Trois médicaments sur quatre étaient produits localement en 2021 grâce à l’adoption de mesures encourageant le développement industriel permettant de substituer à l’importation, a indiqué le ministre de l’Industrie pharmaceutique, Abderrahmane Lotfi Djamel Benbahmed.
«Pour la couverture de nos besoins, en 2021, l’industrie pharmaceutique nationale couvrait 66% des besoins en valeur, 75% en volume, c’est-à-dire, trois médicaments sur quatre sont produits localement grâce à l’adoption de mesures encourageant le développement industriel se substituant à l’importation», a déclaré M. Benbahmed dans un entretien publié dans le n° 3 du magazine panafricain «Les champions économiques». Le taux de couverture en valeur était de 52% en 2019, précise-t-il, soulignant que cela illustre» la dynamique de croissance et de développement» que connaît le secteur depuis le création du ministère de l’Industrie pharmaceutique (en 2020, Ndlr), qui travaille, aujourd’hui, pour «augmenter davantage ce taux, notamment à travers la production de médicaments à forte valeur ajoutée tels que l’anticancéreux et les insulines». M. Benbahmed a précisé, en outre, que la réduction de la facture d’importation, «ne s’est pas faite au détriment des malades», au contraire, souligne-t-il, «elle est le résultat d’une meilleure régulation du marché et surtout de l’augmentation de la production nationale». Selon le ministre, la production nationale des médicaments avait augmenté d’un milliard de dollars en 2021 par rapport à 2019 (3,1 milliards de dollars en 2021, 2,4 en 2020 et 2,1 en 2019), ajoutant que la facture de l’importation des médicaments a été réduite en 2021 de 800 millions de dollars par rapport à 2019 (2 milliards de dollars en 2019, 1,7 en 2020, 1,2 en 2021), en limitant l’importation aux seuls médicaments essentiels non ou pas assez produits localement. M. Benbahmed fait mention également d’une baisse de 20% du prix des Insulines importées, soit une économie de 10 milliards de dinars annuellement. «Depuis l’installation du comité économique intersectoriel en janvier 2021, nous avons priorisé l’enregistrement de certains médicaments et nous prévoyons une économie prévisionnelle de 50 millions de dollars par an, grâce au passage à la production nationale de 38 molécules biosimilaires et génériques auparavant importées, soit une substitution direct à l’importation de 50 millions de dollars/an», relève M. Benbahmed à ce magazine économique. S’agissant de l’exportation, les prévisions pour cette année s’élèvent à hauteur de 50 millions d’euros, grâce à la mise en place d’un programme prévisionnel d’exportation, confie le ministre. Il a également insisté sur l’importance accordée par son département ministériel à la recherche développement (R&D) dans le domaine pharmaceutique. «L’année 2021 a permis de réaliser une progression de 50% en terme de nombre de nouveaux produits lancés grâce à la mise en place d’un programme de transformation industrielle», dira-t-il, ajoutant qu’«à partir de cette année le développement prendra encore plus d’importance en investissant massivement dans la R&D près de 185 millions de dinars». Concernant les études cliniques, qui représentent «un maillon stratégique dans le processus de développement de l’industrie pharmaceutique», le ministre a révélé que son département «envisage de réaliser 100 études cliniques en 2022». Il a précisé dans sens, que le ministère «ambitionne d’atteindre un volume de 200 millions de dollars à l’horizon 2024» en matière d’exportation des services dans le domaine pharmaceutique.
