De l’exploitation coloniale à la souveraineté minière: L’Algérie trace sa voie vers une valorisation durable de ses ressources

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À l’occasion du 59e anniversaire de la nationalisation des mines, l’Algérie revient sur un long parcours de libération, de reprise de contrôle et de développement de ses ressources minières, symboles d’un combat économique entamé dès l’indépendance.

L’histoire des ressources minières en Algérie s’inscrit dans une trajectoire marquée par la lutte contre l’exploitation coloniale, la reconquête de la souveraineté nationale et l’ambition d’un développement durable. De l’ère du pillage organisé par le système colonial à la maîtrise nationale de son sous-sol, le pays a su transformer une situation de dépendance en un levier stratégique au service de son avenir économique. Pendant la colonisation française, les mines algériennes ont été au cœur d’un projet de prédation systématique. Le fer, le phosphate, le zinc, le plomb, le sel et d’autres ressources étaient extraits en masse, puis exportés vers la métropole. Des régions entières telles que Boukhadra, Ouenza, Breira ou Beni Saf, ont vu leurs richesses souterraines épuisées au profit de l’économie française, sans retombées locales. À Tébessa, la mine d’El Kouif a été exploitée jusqu’à l’épuisement, entre 1929 et 1963, illustrant cette logique extractive coloniale. Selon des données historiques, plus de 1,3 million de tonnes de matières premières minières ont été produites en 1913, et jusqu’à 40 mines étaient actives en 1954. Dans les années 1950, l’Algérie assurait plus de 60 % du fer et près de la moitié du phosphate utilisés dans les industries françaises, tandis que les régions minières restaient dans la misère et l’abandon. Cette marginalisation a fait de ces zones des foyers de résistance où de nombreux jeunes ont rejoint les rangs de la Révolution du 1er novembre 1954. À l’indépendance en 1962, les mines restaient majoritairement sous contrôle étranger, avec 98 % de la production destinée à l’exportation. Les entreprises étrangères se désengageaient des sites épuisés tout en maintenant leurs activités sur les gisements encore rentables. La main-d’œuvre algérienne, peu représentée parmi les cadres et techniciens, peinait à faire face à un secteur minier vieillissant, mal équipé et peu exploré. C’est dans ce contexte que le président Houari Boumediene annonçait, le 6 mai 1966, la nationalisation des mines. « L’Algérie s’est réappropriée ses ressources naturelles et sera en mesure de garantir une totale liberté de disposition et d’exploitation de ses richesses », affirmait-il. Cette décision majeure concernait onze grandes sociétés, opérant notamment dans les mines de fer d’El Ouenza et Boukhadra (Tébessa), de zinc et de plomb d’Aïn-Barbar (Annaba) et Sidi Kamber (Constantine), ainsi que les carrières de calcaire. L’État mettait en place une stratégie globale de gestion, avec la création du Bureau algérien de recherches et d’exploitations minières (BAREM), suivi, en mai 1967, de la fondation de la Société nationale de recherches et d’exploitations minières (SONAREM). Malgré le départ précipité des cadres étrangers, l’Algérie a formé des milliers de techniciens, ingénieurs et ouvriers pour assurer la continuité des opérations. Des mines ont été modernisées ou ouvertes à Beni Saf, Boukaid, Kenadsa ou Tamzerit.

Aujourd’hui, alors que l’Algérie célèbre cet acte fondateur, elle se projette vers l’avenir avec de nouveaux projets structurants. La mine de Gara Djebilet, remise en exploitation depuis juillet 2022, incarne cette ambition renouvelée. Elle est accompagnée par le projet intégré du phosphate à Tébessa, qui ambitionne de faire du pays un acteur majeur sur le marché mondial des engrais, ainsi que le projet de zinc et de plomb d’Oued Amizour à Béjaïa, qui renferme plus de 34 millions de tonnes de réserves. Dans cette dynamique, le gouvernement a élaboré un projet de nouvelle loi minière, actuellement soumis au Parlement. Ce texte vise à simplifier les procédures, améliorer la transparence et encourager les investissements nationaux et étrangers dans le secteur minier. En somme, l’Algérie est passée du statut de terre exploitée à celui d’État souverain, maître de ses richesses naturelles. Le secteur minier, longtemps symbole de pillage, devient aujourd’hui un pilier de croissance et de transformation industrielle. Entre le souvenir de la nationalisation et les défis contemporains de valorisation, le pays affirme sa volonté d’un avenir fondé sur l’exploitation rationnelle, durable et souveraine de ses ressources.

Amel Driss

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