Accord d’association, aplanir par le dialogue les divergences: L’Algérie et l’Europe deux partenaires stratégiques

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Selon les agences internationales Reuters et l’AFP du  14 juin 2024, Bruxelles a ouvert une procédure contre l’Algérie, accusée de restreindre depuis 2021 les exportations et investissements de l’Union européenne (UE), menaçant de recourir à l’arbitrage international, et a réclamé des consultations avec les autorités du pays.    L’Accord d’association Algérie-UE  en vigueur depuis le 01 septembre 2005 est, pour le moins qu’on puisse dire, en stand-by, l’Algérie, qui s’estime lésée, avait  demandé depuis plusieurs années, sa révision, afin d’asseoir une meilleure base d’échanges mutuellement bénéfique.

1-Les principes de l’Accord d’association sur le plan économique  sont identiques à ceux que l’on retrouve avec les règles de l’OMC où  les pays membres accaparent plus de 95 % du commerce mondial et la majorité des pays de l’OPEP et hors OPEP  ainsi que  la Chine  et la Russie, l’Algérie qui  a déposé sa demande d’adhésion (à l’époque au GATT) en juin 1987 et  depuis elle n’est toujours pas entrée à l’OMC  Il y a lieu de préciser que les principales résolutions de la quatrième Conférence ministérielle, tenue à Doha, en novembre 2001, a examiné les problèmes que rencontrent les pays en développement pour mettre en œuvre les Accords actuels de l’OMC, c’est-à-dire les accords issus des négociations du Cycle d’Uruguay. La décision sur la mise en œuvre a porté au titre de la balance des paiements avec des conditions moins rigoureuses énoncées dans le GATT. Cela est applicable aux pays en développement s’ils restreignent leurs importations pour protéger l’équilibre de leur balance des paiements.. Du point de vue de l’Accord d’association, l’on devra distinguer les incidences générales des incidences sur les services énergétiques. En ce qui concerne les incidences générales : l’interdiction du recours à la « dualité des prix » pour les ressources naturelles, en particulier le pétrole (prix internes plus bas que ceux à l’exportation) ; l’élimination générale des restrictions quantitatives au commerce (à l’import et à l’export) ; obligation de mettre en place les normes de qualité pour protéger la santé tant des hommes que des animaux (règles sanitaires et phytosanitaires). Les conséquences de tels accords sont : le démantèlement des droits de douanes et taxes pour les produits industriels et manufacturés sur une période de transition ; les relations de partenariat entre les deux parties seront basées sur l’initiative privée. Tous les monopoles d’Etat à caractère commercial sont ajustés progressivement pour une période à négocier. La coopération économique devra tenir compte de la composante essentielle qu’est la préservation de l’environnement et des équilibres écologiques. En ce qui concerne les incidences sur les services énergétiques, l’Algérie se doit d’être attentive à la nouvelle stratégie énergétique qui se dessine entre 2024/2030 tant au niveau européen qu’au niveau mondial. Les accords dont il est question devraient faire passer les industries algériennes du statut d’industries protégées à des industries totalement ouvertes à la concurrence internationale. Ces accords prévoient la suppression progressive des obstacles tarifaires et non tarifaires, avec d’énormes défis aux entreprises algériennes. Si ces accords ne peuvent avoir que peu d’impacts sur le marché des hydrocarbures en amont, déjà inséré dans une logique mondiale (pétrole), il en va autrement de tous les produits pétroliers à l’aval qui vont être soumis à la concurrence européenne et internationale. Ainsi, est interdit la dualité des prix, mesure par laquelle un gouvernement maintient des prix internes à des niveaux plus bas que ceux qui auraient été déterminés par les forces du marché. Autre incidence, l’ouverture à la concurrence du marché des services énergétiques qui concernent toutes les activités et l’urgence d’intégrer la sphère informelle dominante en Algérie qui contrôle selon les données officielles  fin 2022  47 milliards de dollars  environ un tiers de la masse monétaire en circulation. Enfin, l’environnement considéré comme un bien collectif, l’Algérie doit s’engager à mettre en œuvre les différentes recommandations contenues dans les chartes sur l’énergie.   

