Hommage à une pionnière de la scène algérienne: Keltoum, figure emblématique du théâtre et du cinéma algériens

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Célèbre pour ses innombrables rôles au théâtre, au cinéma et à la télévision, Keltoum demeure l’une des premières femmes algériennes à s’être illustrée sur scène et à l’écran. À travers sa carrière exemplaire, elle a ouvert la voie à des générations d’artistes féminines, dans une société où la place de la femme dans le monde artistique était encore contestée.

De son vrai nom Aïcha Adjouri, Keltoum est née le 4 avril 1916 à Blida. Elle s’est imposée dans le paysage culturel algérien en dépit de nombreux obstacles familiaux et sociaux. C’est le regretté Mahieddine Bachtarzi, pionnier de l’art algérien, qui détecta son potentiel artistique et l’encouragea dès 1935 à explorer le chant, la danse et le théâtre. Elle fit ses premiers pas sur scène sous sa direction, à une époque où peu de femmes osaient braver les tabous pour monter sur les planches. Après une tournée en France, elle choisit de se consacrer pleinement au théâtre. Elle se distingue dans les œuvres de Mahieddine Bachtarzi, Rachid Ksentini et Habib Reda. En 1947, elle intègre la première saison arabe de l’Opéra d’Algérie. Très vite, elle devient incontournable : la majorité des rôles féminins lui sont attribués. Elle prête également sa voix au théâtre radiophonique et s’essaie à la chanson, enregistrant cinq disques entre 1940 et 1950. Elle revient ensuite au théâtre avec une adaptation d’Othello de William Shakespeare.

Une carrière artistique foisonnante

Après l’indépendance, Keltoum rejoint en 1963 le Théâtre national algérien (TNA), première institution culturelle nationalisée. Elle y retrouve la scène dans la pièce Mariage par téléphone, de Mahieddine Bachtarzi et Rachid Ksentini. En 1966, elle fait ses débuts au cinéma avec Le Vent des Aurès de Mohamed Lakhdar Hamina. Dans ce film emblématique, elle incarne une mère désemparée, errant de prison en prison à la recherche de son fils, arrêté par l’armée coloniale. Son image, vêtue simplement, un panier dans une main et un poulet dans l’autre, est devenue iconique dans le cinéma algérien. Le film recevra le Prix de la Première Œuvre au Festival de Cannes en 1967. Elle poursuit sa collaboration avec Hamina dans des œuvres majeures comme Décembre, Hassan Terro et Chronique des années de braise, qui remporte la Palme d’Or à Cannes en 1975. Elle apparaît aussi dans des productions marquantes telles que Beni Hendel de Lamine Merbah, Les Années folles du Twist de Mahmoud Zemmouri, Hassan Taxi de Mohamed Slim Riad et Hassan Niya de Ghaouti Bendedouche. Keltoum a incarné les rôles principaux dans une vingtaine de films et joué dans plus de soixante-dix pièces de théâtre. En 1991, elle partage la scène avec Rouiched dans Les Concierges, dernière pièce qu’elle interprète avant de se retirer définitivement de la scène. Le 11 novembre 2010, Keltoum s’éteint, laissant derrière elle une œuvre immense et un héritage culturel précieux. Sa carrière, marquée par le courage, le talent et la persévérance, demeure une source d’inspiration pour les artistes algériens d’hier, d’aujourd’hui et de demain.

Amine C

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