire. Les Fatimides font ensuite alliance avec les Banou Ifren. Des luttes acharnées entre les trois dynasties (Maghraouas, Ifreides et Zirides) débutent pour le pouvoir du Maghreb. Il en ressort que les Banou Ifren ne cèdent pas face aux deux dynasties et Tlemcen reste leur capitale. La dynastie Banou Ifren s’achève dès l’arrivée des Hilaliens et des Almoravides au Maghreb. Vient ensuite la dynastie Aghlabide de 800/909. En 800, le calife abbasside Haroun ar Rachid délègue son pouvoir en Ifriqiya à un gouverneur arabe du Zab, Ibrahim Ibn Al Aghlab, qui obtient le titre d’émir Al Aghlab établissant la dynastie des Aghlabides, qui règne durant un siècle sur le Maghreb central et oriental. Le territoire bénéficie d’une indépendance formelle tout en reconnaissant la souveraineté abbasside, les émirs aghlabides prêtant allégeance au calife abbasside. Au début du Xe siècle, une nouvelle dynastie supplante les Aghabides et les Rostémides et dans le Maghreb central : les Fatimides de 909 à 972. De doctrine chiite et pensant que le khalifat doit revenir à la descendance d’Ali, ils considèrent les khalifes Abbassides comme des usurpateurs. Aussi, dès sa prise de pouvoir en 909 à Raqqada, le premier représentant de cette dynastie, Ubayd Allah revêt le titre de Mahdi et celui de commandeur des croyants. Il constitue une armée parmi les Kutamas, et s’attaque aux Aghlabites dont il conquiert l’émirat en une quinzaine d’années (893-909). Cependant, les tribus berbères zénètes d’Abu Yazid en 944 s’emparent de Kairouan. Le chef berbère Ziri Ibn Menad, ayant réuni sous son autorité les tribus Sanhadja, met en déroute les tribus zénètes et sauve l’empire Fatimide. Il y gagne le poste de gouverneur du Maghreb central comme récompense de sa fidélité. Peu à peu, l’armée affaiblie des Fatimides se recompose, puisant toujours ses forces chez les Kutamas, mais aussi désormais en Perse et en Syrie. Ils parviennent finalement à se réimposer en maîtres du Maghreb occidental, avant de tourner leurs efforts armés vers l’Orient, pour aboutir à la conquête de l’Egypte en 969. À partir de ce moment, les Fatimides commencent à se désintéresser de leurs terres d’origine, les laissant au fur et à mesure tomber aux mains des Zirides à tel point qu’en 1060 la dynastie n’a plus pour territoire que l’Égypte. Le Maghreb a connu également la domination de la dynastie Maghraoua de 970/1068 et celle des Zirides de 972 à 1152. Les Maghraouas sont une tribu zénète dont le royaume est dans le Chlef actuel. Les Maghraouas s’allient aux Fatimides puis aux Omeyyades, mais finissent par former une dynastie indépendante avec pour capitale Oujda. Les Maghraouas, grâce à Ziri Ibn Attia, prennent les principales villes de l’ouest : Tlemcen et les Zibans. Les Maghraouas envahissent la partie nord, le Maghreb El Aqsa (actuel Maroc), et choisissent Fès comme capitale. Les deux dynasties Zénètes se font la guerre. Plusieurs chefs des Maghraouas commandent la dynastie jusqu’à sa chute vers 1068. Quant à la dynastie ziride fondée par Bologhine Ibn Ziri, originaire de ces tribus berbères sanhadjas, elle règne sur l’Ifriqiya et une partie d’Al Andalus pendant environ deux siècles avec successivement Achir Kairouan et Mahdia pour capitales. En 1046, alors vassaux des Fatimides, les Zirides rompent totalement leurs relations : en reconnaissant les Abbassides comme califes légitimes, les Zirides montrent ouvertement aux Fatimides qu’ils abandonnent le chiisme. Pour réprimer les Zirides, les Fatimides envoient en 1052 les Hilaliens qui détruisent Kairouan en 1057. Mahdia devient alors la nouvelle capitale de l’empire. De 1014 à 1152 lui succède la dynastie des Hammadite qui est une branche des Zirides puisque son fondateur Hammad Ibn Bologhine est le fils de Bologhine Ibn Ziri. Il gouverne sur un territoire correspondant à peu près à l’actuelle Algérie hors Sahara durant un siècle et demi. Hammad Ibn Bologhine fonde la dynastie en 1014 en se déclarant indépendant des Zirides et en reconnaissant la légitimité des califes Abbassides de Baghdad. Mais c’est seulement en 1018 que les Zirides reconnaissent l’autorité des Hammadides. Leur capitale est dans un premier temps Al Qala, quand, menacée par les Hilaliens, elle devient Béjaïa. Les incursions des Hilaliens, à partir de 1052, affaiblissent grandement la dynastie jusqu’à ce qu’elle soit définitivement vaincue à l’arrivée des Almohades. À la suite de la rupture avec les Zirides et dans le but de les punir, les Fatimides envoient les Hilaliens, une confédération de tribus venues en majorité d’Egypte. Ils étaient alliés avec les Hammadides ce qui permit la destruction des Ifrenides. En 1152, un siècle après l’arrivée des premiers contingents bédouins, les Béni Hilal se regroupent pour faire face à la puissance grandissante des Almohades, maîtres du Maghreb El Aqsa et de la plus grande partie du Maghreb central. Mais ils sont écrasés à la bataille de Sétif. Paradoxalement, cette défaite n’entrave pas leur expansion, elle en modifie seulement le processus. Les Almoha-des, successeurs d’Abd El Moumen, n’hésitent pas à utiliser leurs contingents et ordonnent la déportation de nombreuses fractions Ryâh, Athbej et Djochem dans diverses provinces du Maghreb El Aqsa, dans le Haouz et les plaines atlantiques qui sont ainsi arabisés.

