Cancer colorectal: L’aspirine diviserait par deux le risque de rechute

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L’aspirine figure sur la liste des médicaments essentiels de l’OMS depuis 1977. Un essai clinique européen révèle qu’une faible dose d’aspirine, prise chaque jour après une opération du cancer colorectal, pourrait considérablement diminuer les risques de rechute chez certains malades. Une découverte pleine d’espoir, mais qui doit être confirmée et utilisée avec prudence.  Il touche aussi bien les hommes que les femmes, généralement après 50 ans. Grâce au dépistage (test immunologique proposé tous les deux ans à partir de 50 ans) et aux progrès de la chirurgie, le pronostic s’est amélioré. Mais une inquiétude persiste : même après un traitement réussi, le risque de récidive (c’est-à-dire que le cancer réapparaisse) reste élevé. L’étude a été menée en Scandinavie a suivi plus de 2 000 patients opérés d’un cancer colorectal pendant trois ans. Les chercheurs les ont répartis en deux groupes : un groupe a pris chaque jour une faible dose d’aspirine (160 mg, soit un comprimé équivalent à l’aspirine « cardio » qu’on utilise parfois pour fluidifier le sang) ; l’autre groupe a pris un placebo, c’est-à-dire une pilule sans aucun effet. Le but était simple, voir si l’aspirine pouvait empêcher le cancer de revenir. Chez un certain sous-groupe de patients, le risque de récidive a été réduit presque de moitié. Pour être précis : dans le groupe placebo, environ 14 % des patients ont rechuté en trois ans ; dans le groupe aspirine, ce chiffre est tombé à 7,7 %. Ces chiffres peuvent sembler abstraits, mais cela signifie que, pour 100 patients semblables, 14 risquent une rechute sans traitement, contre seulement 8 avec l’aspirine. Une différence qui change la vie.

Pourquoi l’aspirine n’agit-elle pas sur tout le monde ?

Là est toute la subtilité. L’étude a montré que l’effet bénéfique de l’aspirine ne se retrouvait pas chez tous les patients. Il concerne surtout ceux dont la tumeur présente une mutation génétique particulière, appelée mutation PIK3/PI3K. En clair, l’aspirine ne va pas protéger tout le monde. Mais comme environ un tiers à 40 % des cancers colorectaux portent cette mutation, cela représente tout de même un grand nombre de patients qui pourraient bénéficier de ce traitement simple et peu coûteux. Aussi, l’effet protecteur semblait plus fort chez les femmes que chez les hommes, bien que tous aient suivi le traitement avec la même rigueur. Les scientifiques n’ont pas encore d’explication claire à cette différence. Il faut rester prudent. L’aspirine n’est pas un bonbon. C’est un médicament puissant qui, même à faible dose, peut provoquer des effets secondaires parfois graves. Les risques principaux sont : saignements digestifs (estomac, intestins), parfois graves ; ulcères ; réactions allergiques ; interactions avec d’autres médicaments (notamment les anticoagulants). Dans l’étude, plusieurs patients ont effectivement présenté des complications de ce type. C’est pourquoi les chercheurs rappellent que l’aspirine ne peut pas être conseillée à tout le monde en prévention, sans encadrement médical. Pourquoi cette découverte est-elle importante ? Parce qu’elle ouvre une piste simple, accessible et peu coûteuse pour réduire les récidives du cancer colorectal. Aujourd’hui, après une chirurgie, les patients reçoivent parfois de la chimiothérapie ou d’autres traitements pour éviter une rechute. Mais ceux-ci sont lourds, coûteux, et souvent associés à des effets secondaires sévères. L’idée qu’un médicament aussi banal et peu cher que l’aspirine puisse compléter cette prise en charge est donc une véritable révolution. En France, où le cancer colorectal reste le deuxième cancer le plus meurtrier après celui du poumon, une telle avancée pourrait sauver des milliers de vies à long terme. L’étude présente néanmoins plusieurs limites qu’il faut garder à l’esprit. Le suivi n’a porté que sur trois ans, ce qui ne permet pas encore de savoir si l’effet protecteur de l’aspirine se maintient dans le temps. De plus, le bénéfice observé ne concerne qu’une partie des patients, en particulier ceux dont la tumeur présente la mutation PIK3/PI3K.  Les chercheurs ont aussi relevé des différences entre les sexes, avec une protection plus marquée chez les femmes, sans explication claire pour l’instant. Enfin, certains participants ont dû interrompre le traitement en raison d’effets indésirables, rappelant que l’aspirine n’est pas dénuée de risques. Il n’est pas question de se lancer seul dans une cure d’aspirine. Même si les résultats de l’étude sont prometteurs, les spécialistes rappellent qu’une prise régulière et prolongée peut présenter des risques sérieux. Ce médicament n’a pas vocation à être utilisé en prévention générale du cancer colorectal, mais il pourrait, à terme, devenir une piste thérapeutique réservée à certains patients identifiés grâce à une analyse génétique et toujours dans un cadre médical strict. De nouvelles recherches sont d’ailleurs en cours pour confirmer ces données et, peut-être, inscrire l’aspirine dans les futures recommandations officielles.

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