Décisions du G7 d’avril 2023: Les effets du réchauffement climatique et la sécurité mondiale et la nécessaire transition énergétique

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La transition énergétique désigne l’ensemble des transformations du système de production, de distribution et de consommation d’énergie effectuées sur un territoire dans le but de le rendre plus écologique, visant  à transformer un système énergétique pour diminuer son impact environnemental, renvoyant à un nouveau modèle de consommation énergétique.

Les réserves mondiales prouvées d’énergie fossile ont été estimées en 2020, selon l’Agence fédérale allemande pour les sciences de la Terre  à 40 517exajoules   dont 55 % de charbon, 25 % de pétrole et 19 % de  gaz naturel. Ces réserves en prenant le même modèle de consommation actuel assurent 83 ans de production au rythme actuel, cette durée étant très variable selon le type d’énergie: 56 ans pour le pétrole, 54 ans pour le gaz naturel, plus de 139 ans pour le charbon et pour  l’uranium  de 90 à 130 ans selon les estimations. En 2021, selon l’AIE, dans le mix énergétique, le pétrole représente 30,95%, le gaz naturel 24,42%, le charbon 26,90%, le nucléaire 4,25%, l’hydraulique 6,76% et le renouvelable 6,70% et en 2022, nous avons assisté  à une  la place non négligeable du nucléaire (7.34% du mix), et une légère hausse du renouvelable avec 7.42%.  Cette contribution est une  synthèse de mes deux  interventions, celle   le  21 avril 2023 sur la nouvelle reconfiguration géostratégique mondiale à Radio Algérie Internationale ( focus de la semaine) et à la télévision internationale  AL24 le  22 avril 2023  sur le thème quels  impacts  de la  décision du G7 d’accélérer la transition énergétique.

1 – Le monde connaît un bouleversement inégal depuis des siècles d’un côté pluies diluviennes, inondations de l’autre côté, sécheresse et incendies avec une sécheresse maximale des inondations dévastatrices, des canicules terrestre et maritime, des tempêtes et ouragans, et la remise en cause de la biodiversité avec de nombreux morts et blessés humains et animaux frappant plus durablement les pays en voie de développement et surtout le contient Afrique avec des sécheresses et des déplacements de population.  C’est dans le contexte, de limiter l’utilisation des énergies fossiles qui menacent  avec le réchauffement climatique  l’humanité que les ministres de l’environnement et de l’énergie du G7 (Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie et Canada) se sont  réunis pour des discussions sur le climat et l’énergie les 16/17 avril 2023 à Sapporo, dans le nord du Japon  qui fait suite au rapport  alarmant du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié en mars 2023  le réchauffement de la planète causé par l’activité humaine atteindra 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle dès les années 2030-2035, avec sept effets négatifs. Premièrement, pour la hausse du niveau des mers, le constat est la hausse moyenne des températures qui provoque une fonte des glaces continentales (glaciers, icebergs, etc.). Le volume de glace fondue vient s’ajouter à celui de l’océan, ce qui entraîne une élévation du niveau des mers. Près de 30% de cette élévation est due à la dilatation causée par l’augmentation de la température de l’eau. Le GIEC estime que le niveau des mers pourrait augmenter de 1,1 m d’ici à 2100. Comme impact, les zones côtières seront confrontées à des inondations dans les zones de faible altitude plus fréquentes et plus violentes et à l’augmentation de l’érosion du littoral. Deuxièmement, la modification des océans qui absorbent naturellement du gaz carbonique, en excès dans les océans, acidifie le milieu sous-marin où avec  une  acidification trop importante des eaux marines peut provoquer la disparition de certaines espèces  et d’autres modifications des océans : baisse de sa teneur en oxygène, réchauffement et augmentation de la fréquence des vagues de chaleur marines,  affectant les écosystèmes marins, et les populations qui en dépendent. Troisièmement, l’amplification des phénomènes météorologiques extrêmes provoque l’évaporation de l’eau, ce qui modifie le régime des pluies avec des  pluies plus intenses, et des inondations, des sécheresses plus intenses et plus fréquentes dans de nombreuses autres régions et  d’autres dérèglements tels que le dérèglement des saisons et le déplacement des masses d’air qui pourraient, à long terme, accroître le nombre d’événements climatiques extrêmes : tempêtes, ouragans, cyclones, inondations, vagues de chaleur, sécheresses, incendies. Quatrièmement, le réchauffement climatique est une menace sur les plantes et les animaux car les cycles de croissance des végétaux sauvages et cultivés sont modifiés des modification des zones de vie de certaines espèces, modification des aires de migration, etc.

