Face aux enjeux géostratégiques et économiques mondiaux: Quel sera l’apport de la foire commerciale intra-africaine (IATF 2025) ?

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Selon différents observateurs , la Foire commerciale intra-africaine -IATF -2O25    prévue à Alger du 4 au 10 septembre, constitue un catalyseur décisif pour la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Cette présente contribution pose la problématique  de l’Afrique face aux enjeux géostratégiques.

1.-Face aux tensions sécuritaires  et aux turbulences de l’économie mondiale, une nouvelle architecture des relations internationales se dessine  entre 2025/2030 , et l’Afrique, continent à fortes potentialités   couvrant  30,353 millions de km2  pour une population fin 2024  d’environ 1,4 milliard d’habitants, extrapolé à 25%  de la population mondiale 2040/2050 avec une jeunesse dynamique , expliquant  les actions de déstabilisation d’acteurs externes , les rivalités des grandes  puissances et de certains pays émergents pour contrôler ses richesses colossales ,  doit avoir une nouvelle gouvernance  d’adaptation tenant compte de sa riche anthropologie culturelle.  Les ingérences  de  puissances  étrangères, en Afrique  ont  bouleversé toute la  carte géopolitique de la région avec des impacts sécuritaires, ,  favorisant  le terrorisme  et les flux migratoires.  Contrairement à certaines supputations, selon le centre d’études stratégique pour l’Afrique en 2023,  la  plupart de la migration africaine se produit à l’intérieur du continent puisque les migrants cherchent des emplois dans des centres économiques voisins où 8% des migrants africains sont à l’intérieur du continent,  l’Afrique ne représentant  que 14 % des migrants du monde, comparé à 41 % venus d’Asie et 24 % d’Europe de l’Est.   D’une manière générale, pour   l’Afrique, la lutte contre le terrorisme devra  s’attaquer à l’essence , une bonne gouvernance et le développement, le tout sécuritaire ayant des limites,  nécessitant  une coopération des pays de la zone devant lever les contraintes du fait que la corruptibilité générale des institutions, pèsent lourdement sur les systèmes chargés de l’application des lois et la justice pénale en général qui ont des difficultés à s’adapter aux nouveaux défis posés par la sophistication des réseaux du crime organisé ( la cyber criminalité) C’est que la . collaboration inter-juridictionnelle est ralentie par l’hétérogénéité des systèmes juridiques en Afrique . De plus, la porosité des frontières aussi bien que la coordination entre un grand nombre d’agences chargées de la sécurité aux frontières posent des problèmes où la stratégie doit viser à attirer graduellement les utilisateurs du système informel vers le réseau formel et ainsi isoler les éléments criminels pour mieux les cibler tout en diminuant les dommages collatéraux pour les utilisateurs légitimes.  Sur le plan économique, le taux d’intégration selon la CNUCED ne dépasse pas 15/17%, l’intégration maghrébine ne dépassant pas  3% . Concernant l’Algérie    sur une valeur totale   –importations et exportations  d’environ 95  milliards de dollars , en 2O23 selon les statistiques douanières, les échanges commerciaux entre l’Algérie et l’Afrique  ont atteint 4,6 milliards de dollars, avec 2,7 milliards de dollars d’exportations vers le continent et 1,87 milliard de dollars d’importations soit 4,8% de ses échanges,  , 8O% de ses échanges constituées principalement des hydrocarbures pour ses exportations se faisant avec l’Occident et la  Turquie  dont 5O% avec l’Europe,   les exportations hors hydrocarbures étant très marginales. Notons sans verser dans la sinistrose que selon les rapports du FMI et de la Banque mondiale 2O23/2024  malgré des résultats mitigés pour certains pays,, bon nombre pays africains connaissent une croissance appréciable grâce à l’amélioration de  leur gouvernance et à réaliser d’excellentes performances économiques et sociales. Le taux de croissance du continent devrait atteindre 3,9 % en 2025  et 4 % en 2026 selon la BAD (Banque africaine de développement). Le PIB de l’ensemble du continent de 1,4 milliard d’habitants a été estimé en 2024 à 3200 milliards de dollars contre 2 800 en 2023. Ce qui est presque l’équivalent du PIB de l’Inde qui a plus de 1,4 milliard d’habitants et un PIB de 3.890 milliards $. À titre de comparaison, le PIB de la France est de 2 917 milliards  de dollars pour 68 millions d’habitants.. Cependant nous avons non pas une Afrique mais des Afriques, avec d’importantes disparités. Ainsi, en 2024, selon les données de la Banque mondiale et du FMI les cinq premiers pays en termes de PIB sont les suivants : Afrique du Sud, PIB de 372,23 milliards $ ; Égypte 347,69 milliards  de dollars  ; Algérie 266,68 milliards de dollars ; Nigeria 252,64 milliards de dollars ; Éthiopie 205,13 milliards  dollars. Cela donne un total de 1444,37 milliards de dollars , représentant 45,13 % du continent en 2024. Or, le PIB global de l’Afrique est loin de ses immenses potentialités. Il ne représentait que 3,57 % du PIB mondial de 103 000 milliards $ en 2024. Les obstacles majeurs sont le manque de vision et de stabilité, le cancer bureaucratique qui enfante la corruption, et la fuite des cerveaux et des capitaux qui prive le continent Afrique de financements importants pour son développement.

