Contribution: Suite au rapport du gouverneur de la banque d’Algérie du 21 décembre 2021 Les défis pour l’année 2022, relancer l’économie pour éviter la régression sociale

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Malgré une situation difficile, où le taux d’inflation, selon la banque d’Algérie a atteint 9,2% au mois d’octobre 2021, le taux de chômage avoisinant 15% de la population active, selon le FMI, l’Algérie n’est pas en faillite contrairement à la vision de sinistrose sans proposer des solutions concrètes, a les moyens de surmonter la crise actuelle sous réserve d’une nouvelle gouvernance et d’éviter la vision monétariste restrictive, devant concilier la dynamique économique et la dynamique sociale au sein d’une économie ouverte. Pour preuve, selon le gouverneur de la banque d’Algérie (agence APS du 21/12/2021), les réserves de change, hors or, ont atteint 44,724 milliards de dollars à fin septembre 2021 et y compris les réserves d’or (173 tonnes) estimées à environ 11 milliards de dollars au cours actuel, nous avons plus de 55 milliards de dollars.

1.-Selon la banque d’Algérie dans son rapport de décembre 2021, le déficit de la balance commerciale est passé de 10,504 milliards de dollars à fin septembre 2020 à 1,571 milliard de dollars à fin septembre 2021, ce qui donnerait à la même tendance fin 2021, environ 2,1 milliard de dollars. Ce recul du déficit est dû principalement à la forte hausse du prix du pétrole où au cours des neuf premiers mois de 2021, le prix moyen a enregistré une hausse de 66,6%, passant de 41,365 $ /baril, au cours de la même période de l’année écoulée, à 68,917 $/baril, (les quantités d’hydrocarbures exportées exprimées en Tonne Equivalent Pétrole (TEP), ayant augmenté de 20,9%) permettant de dynamiser les exportations qui sont passées de 16,240 milliards de dollars à fin septembre 2020 à 26,402 milliards de dollars à fin septembre 2021 donnant en tendance fin 2021 35,02 milliards de dollars. La valeur totale des exportations des hydrocarbures a enregistré une forte hausse de 57,3%, passant de 14,868 milliards de dollars à fin septembre 2020 à 23,387 milliards à fin septembre 2021, ce qui donnerait avec la même tendance fin 2021 31,1888 milliards de dollars y compris les dérivées d’hydrocarbures.