Elles devront migrer ou s’adapter rapidement à ce dérèglement climatique sous menace d’extinction, où un réchauffement de 1°C oblige déjà certaines espèces à se déplacer de plusieurs centaines de km vers le Nord ou de plusieurs dizaines de mètres en altitude pour retrouver leurs conditions de vie. Cinquièmement, l’impact du réchauffement climatique bouleverse les conditions de vie humaine. Aujourd’hui, selon le rapport du GIEC, environ 3,3 à 3,6 milliards de personnes vivent dans des habitats très vulnérables au changement climatique et si le niveau des mers augmente de 1,1 m, près de 100 millions de personnes seront contraintes de changer de lieu d’habitation, et certaines terres côtières ne seront plus cultivables, sans compter les risques sanitaires. Sixièmement, les dérèglements climatiques perturbent la distribution des ressources naturelles, leur quantité et leur qualité et donc les rendements agricoles et des activités de pêche où les  rendements agricoles pourraient baisser d’environ 2% tous les 10 ans tout au long du XXIe siècle, avec des fluctuations chaque année. Septièmement, les impacts sur les coûts, où selon l’AIE,  pour atteindre les objectifs, il faudrait investir chaque année jusqu’à 4 000 milliards de dollars au cours de la prochaine décennie, en dirigeant la majorité de ces investissements vers les économies en développement. Cependant une action maîtrisée collective, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (Ocde), une «transition énergétique pourrait entraîner une hausse de 2,5% du PIB mondial à l’horizon 2050 (voir débat du 23 octobre 2022 avec des experts internationaux où j’ai eu l’honneur d’y participer sur la chaîne  française LCP). Les ministres du G7  se sont mis d’accord pour  réduire la consommation de gaz et à augmenter la production d’électricité à partir de sources renouvelables, tout en éliminant plus rapidement les combustibles fossiles et en ne construisant pas de nouvelles centrales au charbon où près de la moitié des investissements records dans la transition verte en 2022 ont été réalisés par la Chine, suivie de très loin par les États-Unis, l’Allemagne, puis la France. Le montant des sommes consacrées aux renouvelables a pour la première fois dépassé 1000 milliards d’euros dans le monde, en hausse de 31 % en un an, selon un rapport de Bloomberg NEF. Soit à peu près autant que les investissements dans les énergies fossiles – une accélération impulsée par la crise énergétique liée à la guerre en Ukraine.

D’ici  à 2030/2035, les investissements prévus dans le cadre de la transition énergétique  Usa/Europe/Chine, Inde devrait dépasser les 4000 milliards de dollars où les  grandes compagnies devraient réorienter leurs investissements dans ces segments rentables à terme. Quant aux énergies renouvelables, le solaire (photovoltaïque pour l’essentiel) et éolien se taillent toujours la part du lion, avec 90% des constructions nouvelles. L’Irena relève cependant un ralentissement dans l’éolien par rapport aux deux années précédentes (+9% de capacité de production, +22% pour le solaire). En volume total, l’hydroélectricité reste – avec 1.250 gigawatts (GW) et 37% du total – la première des énergies renouvelables, note ce rapport «Renewable Capacity Statistics 2023».