2.- .A cet effet, il est important d’analyser la stratégie du NEPAD né en octobre 2OO1 dont l‘Algérie et l’Afrique du Sud ont juré un rôle majeur, toujours d’une brûlante actualité, une  initiative qui  est une synthèse entre deux plans: celui de l’Algérie  et de l’Afrique du Sud , appelé «Millenium African Plan» (MAP), et celui du président sénégalais dénommé plan OMEGA. Ces deux plans sont fusionnés pour donner la «Nouvelle Initiative Africaine» (NIA). La NIA prendra plus tard le nom de «Nouveau Partenariat Pour le Développement de l’Afrique» ou NEPAD (de l’anglais «New Partnership for African Development).  Les sujets tels que l’intensification de la lutte contre  pauvreté et le sous-développement des pays africains ainsi que leur  constante marginalisation  étaient le fondement de cette une nouvelle vision garantissant la régénération avec essentiellement cinq  objectif: premièrement,  supprimer la pauvreté; deuxièmement,  placer les pays africains, tant individuellement que collectivement, sur la voie d’une croissance et un développement durable; troisièmement, mettre fin à la marginalisation de l’Afrique dans le processus de globalisation; quatrièmement,  accélérer la libéralisation de la femme, cinquièmement, intégrer l’Afrique dans l’économie mondiale. Aussi, les principes fondamentaux du NEPAD sont d’ancrer la reconstruction du continent sur les ressources des populations africaines; favoriser un partenariat avec  les Africains; former un nouveau partenariat avec le monde industrialisé en s’assurant, entre autres choses, qu’il n’y ait plus de déséquilibre entre l’Afrique et le monde développé et s’engager à assurer que tous les partenariats avec le NEPAD soient liés aux objectifs de développement du nouveau millénaire. Quant aux priorités, elles découlent des principes précédents qui peuvent s’articuler autour des axes interdépendants suivants : premièrement,  – établir des conditions favorables au développement en assurant la paix et la sécurité, la démocratie, la bonne gouvernance politique, économique et d’entreprise, avec un accent sur la gestion financière publique, la coopération et l’intégration sous- régionales; deuxièmement, changer les politiques et renforcer les investissements dans les secteurs, notamment l’agriculture qui est la priorité des priorités en raison de la famine croissante. C’est pour tenir compte de ces contraintes qu’en mai 2002, le NEPAD a établi, en collaboration avec la FAO, un «Programme détaillé pour le développement de l’agriculture africaine» Car la l’Afrique est  handicapée: par plusieurs facteurs exogènes et endogènes : le taux élevé de  l’endettement  extérieur via le remboursement  qui accapare une fraction croissante de son PIB, avec  un déficit de 1 200 milliards $ d’ici à 2030 pour financer ses objectifs de développement durable et selon  la BAD, les pertes liées aux flux financiers illicites ont presque doublé en cinq ans passant de 50 milliards $ par an en 2015 à plus de 90 milliards de dollars  2023 ; ce montant correspond presque à l’ensemble des investissements et aides étrangères reçus annuellement par l’Afrique ;  l’exode massif de cerveaux avec des pertes évaluées à des dizaines de milliards de dollars, souvent la formation de base ayant été supportée par les Etats africains,  et la faiblesse du développement du capital humain, , particulièrement la santé, l’éducation, les sciences et technologies et le développement des compétences, par l’irrégularité des précipitations, problème qui influe sur le pourcentage de terres arables irriguées  et donc sur l’agriculture ; la faiblesse du   développement humain;  par la faiblesse  des infrastructures, y compris l’eau, le gaz, l’électricité, la technologie d’information et de communication (TIC); la faiblesse de  la diversification de la production et des exportations, souvent mono  exportateur de matières  premières. Le NEPAD préconisait  de  mobiliser les ressources en renforçant l’épargne et les investissements nationaux ;   intégrer la sphère informelle dominante en Afrique ; et améliorer  de la gestion des revenus et des dépenses publiques; lutter contre la corruption à travers la fuite des capitaux . Ce sont autant de conditions  pour  renforcer à la fois le développement interne s’assurant ainsi que les besoins du continent sont pris en considération,   et la participation au sein  commerce mondial.  L’objectif est   de fixer durablement les populations par un développement durable et éviter ce mythe d’eldorado artificiel, notamment l’Europe, l’Amérique ou l’Australie- passant par des sous intégrations régionales, n’existant pas une Afrique mais des Afriques l’intégration sous- régionales A cette initiative restreinte  qui a eu un impact relativement  mitigé, nous avons assisté récemment à un autre initiative    la mise en place de   la  Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf)   adopté le 1er janvier 2021. Environ  54 pays africains l’ayant  signé et 47  ratifié., qui selon la Banque mondiale pourrait permettre aux pays africains de faire sortir de l’extrême pauvreté 30 millions d’habitants et d’accroître le revenu de 68 millions d’autres personnes qui vivent avec moins de 5,50 dollars par  jour  et   sur  les 450 milliards de dollars de gains potentiels, environ 300 milliards proviendraient des mesures de facilitation du commerce visant à lever les freins bureaucratiques et à simplifier les procédures douanières.  L’accord devrait réduire les droits de douane entre les pays membres et traitera d’aspects de politique générale liés notamment à la facilitation des échanges et aux services, tout en englobant des dispositions réglementaires telles que les normes sanitaires et les barrières techniques au commerce. La mise en œuvre des mesures  de la ZLECAf permettrait de réorganiser les marchés et les économies de la région et de stimuler la production dans les secteurs des services, de l’industrie manufacturière et des ressources naturelles.  La création d’un marché commun de biens et de services renforcera la complémentarité économique du continent, stimulera le commerce intra-africain , augmentera les revenus de l’Afrique et permettra à des  millions d’Africains de sortir de l’extrême pauvreté.

