Le 1er Novembre du XXIe siècle: Pour une nouvelle Révolution

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En cette veille du déclenchement de la Révolution du 1er Novembre, l’Algérie que nous appelons de nos vœux sera celle que l’on construira, toutes tendances confondues. Une seule exigence : l’amour de l’Algérie. La vraie identité des Algériens est ce droit et ce devoir de «vivre ensemble, que l’on soit de l’Est ou de l’Ouest, du Nord ou du Sud».

Le 1er Novembre de papa appartient à l’Histoire ; par contre, l’esprit de Novembre, qui a fait que des jeunes, par leur sacrifice suprême, ont arraché l’Algérie des griffes du pouvoir colonial, doit être toujours en nous. Nous devons le ranimer chacun de nous en donnant l’exemple de l’abnégation. Pour cela, seul le parler vrai, l’honnêteté et le travail permettront à nos aînés de se reposer enfin, sachant que le flambeau est définitivement entre de bonnes mains. Le monde a changé. Les chaos libyen et malien sont à nos portes. Les loups attendent la curée. Il faut savoir ployer pour ne pas rompre les partis actuels seraient utiles en incitant les Algériens à travailler, s’instruire ; bref, être une nouvelle Révolution, celle de l’intelligence. Inventons un nouveau 1er Novembre mobilisateur qui puisse répondre aux défis du siècle concernant la sécurité alimentaire, le problème de l’eau, des changements  climatiques et par-dessus tout le défi de l’énergie, tant il est vrai que cette rente n’est pas au service du développement. Il est plus que temps de freiner cette hémorragie et de comprendre que notre meilleur coffre-fort est notre sous-sol. Dans un monde de plus en plus dangereux à la fois sur le plan des éléments naturels — notre pays étant vulnérable aux changements climatiques —, mais aussi sur les plans  économique, financier et militaire, que devons-nous faire ? Il nous faut «moderniser» le 1er Novembre qui doit être décliné avec les outils du XXIe siècle. Pour faire court, la Révolution de Novembre devra être réappropriée par la jeunesse. Il nous faut chaque fois réinventer le sens de l’indépendance nationale. Le nouveau langage n’est plus seulement celui des armes, mais celui de la technologie du Web2.0. Il faut, avec l’argent de la rente, mettre en place un développement durable à marche forçée. Une révolution de l’intelligence est certainement la solution. Seul le parler vrai permettra à l’Algérie de renouer avec ce nationalisme qui, contrairement, n’est pas passé de mode, c’est un puissant stimulant. À côté de la légitimité révolutionnaire de nos aînés moudjahidine, le moment est  venu de faire émerger la légitimité de la compétence, du neurone, celle capable de faire sortir l’Algérie des temps morts. Si on ne fait rien pour revitaliser le 1er Novembre, cette symbolique disparaîtra alors que nous avons besoin plus que jamais d’un ciment fédérateur qui puisse assurer ce désir de vivre ensemble. Nous devons nous référer à nos aînés, à leurs formidables courage et détermination, pas pour en faire un fonds de commerce qui, près de 60 ans après l’indépendance, structure encore la société oubliant que la majorité des Algériens nés après l’indépendance n’ont qu’un lointain rapport avec la Révolution qui n’est pas explicitée en termes de défi à perpétuer pour porter haut et fort une nouvelle révolution de Novembre 2.0. Plus que jamais, la transition énergétique devrait être à l’honneur et il ne faut surtout pas croire que le baril à 80 $ va durer. Ce serait une tragique erreur d’arrêter de mettre en œuvre les chantiers lancés de la transition énergétique, de la locomotion électrique de l’hydrogène vert, de la plantation proposée de 1 milliard d’arbres à croissance rapide pour développer le bois, énergie capable de nous permettre de freiner cette course vers l’abîme qui nous fait consommer près d’un milliard de m3 de gaz par semaine pour un prix actuel de 400 millions de dollars.  Comment survivre et ne pas devenir une zone grise ouverte à tous les vents ?  En son temps, Boumediene avait mis l’Algérie en  chantier  autant de «grain à moudre à la jeunesse des années 70 qui a perpétuer à sa façon modestement la glorieuse Révolution de Novembre. C’est cette utopie des années 70 qui a fait que le Service national a été le creuset du vivre-ensemble et du faire-ensemble qui a fait que ma génération s’est trouvée engagée dans les différents chantiers du pays qui sont le barrage vert – que l’on veut revitaliser en 2021, la construction des mille villages agricoles pour remplacer les milliers de villages détruits au napalm. La nationalisation du pétrole qui fait que les complexes de GNL, de pétrochimie actuels, les 22 millions de tonnes de raffinage actuels datent de cette époque. J’emprunte à Saint-Exupéry sa vision de l’engagement : «Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas tes hommes et femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose. Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer.» Mutatis mutandis, nous devons faire naître au sein de la jeunesse cette utopie ce désir d’être utiles et d’être acteurs de leur destin, ce désir de construire, de se sentir responsable de l’avenir du pays et ceci par des chantiers permanents. Une nouvelle révolution du 1er Novembre 2.0 permettra de former une élite scientifique pour la lutte permanente contre le stress hydrique et les changements climatiques.