Les exportations de biens hors hydrocarbures ont atteint 3,015 milliards soit en tendance fin 2021, environ 4 milliards de dollarsLes dérivées d’hydrocarbures sont inclus dans la rubrique hors hydrocarbures qui dépassent en 2021 les 2,5 milliards de dollars laissant aux autres rubriques environ 1,5 milliard de dollars, soit 3/4%, le taux étant encore plus faible, environ 2%, si on enlève les semi produits exportés à très faible valeur ajoutée. Cependant la balance commerciale a une signification limitée devant prendre en compte la balance des paiements qui inclut les services et les mouvements de capitaux. Ainsi les exportations de services ont connu une stagnation relative à fin septembre 2021, passant de 2,273 milliards de dollars à fin septembre 2020 à 2,300 milliards de dollars à fin septembre 2021 et les importations de services ont enregistré une baisse de 630 millions de dollars, de 5,644 milliards de dollars à fin septembre 2020 à 5,015 milliards de dollars à fin septembre 2021, ce qui donnerait avec la même tendance fin 2021, 6,696 milliards de dollars accusant une forte baisse par rapport aux années 2010/2019 où les transferts de devises fluctuant entre 10/11 milliards de dollars. Le déficit du solde du compte courant est passé de 14,491 milliards de dollars à fin septembre 2020 à 5,543 milliards de dollars à fin septembre 2021 donnant en tendance, 7.392 milliards de dollars, avec un le solde du compte capital et des opérations financières affiche, à fin septembre 2021, un excédent de 3,104 milliards de dollars soit en tendance annuelle 4,4140 milliards de dollars ayant un impact sur le solde de la balance des paiements. En outre, le solde du compte capital et des opérations financières affiche, à fin septembre 2021, un excédent de 3,104 milliards de dollars contre 2,493 milliards de dollars à fin septembre 2020, soit en hausse de 611 millions de dollars. Les réserves de change, dans l’hypothèse du même scénario que les neuf premiers mois de 2021 diminuerait de 6,784 milliards de dollars par rapport à 2020 ( 48 milliards de dollars) donc fin 2021 entre 41/42 milliards de dollars non compris l’or. Au total, les exportations de biens et services ont atteint 28,702 milliards de dollars au cours des neuf premiers mois de 2021 contre 18,513 milliards de dollars à la même période de 2020 ce qui donnerait en tendance annuelle 38,280 milliards de dollars. Quant aux importations de biens, elles sont estimées à 4,6 % entre septembre 2020 et septembre 2021, passant ainsi de 26,744 milliards de dollars à 27,973 milliards de dollars, soit en tendance annuelle fin 2021, 37,208 milliards de dollars. En incluant les services, le total des importations de biens et de services, sont passées de 32,388 milliards de dollars à fin septembre 2020 à 32,988 milliards de dollars au cours de la période, ce qui donnerait en tendance annuelle 43,992 milliards de dollars de sorties de devises pour 2021. Cependant, évitons la vision purement monétaire. Pour plus d’objectivité, l’on ne doit pas donner que la valeur, certains produits comme les engrais ayant connu une hausse entre 30/40% sur le marché mondial en 2021, mais également le volume exporté (kg, tonne, etc.) afin de voir s’il y a eu une réelle dynamique d’exportation de certaines entreprises, dresser la balance devises en soustrayant les matières importées en devises, ainsi que les exonérations fiscales et certaines subventions comme le prix de cession du gaz cédé à 10/20% de la cotation sur le marché international pour certaines unités exportatrices fortes consommatrices de gaz. Par ailleurs, les analyses purement monétaires ont une signification limitée, avec le nombre de projets bloqués dont la réalisation aurait donné un déficit de la balance commerciale fin 2021 plus important. Le président de la République a annoncé la levée du gel de 57 projets sur les 402 projets d’investissement suspendus pour des raisons administratives. Il ne faut jamais en économie raisonner en statique, mais toujours en dynamique devant prendre en compte la restriction drastique des importations des entreprises dont le taux d’intégration en 2021 ne dépasse pas 15%, ayant assisté à une paralysie de l’appareil de production en 2021, uniquement dans le BTPH plus de 150 000 licenciements. Si on avait mis en œuvre les 402 projets bloqués, et en prenant en moyenne une sortie de devises pour des projets PMI/PME concurrentiels au niveau du marché mondial avec seulement de 50 millions de dollars pour les sorties en devises, sans compter la partie dinars, auraient été de plus de 20 milliards de dollars entre 2020/2021. Et ce, sans parler de cette interminable blocage du dossier des voitures où années 2020/2021 sont des années blanches.

Les consommateurs algériens assistent donc à un feuilleton interminable où l’objectif a été dès le départ d’économiser les réserves de change, le besoin annuel étant, selon les experts à environ 250 000 unités/an ce qui équivaudrait à plus de 2,5 milliards de dollars/an, ayant permis donc d’économiser environ 5 milliards de dollars entre 2020/2021

Cette politique, en plus de la restriction drastique d’autres produits, au gré de la conjoncture sans vision stratégique, a paralysé tout l’appareil de production, le dernier feuilleton étant la poudre de lait, restriction qui vient d’être levée, contribuant à accélérer le processus inflationniste, le prix des voitures d’occasion ainsi les pièces détachées avec la pénurie ayant connu une hausse variant, selon les catégories entre 50 et 100%, en plus des accidents de voitures, laminant le pouvoir d’achat des camionneurs, des taxieurs et des consommateurs. Ces montants sont à soustraire aux réserves de change existantes évaluées à 44 milliards de dollars fin septembre 2021 ce qui aurait donné moins de 20 milliards de réserves de change fin 2021. Mais à moyen terme, ces projets auraient permis une balance devises positive.