En conclusion, s’impose pour l’Afrique de profondes réformes structurelles en Afrique à la fois politiques, économiques, sociales et culturelles afin de confronter les nombreux défis qui attendent les dirigeants africains. Ils devront concilier l’efficacité économique afin d’assurer la création de richesses permanentes et une plus grande cohésion sociale. C’est la condition d’un fort  f taux de croissance permettra d’absorber l’important flux annuel de demandes d’emploi, qui s‘ajoute au taux de chômage actuel, et d’améliorer la difficile situation des populations, permettant ainsi de réduire les conflits et les guerres ainsi que les flux migratoires.  Pour faire face à l’impact des nouvelles taxes douanières imposées par le président américain, des stratégies d’adaptation sont nécessaires pour l’Afrique  et  le  nouveau modèle de croissance devra être orienté vers les industries de l’avenir, la transition numérique et énergétique. Les pays développés et émergents  opérant dans le continent doivent comprendre qu’il est dans leurs intérêts de contribuer par des partenariats gagnants – gagnants à la régénération de l’Afrique avec  des richesses colossales, une intelligentsia dynamique, et une importante diaspora partout dans le monde sont des atouts pour que l’Afrique devienne la locomotive de la croissance de l’économie  mondiale. En bref,  l’Afrique sera avant tout ce que les Africains voudront qu’elle soit.

Professeur des universités- Expert international-Docteur d’Etat 1974 Abderrahmane Mebtoul 

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