2.-les négociations entre l’Algérie et l’Europe concernant l’Accord d’association ont connu des divergences qui se sont accentuées suite aux décisions du gouvernement courant 2009 de postuler 51 pour cent aux Algériens dans tout projet d’investissement, qui selon la commission européenne  l’Algérie aurait violé les articles 32, et 37, 39 et 54 de cet Accord- Et selon Bruxelles depuis  la part de l’UE dans les importations de l’Algérie a régressé au bénéfice de la Chine avec un important déficit  commercial au dépend de l’Algérie-Selon les statistiques douanières algériennes de 2010 à fin 2020,  avec une baisse en valeur entre 2021/2022, les exportations de la Chine à destination de l’Algérie ont totalisé environ 76 milliards de dollars. Ainsi, la Chine demeurait le principal fournisseur de l’Algérie avec une moyenne annuelle depuis 2013 de 8 milliards de dollars d’exportations vers l’Algérie. Alors que ses importations depuis l’Algérie, constituées essentiellement d’hydrocarbures, se sont chiffrées à seulement 14,793 milliards de dollars, donc un déficit commercial de l’Algérie avec la Chine à plus de 61 milliards de dollars (voir A. Mebtoul interview le 25 mai 2022 à Chine Magazine). Pour Bruxelles , pour toute évaluation,  il faut t inclure les importations européennes de pétrole et de gaz et dans ce cas le déséquilibre commercial est en défaveur de l’Europe et  en dehors des hydrocarbures que peut exporter l’Algérie en direction de l’Europe et que si l’Algérie n’a pas tiré profit de l’Accord d’Association, c’est parce que les réformes structurelles n’ont pas été menées et que cela dépend avant tout du gouvernement algérien  de mener les réformes nécessaires pour profiter de l’ accord  d’’Association  L’Europe n’est pas contre une révision de l’Accord mais souhaite  la création d’un cadre juridique stable et transparent, propice à l’investissement, ainsi que la réduction des subventions, la modernisation du secteur financier, la levée es entraves au secteur privé,  le développement du potentiel des partenariats public-privé qui  font partie des réformes structurelles nécessaires qui doivent encore être menées, se félicitant  de l’assouplissement introduit récemment par les autorités algériennes  de  la règle 51/49, pour cent au moins pour les secteurs non-stratégiques, encore  qu’il faille définir avec exactitude  ce qui est stratégique et ce qui ne l’est pas- Selon les données  de Bruxelles en  2021, la valeur globale des échanges commerciaux de tous les produits entre l’Algérie et l’Union Européenne, a atteint un montant de 31,395 milliards d’euros. Les exportations de l’Algérie vers les vingt-sept Etats membres de l’Union se sont établies à 18,747 milliards d’euros et ses importations en provenance de ces pays a été de l’ordre de 12,648 milliards d’euros, ces échanges englobant les ventes algériennes d’hydrocarbures à l’Union européenne, faisant  ressortir un excédent de la balance commerciale en faveur de l’Algérie d’un montant de 6,099 milliards d’euros  et par .rapport à l’année 2020, la valeur totale des échanges entre les deux parties a augmenté de 6,535 milliards d’euros, soit une hausse de 26%, les exportations de l’Algérie vers l’Union ayant augmenté de 65%, tandis que ses importations ont baissé de 6%.En 2022, la Chine était le 1er fournisseur de l’Algérie (avec une part de marché de 18,6%), suivie par la France (14 %) et l’Italie (7,7 %)  Sur le plan géostratégique, pour l’Europe l’Algérie est un acteur déterminant de la  stabilité régionale  et de l’approvisionnement en énergie de l’Europe . Dans  plusieurs rapports entre 2018/2023 -l’Union européenne ont salué les efforts de l’Algérie en matière de sécurité et de défense où les tensions au niveau de la région influent  par ricochet, sur l’Europe, ainsi que  la stabilisation de son voisinage immédiat, considérant que l’Algérie demeure un acteur-clé au niveau régional et international pour la sécurité. L’effort continu, de modernisation des équipements, ainsi que les nombreux effectifs de sécurité dont l’Algérie dispose, ont permis au pays de contrer de façon efficace les menaces terroristes.  L’évolution de la crise libyenne, malienne  et la situation complexe dans la région du Sahel ont amené l’Armée nationale populaire (ANP) à déployer des forces de sécurité supplémentaires aux frontières. Par ailleurs sur le plan énergétique, l’Europe reconnaît  outre les exportations de GNL que  l ’Algérie en 2023 est  devenue le deuxième fournisseur de gaz avec 19% avant la  Russie et derrière la Norvège, à travers les canalisations Medgaz via Espagne  et Transmed  via l’Italie  étant donc un acteur stratégique pour l’approvisionnement en énergie de l’Europe. (Voir nos interviews au niveau international google com 202/2024 et  American Herald Tribune 2018).