2.- . D’où l’importance de rappeler les principales dispositions de la loi de finances 2022 adoptée par l’APN. – LE PLF 2022, se basant sur un cours de 45 $ le baril du Brent et un prix du marché de 50 $, prévoit une croissance de 3,3% contre 3,4% en 2021 et moins 6% en 2020, taux de croissance faible par rapport à TO donne une croissance faible. Il faudra être réaliste si on prend un exemple si les projets du fer de Gara Djebilet et du phosphate de Tébessa commencent leur production en 2022, l’investissement de ces deux projets étant estimées à environ 15 milliards de dollars ainsi que le projet du gazoduc Nigeria/Algérie dont le coût est estimé par l’Europe 20 milliards de dollars, le seuil de rentabilité sera vers 2027/2030. Malgré le dérapage du dinar pour ne pas dire dévaluation de 5 dinars vers les années 1970/1973 de 80 $ entre 2000/2004 et actuellement entre 138/139 DA un dollar cela n’a pas permis de dynamiser les exportations hors hydrocarbures montrant que le bocage est d’ordre systémique avec la dominance du terrorisme bureaucratique qui bloque les énergies créatrices. Comment ne pas rappeler que l’Algérie a engrangé plus de 1000 milliards de dollars en devises entre 2000/2019, avec une importation, de biens et services toujours en devises de plus de 935 milliards de dollars pour un taux de croissance dérisoire de 2/3% en moyenne alors qu’il aurait dû être entre 9/10% et une sortie de devises de 20 milliards de dollars en 2020 pour une croissance négative, selon le FMI de 6%. Le taux de croissance, selon le FMI devrait se situer à 3,4% en 2021, mais un taux de croissance se calcule par rapport à la période précédente : un taux élevé en T1 par rapport à un taux faible en TO donne un taux relativement faible. Le déficit budgétaire prévu est d’environ 4175 milliards de dinars au cours de 137 DA un dollar 30,50 milliards de dollars, 8 milliards de dollars de plus qu’en 2021. Le niveau d’inflation devrait s’élever à 4,9% d’ici fin 2021, contre 2,4% en 2020. Or, l’indice n’a pas été réactualisé depuis 2011 et en 2021 certains produits comme les pièces détachées avec une pénurie croissante, et l’inflation pour les produits non subventionnées ont connu une hausse entre 50/100%. Du fait que plus de 85% des matières premières sont importées, taux d’intégration faible, par les entreprises publiques et privées, sans compter l’assistance technique étrangère, avec la dévaluation du dinar entre 2022 et 2024, l’inflation sera de longue durée. Selon les prévisions de l’Exécutif, le taux de change du dinar sera de 149,3 DA pour un dollar l’an prochain, de 156,8 DA/dollar en 2023 et 164,6 DA/dollar en 2024. La cotation du dinar est passée de 5 DA un dollar en 1970, à 80 en 2000/2004 et ayant dépassé la barre des 138 DA un dollar le 21/11/2021, ayant été coté à 138,6239 DA un dollar et 157,1579 DA un euro et sur le marché parallèle 219 dinars un euro à la vente et 217 DA un euro à l’achat. Malgré cette dévaluation le blocage étant d’ordre systémique, contrairement à l’illusion monétaire, cela n’a pas permis de dynamiser les exportations où avec les dérivées 97/98% des recettes en devises proviennent de Sonatrach. Ce dérapage du dinar permet d’atténuer le montant de ce déficit budgétaire car si on avait un dollar 100 DA, il faudrait pondérer à la hausse d’au moins 37% le déficit budgétaire serait pour fin 2022 supérieur à 42 milliards de dollars.

L’Algérie, selon le FMI fonctionnant entre le budget de fonctionnement et d’équipement, a plus de 137 dollars en 2021 et à plus de 150 pour 2022, malgré toutes les restrictions qui ont paralysé l’appareil de production avec des impacts inflationnistes

 Le faible taux de croissance influe sur le taux de chômage, qui, selon le FMI, en 2021 serait de 14,1% et 14,7% en 2022 incluant les sureffectifs des administrations, entreprises publiques et l’emploi dans la sphère informelle entre 6000 et 10.000 milliards de dinars soit au cours de 137 dinars un dollar entre 44 et 73 milliards de dollars. Pour éviter des remous sociaux, l’on a généralisé les subventions source de gaspillage croissant des ressources financières du pays, sans avoir toujours bénéficié aux plus démunis. Pour 2022, les subventions prévues sont de 1.942 milliards de dinars représentent 19,7% du budget de l’Etat, dossier très complexe que le gouvernement a décidé de revoir. Mais sans maîtrise du système d’information et la quantification de la sphère informelle, produit de la bureaucratie qui permet la consolidation de revenus non déclarés, en temps réel, la réforme risque d’avoir des effets pervers

En conclusion, en réalité, le rapport du gouverneur de la banque d’Algérie montre clairement qu’ en ce mois de décembre 2021, Sonatrach c’est l’Algérie et l’Algérie c’est Sonatrach. Le véritable patriotisme implique un devoir de vérité, loin des discours d’autosatisfaction de courtisans en contrepartie d’une rente, où se dessinent d’importants bouleversements géostratégiques mondiaux, devant éviter le mythe bureaucratique de croire que l’on peut développer le pays à partir de lois, de codes, de commissions et de circulaires, ignorant tant les mutations mondiales que la morphologie sociale interne, en perpétuelle évolution. Les défis de l’Algérie, pays à fortes potentialités, impliquent de définir les priorités stratégiques et avoir une nette volonté politique pour mettre en œuvre la bonne gouvernance et les réformes structurelles nécessaires devant concilier la concertation, l’efficacité économique au sein d’une économie ouverte.

Par le Dr Abderrahmane Mebtoul