Le solaire représente 31% du total et le vent 27%. La capacité totale de production, toutes sources renouvelables mêlées, s’élevait fin 2022 à 3.372 GW. Cependant, la part reste encore faible, le  nucléaire représentant (7.34% du mix), et une légère hausse du renouvelable (qui avec 7.42% en 2022 passe devant le nucléaire).  Lors de la réunion du G7 les ministres ont  envisagé  des objectifs chiffrés pour augmenter la capacité de production d’énergie solaire à au moins 1 térawatt et celle des éoliennes en mer à 150 gigawatts d’ici à 2030, réduire à zéro les émissions des industries les plus difficiles à décarboner, parmi lesquelles la chimie, le transport maritime et l’acier  d’ici à 2040 et accélérer leur sortie des énergies fossiles sur le plan environnemental, les pays du groupe se sont notamment engagés à réduire à zéro leur pollution plastique d’ici à 2040, grâce à l’économie circulaire, à la réduction ou à l’abandon des plastiques jetables et non recyclables. Objectif:  atteindre la neutralité carbone énergétique d’ici à 2050 «au plus tard». Mais si la  question des émissions dans les marchés émergents est depuis longtemps au centre des préoccupations des pays développés, toutefois, les pays les plus riches du monde, y compris la Russie et la Chine gros pollueur, doivent faire davantage pour aider les pays émergents à réduire les émissions de carbone. Dans ce cadre,  le G7 s’est  engagé  à œuvrer avec les autres pays développés à rassembler 100 milliards de dollars par an pour les pays émergents contre le réchauffement climatique, une promesse datant de 2009 et qui devait initialement être tenue dès 2020.  Un sommet pour améliorer l’accès aux financements des pays en développement en matière climatique, un point sensible et crucial pour une réussite de la COP 28, est notamment prévu à la fin de juin à Paris.

2 – Le réchauffement climatique pose le  problème de la sécurité alimentaire  renvoyant à la maîtrise de la gestion de l’eau. D’où   l’importance de l’adaptation qui s’applique aux usages et aux activités humaines, qui sont en capacité d’évoluer afin de limiter les risques liés aux impacts du changement climatique (ex : réduction de la consommation d’eau pour anticiper la pénurie d’eau, mise en place d’éco-quartiers au sein d’une ville,  ou au niveau individuel, récupération et réutilisation des eaux de pluies pour nettoyer sa voiture ou arroser les plantes), dans le secteur de l’agriculture, il est possible de choisir de planter des cultures adaptées au climat local ne nécessitant pas ou peu d’irrigation (agriculture climato-intelligente),  dans les villes, il devient de plus en plus fréquent de rencontrer des bâtiments présentant des toits ou murs végétalisés, ces techniques de végétalisation permettant une meilleure gestion des eaux de pluies mais également de lutter contre les îlots de chaleur (zone urbanisée où la température est plus élevée,     une réorientation des approvisionnements alimentaires vers un modèle plus résilient et à faible impact, une  agriculture plus durable avec des investissements dans des infrastructures qui résistent mieux aux futures conditions météorologiques extrêmes et le passage décisif aux véhicules électriques qui permettront de réduire les émissions de particules polluantes qui sont à l’origine d’une myriade de pathologies, notamment l’asthme avec des  effets positifs de la transition énergétique sur la santé devraient entraîner une réduction des frais médicaux, diminuant ainsi le coût net de l’investissement initial. Dans ce cadre, l’Algérie a adopté un plan ambitieux contre le réchauffement climatique du fait qu’elle a connu, au cours du siècle dernier, une augmentation de température de 0,3°C par décennie ainsi qu’un déficit de pluie de 15% se proposant de  réduire de 7 % de ses émissions des gaz à effet de serre, avec pour objectif, 22 % d’ici à 2030.  Nous avons  le  plan de relance de l’économie verte avec  pour objectif d’encourager le recyclage et de promouvoir les industries de transformation écologiques à travers la mise en place des incitations fiscales pour les sociétés industrielles qui s’engagent à réduire l’émission de gaz et de déchets chimiques. Dans le domaine du torchage du gaz, les efforts déployés ont permis de baisser les gaz brûlés de 500 millions de m3 durant l’année 2020-2021 et  entend intensifier ses investissements en matière de production du gaz naturel liquéfié sans carbone durant les prochaines années, ainsi que la relance du projet du Barrage vert en vue de son expansion à une superficie de 4,7 millions hectares durant les prochaines années. La politique de la transition énergétique en Algérie est  articulée autour de trois  axes, entrant dans le cadre d’un MIX énergétique, ne devant pas être utopique dont l’économie