3-Pour l’Algérie, bien que l’Accord englobe une multitude de domaines de coopération, politique, économique, culturel, la libre circulation des personnes et autres, mais c’est le volet relatif au rééquilibrage des échanges commerciaux qui motive le plus la demande de la partie algérienne à renégocier l’accord en question invoquant  le titre 2 de l’accord, portant «libre circulation des marchandises», dans son premier chapitre sur «les produits industriels» où  l’article 11 donne la possibilité à l’Algérie de bénéficier de «mesures exceptionnelles» de durée limitée dérogeant aux dispositions de levée des barrières douanières., bien que ces mesures ne pouvant s’appliquer qu’à des industries naissantes ou à certains secteurs en restructuration ou confrontés à de sérieuses difficultés, surtout lorsque ces difficultés entraînent de graves problèmes sociaux. Les droits de douane à l’importation applicables en Algérie à des produits originaires de la Communauté introduites par ces mesures, ne peuvent excéder 25% ad valorem  et doivent maintenir un élément de préférence pour les produits originaires de la Communauté, mais selon  l’ article 11, l’UE reconnait  à l’Algérie un droit de prendre des mesures de protection, mais ces mesures sont soumises à des conditions défavorables, les droits de douanes à protéger étant  limités à 25% et étant  exigé aussi la mention de préférence de produit d’origine de l’Union européenne. En outre , l’article 24, donne à l’Algérie de prendre des mesures de sauvegarde, en arrêtant l’importation d’une catégorie de produits si elle porte préjudice à la production nationale, devant être renégocié pour rendre son champ d’application plus efficace et avantageux. Aussi, pour l’Algérie, l’objectif de cet accord  est de « densifier » cette coopération, dont   la démarche d’évaluation réclamée ne vise nullement à remettre en cause le cadre global de l’’Accord, mais, bien au contraire, à l’utiliser pleinement dans le sens d’une interprétation positive de ses dispositions permettant un rééquilibrage des liens de coopération  et que seules  des négociations constructives   permettraient de relancer la coopération entre l’Algérie et l’UE dans le but de mettre les relations économiques au centre de cette coopération, de donner à cet accord toute son importance et d’utiliser tout son énorme potentiel dans ses trois composantes: politique, économique et humaine  et  l’Algérie a  toujours plaidé pour le renforcement du «dialogue et de la concertation» entre l’Algérie et l’Union européenne (UE) . Aux préoccupations soulevées par l’UE concernant ses parts de marché en Algérie suite aux mesures de rationalisation des importations prises par le gouvernement algérien dans un contexte bien particulier, cela n’est pas propre à notre pays comme en, témoigne bien avant  l’épidémie du coronavirus les mesures restrictives de bon nombre de pays  tant pour les USA que l’Europe et les tensions avec la Chine L’Algérie  reste   convaincu que les discussions que doivent engager les deux parties  permettront d’arriver à des solutions pragmatiques et acceptables qui prennent en ligne de compte les intérêts légitimes de chaque partie . Pour l’Algérie  faisant un bilan en 2020 , en 15 ans d’application de l’Accord d’association avec l’Union européenne (UE), le partenaire européen a réussi à vendre l’équivalent de plus de 310 milliards de dollars de marchandises, alors que ce même partenaire a acheté pour quelque 15 milliards de dollars de produits algériens, hors hydrocarbures,  Le nouveau code d’investissement assouplissant la règle des 49/51%, ainsi que nouvelle loi des hydrocarbures ont pour objectif combiné avec une lutte contre la bureaucratie néfaste rendent plus trafic le marché algérien afin de  dynamiser l’investissement  direct étranger hors hydrocarbures qui a baissé entre 2008/2023.

En conclusion , contrairement  à certains qui  supputent une détérioration des relations  économiques entre l’Algérie et l’Europe, dans un but de déstabilisation ,  malgré ces divergences conjoncturelles, il s’agit comme je l’ai souligné il y a quelques années lors d’une conférence, à l’invitation du parlement européen à Bruxelles, de dépassionner les relations car la stabilité des deux rives de la Méditerranée, nous impose d’entreprendre ensemble,  l’Algérie et l’Europe étant  deux partenaires stratégiques. C’est que l’Europe reste un partenaire clef  pour l’Algérie comme en témoigne la structure du commerce extérieur de l’Algérie où l’Europe en 2022 s’impose comme le premier partenaire commercial  de l’Algérie avec 61,1 milliards de dollars  soit environ  la moitié des échanges totaux où  En 2022, les échanges commerciaux de l’Algérie se sont élevés à 104,2 Mds USD, en hausse de 37% par rapport à 2021. Mais pour un développement durable , et être un pays pivot au niveau de la  région,  une Nation n’étant respecte que si elle  a une économie forte, des réformes de structures doivent avoir lieu  avec pour finalité une économie diversifiée , loin des aléas de la rente des hydrocarbures( 98% des recettes en devises avec les dérives inclus dans la rubrique hors hydrocarbures pour 67% en 2023),  encourager l’investissement créateur de valeur ajoutée passant par  la lutte contre la bureaucratie afin d’améliorer le climat des affaires, la  refonte du système socio-éducatif, le  foncier, le système financier, (douanier, fiscal, domaine, banques)  l’administration centrale/ locale et une nouvelle régulation sociale ciblée au profit des plus démunis, loin du populisme, des salaires versés sans contreparties productives conduisant  à terme à de vives tensions sociales.

A.M

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