Criminalisation du discours haineux : Les instructions du président viennent en temps opportun

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Les instructions données lundi par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune au Premier ministre, Abdelaziz Djerad d’élaborer un projet de loi criminalisant toutes formes de racisme, de régionalisme et de discours de la haine dans le pays «interviennent en temps opportun», a estimé le président du Conseil national des Droits de l’Homme (CNDH), Bouzid Lazhari. Ce dernier a expliqué que les instructions du Président Tebboune «interviennent en temps opportun au vu de la recrudescence du discours de haine sur les différents réseaux sociaux», affirmant que cette décision «vise la protection des droits individuels, la défense du principe d’égalité et la préservation de l’unité nationale».»

Une loi répondant aux traités internationaux ratifiés par l’Algérie, engageant les Etats à la promulgation de législations criminalisant le discours de la haine, s’inscrit en droite ligne de la consécration des Droits de l’Homme», a-t-il souligné. À ce propos, le président du CNDH a cité le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par l’Algérie en décembre 1989, lequel stipule en son article 20 que «tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence est interdit par la loi». Rappelant que de nombreux pays avaient des lois criminalisant le racisme et la haine, il a cité les Etats-Unis d’Amérique, dont le premier amendement (à la Constitution) soutient que «l’Etat n’intervient pas en matière de liberté d’opinion, mais la Cour suprême américaine est tenue, toutefois, d’intervenir lorsqu’il s’agit d’un discours de la haine, en ce sens où il porte atteinte au principe d’égalité». «Avec l’émergence et le développement des réseaux sociaux, le problème du discours de haine est devenu une préoccupation mondiale, d’où le recours de nombreux pays comme l’Angleterre, l’Irlande, le Canada et l’Inde à la mise en place de lois criminalisant des discours de la haine qui attentent à la souveraineté nationale», a-t-il expliqué. Concernant l’élaboration du projet de la loi, Lazhari a indiqué que «cela relève des prérogatives du Gouvernement», ajoutant que ce dernier pourrait suggérer une loi criminalisant ces phénomènes ou introduire des amendements au Code pénal en vigueur. Le code pénal actuel prévoit des sanctions dont l’objectif est la protection des constantes de la nation, comme la criminalisation l’atteinte à l’Islam et ses symboles, a-t-il rappelé ajoutant qu’il était possible d’ajouter des articles traitant de toutes les formes de racisme, de régionalisme et de haine, avec une définition précise de la notion de haine sur les réseaux sociaux. Pour le président du CNDH, le projet de cette loi s’inscrit dans le cadre des principes consacrés par la Constitution et pourrait être inclus dans le cadre de l’atteinte à l’ordre public, «étant donné que le discours de haine attente à la vie privé et au principe d’égalité et d’équité, avec tous les risques de division et de violence pour la société, ce qui constitue une menace pour l’unité nationale», a-t-il ajouté.

Une décision judicieuse pour l’avocat Farouk Ksentini Qualifiant la décision du président de la République de «judicieuse» et d’«opportune», l’avocat Farouk Ksentini a déploré «une dramatique propagation, ces derniers temps sur les réseaux sociaux, de discours de haine et de division et de propos racistes et régionalistes touchant aux origines». Il a estimé dans ce sens, qu’il était temps de mettre terme à ces pratiques contraires à l’éthique et aux traditions de la société algérienne. Pour maître Ksentini, il est impératif de criminaliser ces pratiques qui menacent la stabilité sociale et l’unité nationale à travers l’élaboration d’un texte juridique inspiré de l’esprit de la Constitution et des lois de la République qui interdisent toute atteinte à l’unité et aux constantes de l’identité nationale. En ses articles relatifs aux principes généraux régissant la société algérienne, la Constitution dispose de que «l’Algérie est unie et indivisible», «l’islam est la religion de l’Etat», «l’Arabe est la langue nationale et officielle» et «tamazight est également langue nationale et officielle», l’Etat étant tenu par la Constitution de «protéger les symboles de l’Etat et du peuple». Maître Ksentini a indiqué que le projet de loi, dont l’élaboration a été ordonnée par le pPrésident de la République, «doit criminaliser toutes les pratiques et discours régionalistes et discriminatoires à travers l’activation de poursuites judiciaires par le procureur de la République, qui agira avec ou sans plainte en vue de protéger la cohésion nationale et les constantes». Il a mis en avant «l’impérative application sur le terrain de ce texte de loi avec la rigueur qui s’impose», car, a-t-il dit, «il s’agit là de défendre l’unité nationale». Le président de la République a instruit le Premier ministre, Abdelaziz Djerad d’élaborer un projet de loi criminalisant toutes formes de racisme, de régionalisme et du discours de la haine dans le pays. La présidence de la République a précisé dans un communiqué que «cette mesure intervient après avoir constaté une recrudescence du discours de la haine et de l’incitation à la fitna (discorde), notamment à travers les réseaux sociaux», ajoutant qu’elle intervient aussi dans le but «de faire face à ceux qui exploitent la liberté et le caractère pacifique du Hirak (mouvement populaire) pour brandir des slogans portant atteinte à la cohésion nationale». «Tout un chacun est appelé à se conformer à la Constitution et aux lois de la République, notamment le respect des constantes de la Nation et ses valeurs, les principales composantes de l’identité et de l’unité nationales ainsi que les symboles de l’Etat et du peuple», conclut le communiqué de la présidence de la République.

  1. T.M.