reposera encore pour longtemps sur les  hydrocarbures traditionnels, procurant en 2022 et certainement en 2023, environ avec les dérivées  98% de ses recettes en devises. La sécurité nationale, étant posée  avec le problème d’approvisionnement en eau et ses impacts  la facture alimentaire,  je note avec satisfaction que les propositions que j’ai émises  en 2019, viennent d’être prises en  compte lors  du dernier Conseil des ministres (avril 2023)  d’une généralisation des unités de dessalement des eaux de mer  sur toute la côte algérienne. La nappe de l’Albien qui est la plus grande nappe d’eau souterraine au monde, 50 000 milliards de mètres cubes, non renouvelables, étant à cheval  entre trois pays, l’Algérie 70%, la  Libye 20% et la Tunisie 10% pourrait dynamiser le secteur agricole sous réserve d’une utilisation rationnelle afin de ne pas briser l’écosystème et devant tenir compte du coût d’extraction , une grande fraction,  étant de l’eau saumâtre, nécessitant donc des investissements appropriés, sans compter la dureté du climat avec les vents de sable. La  solution la plus appropriée est  la nécessaire transition énergétique, comme cela a été mis en relief   dans le numéro 715 de février 2023 , de la revue de l’ANP El Djeich  ainsi que dans la revue mensuelle d’El Moudjahid – Politis où  je suis intervenu sur ce sujet avec  trois  axes stratégiques, restant un long chemin à parcourir : premièrement l’amélioration de l’efficacité énergétique devant revoir les méthodes de construction selon les anciennes normes qui exigent de forte consommation d’énergie, alors que les techniques modernes économisent 40 à 50% de la consommation (étude réalisée sous notre direction assisté par le bureau d ‘études américain Ernst & Young 2008, une nouvelle politique de subventions des carburants – Ministère de l’Energie 2008, 7 volumes 680 pages). Une nouvelle politique des prix s’impose renvoyant à une nouvelle politique des subventions ciblées, les subventions généralisées, injustes, occasionnant un gaspillage des ressources. Le deuxième axe  est lié au développement des énergies renouvelables devant combiner le thermique et le photovoltaïque, le coût de production mondial ayant diminué de plus de 50% et il le sera plus à l’avenir. Avec plus de 3 000 heures d’ensoleillement par an, l’Algérie a tout ce qu’il faut pour développer l’utilisation de l’énergie solaire. Mais le soleil tout seul ne suffit pas. Il faut la technologie et les équipements pour transformer ce don du ciel en énergie électrique. Le programme algérien consiste à installer une puissance d’origine renouvelable de près de 22 000 MW, dont 12 000 MW seront dédiés à couvrir la demande nationale de l’électricité et 10 000 MW à l’exportation, d’ici à 2030, l’objectif étant de produire 40% des besoins internes en électricité à partir des énergies renouvelables ce qui  nécessite d’importants financements. Le troisième  axe, est le développement de l’hydrogène vert où l’Algérie présente des avantages comparatifs,  ayant décidé d’investir entre 2030/2035 entre 20/25 milliards de dollars. (Professeur des universités – expert international –  Docteur d’Etat 1974 – Directeur d’Etudes au ministère de l’Energie (Sonatrach  1974/1979-1990/1995-200/2008-2013/2015). Abderrahmane Mebtoul – Président de la commission transition énergétique  des 5+5+ Allemagne (Marseille  juin 2019) a donné une conférence sur ce thème devant le président français Emmanuel Macron  et l’ensemble des ministres des Affaires étrangères des pays suivants :  (France- Italie – France, Portugal- Malte – Algérie- Maroc- Tunisie- Lybie- Mauritanie- invités  Allemagne – FMI-Banque mondiale ).

En conclusion, le monde connaît une crise économique mondiale qui devrait s’accentuer en 2023 selon le rapport d’avril 2023 du FMI, et sur le plan climatique un bouleversement inégal depuis des siècles, d’un côté pluies diluviennes, inondations de l’autre côté, sécheresse et incendies, car le climat mondial est un vaste système interconnecté. Pour les pays en voie de développement qui aspirent au bien-être des stratégies d’adaptation avec l’aide des techniques nouvelles des pays développés pouvant tolérer un minimum, sont nécessaires n étant pas responsable du réchauffement climatique dont la responsabilité en incombe en premier lieu aux pays développés y compris la Chine et la Russie gros pollueurs.  En bref, si l’Afrique, l’Asie dont la Chine et l’Inde plus de 4 milliards d’habitants sur les 8 milliards en 2023, avaient le même modèle de consommation énergétique que l’Europe et les USA, moins d’un milliard d’habitants pour un PIB mondial dépassant les 40%, il faudrait selon les experts trois à quatre fois la planète terre, d’où l’urgence de revoir le modèle de consommation énergétique mondiale.

A. M.