De la satisfaction des besoins du citoyen à la conquête des marchés étrangers
L’industrie pharmaceutique locale qui connait depuis la dernière décennie un saut qualitatif a réussi à couvrir 70% des besoins nationaux et œuvre actuellement à conquérir les marchés étrangers, notamment africains. Après avoir réalisé un taux de 70% en matière de couverture des besoins nationaux, le secteur de l’Industrie pharmaceutique s’est vu confier par les pouvoirs publics la mission d’exporter les médicaments fabriqués localement. La participation du secteur à la première édition du salon «El Djazaïr Healthcare» qu’abrite la capitale sénégalaise Dakar du 17 au 20 mai, intervient justement dans le cadre de la concrétisation de cette démarche. Historiquement, l’industrie pharmaceutique en Algérie a été lancée au milieu des années 90 après la promulgation d’une loi obligeant les multinationales commercialisant des médicaments en Algérie à investir et à produire dans le pays dans le cadre d’un partenariat avec les secteurs public et privé. Les premiers partenariats ont été conclus entre les laboratoires américains «Pfizer», français «Sanofi», et le Groupement pharmaceutique de l’Union européenne «GPUE» avec le groupe Saidal, afin de produire plusieurs types de médicaments durant une période marquée par la réticence des sociétés étrangères à investir en Algérie. Depuis, de nouvelles unités relevant du secteur privé ont vu le jour et lancé la production dans le cadre de partenariats avec des entreprises étrangères, pour s’élargir ces dernières années jusqu’à atteindre 100 unités de production qui ont prouvé leur existence en couvrant les besoins nationaux. En dépit de l’encouragement de l’Etat à investir dans ce domaine, ces unités ont souffert de plusieurs obstacles, dont l’absence de textes juridiques organisationnels et d’assiettes foncières, outre la difficulté de bénéficier de crédits bancaires, sachant que toutes les usines pharmaceutiques à travers le pays sont dirigées par des compétences algériennes diplômées des universités nationales. Certaines unités qui se sont lancées dans l’aventure de l’exportation ont également souffert du problème de transport et de change de devises en passant par des banques étrangères, en attendant l’ouverture de succursales de banques nationales à l’étranger. Pour assurer un produit «sûr», cette industrie a été accompagnée par le Laboratoire national de contrôle des produits pharmaceutiques, remplacé par l’Agence nationale des produits pharmaceutiques (ANPP) en 2020.
«Nécessité d’insuffler une nouvelle dynamique au secteur»
Pour renforcer la production locale et réduire la facture de médicaments dont le montant avoisinait les 3 millions d’euros durant les années 90, la relance de l’industrie pharmaceutique «à ses débuts» à l’époque était devenue un impératif, d’où la promulgation d’une série de lois y afférentes et l’encouragement de l’exportation, d’autant que les besoins nationaux étaient satisfaits dans une large mesure, et ce, outre, la production d’autres types de médicaments destinés aux maladies chroniques comme le cancer. Eu égard à l’importance du secteur, la loi sur la santé de 2018 a accordé «aux produits pharmaceutiques, ainsi qu’aux consommables et équipements médicaux la plus grande part, en témoigne la création récente d’un ministère de l’Industrie pharmaceutique qui «a insufflé une nouvelle dynamique au secteur pour faire face aux pressions et au monopole des multinationales. Ces mesures ont été suivies par la création du Centre national de bioéquivalence par le groupe Saïdal pour comparer l’efficacité des médicaments génériques avec les médicaments princeps, outre la création de la Faculté de pharmacie à l’université d’Alger qui comptait auparavant parmi les départements de la faculté de médecine en vue d’améliorer l’enseignement et l’accompagnement de l’industrie dans ce domaine. Cette démarche sera généralisée à l’ensemble des autres facultés de médecine. La faculté de pharmacie a créé une nouvelle spécialité adaptée au développement de l’industrie pharmaceutique, consistant en une formation pharmaceutique et l’élargissement de la formation au Master et doctorat pour encourager la recherche scientifique et la garantie de postes d’emploi. Pour jeter les ponts entre l’Université algérienne et son environnement socio-économique par souci d’encourager la recherche scientifique, la faculté de pharmacie de l’université d’Alger a signé plusieurs conventions de partenariat avec des laboratoires de production de médicaments.
Synthèse Asma H. /Ag.