3. De la période de la dynastie des Almohades Il y a lieu également de retenir l’importance de la dynastie Almoravide qui est une dynastie berbère en provenance du Sahara qui régna sur le Sahara, une partie du Maghreb et une grande partie de la péninsule Ibérique de la fin du XIe au début du XIIe siècle. C’est Yahya Ibn Brahim qui, en islamisant en 1035 sa tribu berbère, donne naissance à une communauté religieuse militaire qui sera à l’origine de la dynastie almoravide. Mais, c’est souvent Abdallah Ibn Yassin qui est considéré comme le père spirituel de ce mouvement. À la tête d’une armée de plus en plus impressionnante, il convertit par la force ses voisins, profitant du prétexte pour agrandir son influence territoriale. Dès 1054, il part à la conquête de l’empire du Ghana. Le successeur d’Abdallah Ibn Yasin, Abu Bakr Ibn Omar est considéré comme le premier souverain almoravide. C’est lui, qui, aux alentours de 1070 fondera la ville de Marrakech avant de repartir au Ghana prendre sa capitale en 1076. Marrakech est la capitale d’un empire immense, du Niger au Tage. C’est l’apogée des Almoravides qui mènent l’une des plus grandes puissances méditerranéennes, mais aussi africaines. Certaines sources indiquent aussi que les Almoravides prennent Tlemcen et Alger. D’autres sources signalent que les Almoravides s’arrêtent aux bornes des Zirides et aussi des Hammadides. D’autres sources, enfin, soutiennent que vaincus par les Hammadides délaissent Tlemcen en 1002. La prise de Marrakech par les Almohades en 1147 marque la fin de l’empire des Almoravides. Le mouvement almohade composé des Masmoudas et des Zénites, est né en réaction à l’autorité Makeliste en place, à savoir les Almoravides en relation avec les dissidents exilés dans le Haut Atlas qui commencèrent par créer une communauté militaire et religieuse, dans les années 1120. La guerre éclate, et Tlemcen, Fès puis Marrakech tombent, annonçant la disparition des Almoravides en 1147. Au fur et à mesure des années et des différents règnes, les Almohades vont agrandir leur royaume, et finir par unifier tout le Maghreb et le sud de l’Al Andulus pendant un demi-siècle. La dynastie Hafside, d’abord alliée et vassale des Almohades se proclame indépendante en 1230. Elle est alors divisée entre les deux capitales Béjaïa et Tunis. C’est au XVe siècle, sous Muhammad IV Al Mutansir que la dynastie connaît son apogée. Les Hafsides contrôlent alors un territoire qui s’étend de l’est de l’Algérie à partir d’Alger jusqu’au nord-ouest de la Libye. Au, l’empire, de nouveau grandement affaibli par des luttes internes, subit les attaques des Espagnols qui débarquent sur les villes côtières comme Béjaïa. La dynastie des Zianides aussi appelés Abdalwalides est une dynastie berbère zénète ayant régné depuis Tlemcen de 1235 à 1556 fondé par Yaghmoracen Ibn Zyan et dont l’étendue du Royaume préfigurent une partie de l’actuelle Algérie. Les Abdalwadides, furent refoulés vers les hautes plaines d’Oranie par l’invasion des Hilaliens en 1051. Les Zianides sont vaincus par les Ottomans en 1556. Selon Ibn Khaldoun, la dynastie Mérinide a régné de 1258 à 1465. Elle serait d’origine zénète issue de la tribu des Wassin. Établis dans le sud des Aurès (Biskra-Algérie), les Banu Marin furent peu à peu, dès le XIe siècle, poussés vers l’Ouest par l’arrivée des tribus arabes des Banu Hilal. Les Mérinides dominent, diverses régions de l’actuel Maroc et imposent durant une année leur pouvoir sur une partie du Maghreb. Le centre de leur royaume se situe entre Taza et Fès. Ses frontières évoluent avec le temps, de l’océan Atlantique à l’ouest, la mer Méditerranée au nord, le domaine des Zianides à l’Est, et le Sahara au sud. En 1358 la mort d’Abu Inan Faris, tué par l’un de ses vizirs marque le début de la décadence de la dynastie qui ne parvient pas à refouler les Portugais et les Espagnols, leur permettant, à travers leurs continuateurs les Wattassides de s’installer sur la côte. La résistance s’organisera autour des confréries et des marabouts. Rappelons que les musulmans composés en partie de Berbères islamisés ont régné près de huit siècles de 711 à 1492 en Andalousie. Une tête de pont musulmane s’est maintenue durant une période en Provence dans le massif des Maures et à Ramatuelle dans le sud de la France jusqu’à la fin du Xe siècle. La Sicile fut également sous domination musulmane pendant près de 250 ans, et la majeure partie de ses habitants se convertirent à l’Islam jusqu’à ce que les armées chrétiennes et normandes ne récupèrent l’île, fondant le royaume de Sicile. A la suite du décret d’expulsion des Morisques, une partie d’entre eux s’installe ailleurs en Europe, plusieurs se convertissent au christianisme, le reste se réfugie en Afrique du Nord.

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