Il s’agira aussi de développer le Sud dans ses multiples dimensions, en développant l’agriculture saharienne, en créant des villes nouvelles. Bref, autant de chantiers avec un plan Marshall pour l’hydrogène vert qui créeront une nouvelle utopie. Cette Algérie nouvelle tant rêvée devrait, avant toute chose, parler d’une seule voix et prôner plus que jamais le dialogue partant du fait qu’il n’y a pas de patriote plus patriote que les autres, que nous n’avons pas de patrie de rechange ou de repli hic et nunc (ici et maintenant), nous devons trouver en nous les modes d’entente sur les fondamentaux du pays. Un pays en ordre de marche ira avec moins de difficultés à affronter les challenges qui l’attendent. Nous ne pouvons avoir meilleure preuve de fidélité aux messages de Novembre.

Pour un récit national du XXIe siècle Nous sommes au XXIe siècle. Notre pays a atteint l’âge de raison. Il n’est pas normal que, près de soixante ans après l’indépendance, nous ne puissions pas nous reconnaître en tant qu’Algériens avant tout. De fait, le premier des chantiers est celui du récit national. Nous devons, à l’instar de toutes les nations, avoir des icônes fondatrices du récit national. Il en est ainsi de la destinée manifeste des Américains, de Jeanne d’Arc en France, voire d’un mandat de Dieu pour le peuple élu. La difficulté d’ouvrir le dossier de  l’identité des Algériens dans ce XXIe siècle de tous les dangers. Cette quasi-errance ouvre un boulevard à tous ceux tentés par l’aventure de fracturer un pays que 132 ans de colonisation abjecte n’ont pas pu réaliser. Il n’est que de voir que pour des raisons bassement électoralistes, des hommes politiques de l’Hexagone se permettent, toute honte bue, d’affirmer que c’est le pouvoir politique en France qui a donné une existence à l’Algérie après l’invasion sanguinaire de 1830. Dans une de ses conférences, Ernest Renan décrivait la nation ainsi : «Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n’en font qu’une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L’une est dans le passé ; l’autre dans le présent. L’une est la possession en commun d’un riche legs de souvenirs ; l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre- ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis.» De mon point de vue, le fait de différer constamment la question qui est de définir le projet de société et s’interroger sur ce que c’est qu’être Algérien au XXIe siècle est porteur de danger. Quels sont nos fondamentaux culturels et cultuels ? La quête d’un récit national consensuel, qui fait siens aussi bien Massinissa que Jugurtha que l’Émir Abdelkader et qui se réfère à un Islam de 1400 ans fait de tolérance, est un chantier qui attend toujours d’être ouvert tant il est vrai que l’aboutissement à un vivre-ensemble au nom d’une algérianité assumée qui coupera la route à l’aventure de ceux qui cherchent leur légitimité soit auprès de l’ancien colonisateur ou d’une sphère moyen-orientale installée dans les temps morts. Nous irons alors à la conquête du savoir ayant des racines assumées et des ailes pour prendre notre envol et apporter notre part à la civilisation humaine. Plus que jamais, nous appelons de nos vœux un aggiornamento qui nous permettra de rentrer enfin dans ce XXIe siècle de tous les dangers.

Pr Chems Eddine Chitour:/ Mondialisation